Vendredi 22 septembre, la salle du réfectoire de l'EHPAD de Vic-Fezensac était remplie, par les résidents bien entendu mais aussi par les membres des familles que chaque résident avait invités.
C'était le traditionnel repas des familles.
Le repas débuta par l'apéritif, du floc bien entendu!
Puis place au potage confectionné, comme le précise le personnel, uniquement avec des légumes cultivés dans le jardin de l'hôpital et des aromates du jardin aussi.
On enchaîne avec la salade de tomates - du jardin également - avant de passer au plat de résistance, des saucisses et merguez grillées de main de maître à la plancha par le maître grilladin, Paul.
On mange en silence au début puis les langues se délient.
« Ah tiens, je vois Margot là-bas !
Quand je te vois Margot, dit Joséphine qui l'interpelle, j'ai encore en bouche le goût des civets et des daubes que tu nous faisais pour le banquet du hameau.
On n'avait pas attendu le président de la république pour nous dire d'organiser les banquets de quartier ! On les faisait quand on le décidait.
- C'est vrai ! Nous avions dans notre entourage trois bons chasseurs qui tuaient du gibier avec lesquels je faisais de bons civets.
Tiens, Il y a Laetitia aussi !
Laetitia tu te souviens quand tu habitais à Roques ?
Nous étions venues te voir pour que tu nous enseignes la technique du pastis gason !
- Ah oui, j'avais une sacrée main! Je la tirais cette pâte jusqu'à ce qu'elle soit aussi fine qu'une feuille de papier à cigarette !
Quand je la mettais sur le four à bois, mon pastis cuisait parfaitement !
Le four à bois, on n'en trouve plus aujourd'hui ! Vous vous rappelez ?
- Oui, bien entendu, c'était un plat en métal sur 4 pieds. Dessous, on mettait la braise et on recouvrait le plat d’un couvercle qui recevait aussi de la braise, ce qui permettait de cuire le pastis de manière parfaite.
Quand on soulevait le couvercle, les odeurs des pommes qui avaient trempé dans de l'armagnac toute la nuit faisaient déjà saliver !
- Moi, j'ai bien essayé de faire comme toi mais mes doigts passaient au travers !
- Vous avez des nouvelles d'Henri ? dit un autre convive.
- Il paraît qu'il est parti au Canada pour faire du bois. Espérons qu'il en fera plus qu'ici car il n'était pas très rapide !
- Mais non, Henri, il est complètement paralysé ! Il est tombé de cheval.
Tous les matins, il montait sur une chaise pour grimper sur sa jument et faire un petit tour de prairie.
Il a eu une attaque. Il est à l'hôpital et n'est pas très en forme.
- Et cette famille qui venait du Nord et qui avait acheté presque tout le coin, au moins 50 hectares ?
- Je ne sais pas ce qu'ils sont devenus. Je ne les fréquentais pas trop, c'était des étrangers !
- Moi je suis l'invité d'Amédée mais qu'est-ce qu'il a changé ! Il a le nez dans l'assiette, il ne me répond pas.
Je vais essayer de lui rappeler un souvenir de rugby quand on jouait à Vic-Fezensac, en réserve bien sûr. C'était pour nous une façon de sortir de chez nous et de faire un peu la fête lors de la 3e mi-temps.
Tu te rappelles Amédée quand nous étions assis dans les vestiaires en train de nous habiller et qu'arrivait Dumont, un supporter, une boîte de morceaux de sucre à la main et une fiole d'armagnac. Il distribuait à chaque joueur un sucre imbibé en disant « Et les gars, ça c'est du dopage, ce soir, c'est une victoire ! »
Le "dopage" n'avait pas toujours l'effet escompté mais on faisait quand même la fête même sans victoire !"
Au moment du clafoutis, excellent d'ailleurs, la boîte à souvenirs se referme.
Après un bon repas comme celui-là, à un certain âge, la sieste s'impose et on regagne sa chambre.
On peut remercier l'ensemble du personnel pour le bon repas offert à tous mais surtout pour ce moment de retrouvailles si précieux.
Pierre DUPOUY