Repas du tue-cochon et moutarde de Bezolles

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Il y a 15 jours, nous vous racontions un repas traditionnel du tue-cochon : https://lejournaldugers.fr/article/72575-revenons-sur-nos-pas-le-repas-du-tue-cochon

Revenons sur nos pas et sur ce repas...

Le repas se termine avec les desserts toujours très abondants chez Amélie : le pastis gascon, des crêpes, des gaufres cuite au-dessus du feu.

Les convives discutent en appréciant la fin du repas quand s'élève la voix d'Henri : « Amélie, ton repas était excellent comme d'habitude ! Mais il manquait quelque chose... »

Tout au bout de la table, un vieux en train de se rouler une cigarette : « Eh oui, il manquait la moutarde de Bezolles ! Amélie, cela métonne de toi !" 

Et oui, la moutarde de Bezolles, l'incontournable des repas du tue-cochon !

Autrefois, sur les côteaux de Bezolles et d'Ayguetinte poussait la moutarde.

On disait que celle d'Ayguetinte était mieux garnie que celle de Bezolles.

En 1830, M.Bajan au lieu-dit Maridan à Bezolles a créé la recette de la moutarde : il a écrasé les grains de moutarde, les a mélangées à du moût de raisin, la moutarde de Bezolles était née.

Cette moutarde avait une teinte gris-noir et on précisait sur l'étiquette collée sur le verre : "Moutarde de Bezolles au moût de vin d'Armagnac, maison fondée en 1830"

Pour la fabriquer, on broyait avec des meules en silex les graines de moutarde qu'on mélangeait à du moût de raisin puis on ajoutait de la cannelle, des clous de girofle, du poivre et du sel.

Puis, on la « ferrait », c'est-à-dire qu'on plongeait dans le mélange « lou paloher », une pelle fabriquée par les forgerons du village pour repousser la braise sous la marmite.

Au préalable, on avait fait rougir l'ustensile que l'on trempait ensuite dans la moutarde.

Pourquoi ? Parce que le fer donne des forces, peut-être...  On prêtait encore bien d'autres vertus à la moutarde ainsi ferrée...

Bajan livrait sa moutarde dans les épiceries dans des bidons et on détaillait à la louche, le client portant son récipient.

La maison Fitte, toujours à l'affût de la bonne affaire, acheta le 28 août 1941, devant Maître Dumas, notaire à Valence, "le fonds de commerce de fabrication de moutarde au moût de vin du Gers, exploité par M. et Mme Bajan, à Bezolles".

Jean Fitte achète également le matériel, chaudière en cuivre, meule en silex...

Dans l'acte de vente, figure un engagement des vendeurs à ne pas se rétablir dans le sud-ouest de la France.

L'affaire est donc transportée à Vic-Fezensac, rue Rougeon. D'artisanale, elle va vite prendre une autre dimension.

Si la recette est conservée dans son intégralité, on révolutionnera le mode de distribution.

La moutarde sera mise dans des pots en verre et livrée dans les épiceries et charcuteries dans des cartons de 24 pots.

"Alors oui, Amélie, ton repas était parfait mais tu as oublié la moutarde de Bezolles pour accompagner la sanquette...

C'est peut-être l'émotion d'avoir perdu ton cochon... ! »

Pierre DUPOUY 

Photo : Pierre Delinière 

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