Cette année encore, le feu de la Saint Jean n'aura pas eu lieu à Vic-Fezensac. Comme l'an passé, la météo capricieuse a empêché le déroulement de cette manifestation traditionnelle.
"Revenons sur nos pas"...
Le feu de la Saint Jean était autrefois une coutume très appréciée.
Aujourd'hui, cette tradition a presque disparu pour une raison bien simple, par manque de" carburant" parce qu'il n'y a plus de haies, il n'y a plus de broussailles, les bulldozers ont tout enlevé... Il ne reste plus grand-chose pour faire des feux.
Les feux ont disparu, surtout ceux que l'on faisait sur la colline face à la vallée de l'Osse.
Il y avait là des spécialistes des feux ! On organisait en effet des concours du plus grand feu, du plus haut, du plus épais, de celui qui brûlait le plus longtemps possible.
Au lieu dit Pichet, une colline se prêtait bien au spectacle.
Tout au long de l'année, le propriétaire y portait sa broussaille, le tas grandissait et il disait : « Cette année, je pense que j'aurai le plus beau feu de la vallée ! »
On allumait le feu au cours d'un cérémonial. C'était souvent le plus âgé du quartier avec le briquet à pétrole qui allait allumer les broussailles en bordure.
Et le feu prenait... C'était magnifique avec des flammes de toutes les couleurs qui changeaient selon le bois utilisé.
Le feu de la Saint Jean était l'occasion d'une manifestation festive.
Les gens se rassemblaient autour du feu, on regardait les flammes mais on dansait aussi.
A Pichet, il y avait le guitariste qui, lorsque les flammes s'élançaient, sortait sa chaise et sa guitare.
Dans ce quartier, les jeunes venaient plus qu'ailleurs peut-être car ils dansaient.
Il y avait la musique mais aussi lou barricot de vin blanc muni du brouquet sous lequel on mettait le verre.
On ne le remplissait pas complètement car on y rajoutait de la limonade pour faire du blanc limé, l'apéritif de l'époque.
Le boulanger avait réalisé un immense gâteau que l'on découpait en tranches et que l'on dégustait avec le vin blanc.
Nous les enfants, nous n'avions droit qu'à la limonade.
On avait installé des bancs autour du feu sur lesquels s'installaient les dames.
Les messieurs se regroupaient autour du barricot et échangeaient souvent au sujet des plantes à ramasser à cette période.
En effet, autrefois, à la campagne, la pharmacopée était surtout une collection de plantes sauvages récoltées précisément dans la nuit du 23 au 24 juin avant le lever du soleil comme l'expliquait à ses amis l'écolo de l'époque, Petiton, qui connaissait par coeur toutes les plantes et leurs vertus.
Lui les ramassait à la période voulue et les accrochait au plafond de sa cuisine
Il expliquait que le jour de la Saint-Jean, il semait les haricots et les petits pois mais toujours du Nord au Sud, autrement, les légumes ne poussaient pas !
Quand le feu commençait à s'éteindre, les jeunes essayaient de sauter par-dessus car un proverbe disait que si l'on réussissait, on se marierait dans l'année !
On attendait aussi que les braises se fassent pour faire cuire dessus de la saucisse, du lard du cochon tué dans l'année avec le pain tendre que le boulanger amenait tout chaud dans sa voiture avec le gâteau.
Le lendemain matin, ma grand-mère avec un seau ramassait les cendres du feu de la Saint Jean car, disait-elle, ces cendres réparties autour de la maison empêchaient la foudre de tomber, ce qui faisait beaucoup rire mon grand-père.
Elle, elle y croyait dur comme fer et quand l'orage menaçait, on la voyait sortir avec son seau de cendres de la Saint-Jean et la répandre autour de la maison, près de l'étable, au pied d'un arbre...
Pierre DUPOUY