Certains Écolos veulent-ils la mort de l’agriculture du Sud-Ouest ?

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L’interdiction d’irriguer menace et l’incompréhension règne

Dans le Gers, les Landes, les Pyrénées-Atlantiques et les Hautes-Pyrénées, l’incompréhension règne parmi les quelque 4 500 exploitations agricoles concernées par la décision du Tribunal administratif de Pau du 3 février 2021.

Cette décision annule, en effet, l’arrêté inter-préfectoral selon lequel l’État donne pour 5 ans, en 2017, au syndicat mixte Irrigadour une Autorisation unique pluriannuelle (AUP) grâce à laquelle il gère les prélèvements d’eau pour 145 000 ha de terres agricoles des quatre départements. L’arrêté a été attaqué par des associations écologistes (1).

   Le lac Saint-Jean à Saint-Pierre-d'Aubézies est un lac-réservoir

La décision du tribunal commence par un plafonnement des prélèvements jusqu’au 31 mai 2022, selon les moyennes des années précédentes pour chacun des 11 000 points de prélèvement. Michel Chanut, agriculteur exploitant et président du Syndicat de rivière Midour-Douze, nous explique que les volumes prélevés ont été inférieurs à ce qui était prévu, si bien que ce plafonnement représenterait en réalité une perte de 30 à 50 %. En effet, selon Lilian Lasserre (1), cette décision « ne fait pas le différentiel entre le prélevé et le prélevable alors que c’est tout simplement liée aux conditions météorologiques et à la pluie ». Il ajoute : paradoxalement, «  nous sommes attaqués pour notre bonne conduite en matière environnementale puisque, répétons-le, nous n’avons pas consommé l’entière disponibilité en eau.

  Michel Chanut,président du Syndicat Midour-Douze

Conséquences de la suppression de l’irrigation

Michel Chanut est très clair : sans irrigation, il ne peut pas y avoir ni cultures de printemps (maïs, soja, tournesol, sorgho), cultures maraîchères, bio ou non. De plus, depuis 2 ans les pluies et la sécheresse ont causé des dégâts aux cultures d’hiver (colza, blé, orge, avoine, triticale (hybride blé-seigle).

Quelques chiffres

Selon Michel Chanut, qui cultive 100 ha, dont 50 ont besoin d’être irrigués, 1 ha nécessite, en moyenne, 1 800 m³ d’eau. Pour chaque exploitation, le débit est fixé par une commission. Il y a des sondes de débit, par exemple, pour le Midour, elle est à Laujuzan. 1 litre/seconde correspond à 2 400 m³. Depuis 10 ans, il y a une baisse de 30 % environ du volume d’eau disponible dans les lacs-réservoirs. Des travaux sont envisagés pour les rehausser et renforcer leur capacité d’irrigation et les protéger contre les crues.

    Bassin versant du Midour (document Institution Adour)

Mais, alors qu’ils devaient surmonter une crue centennale (la plus forte crue du siècle), il faudrait qu’ils résistent à une crue millénale ! Des travaux qui seraient financés par les départements (les agriculteurs paient la gestion des installations).

     Projet de territoire Midour (document Institution Adour)  

Et après le 31 mai 2022 ?

Lilian Lasserre dit encore : « Malgré les efforts constants en matière de bonnes pratiques agricoles, les agriculteurs sont harcelés, attaqués sur l’existence même de leur métier, avec des méthodes trop souvent illégales. Ces structures associatives dénigrent le travail des agriculteurs mais ne proposent rien en retour ; pourtant le prochain défis climatique et environnemental sera celui de l’eau et de sa sauvegarde. Ils n’ont pas de solutions alternatives aux nôtres. Nous avons besoin de l’eau pour travailler et nourrir les Français ! Les syndicats agricoles sont une nouvelle fois obligés de se justifier ».

     Station de Fustérouau

Un dialogue de sourds

Voici l’argumentation de France Nature Environnement 65 (FNE 65) (2) :

« FNE Midi-Pyrénées, FNE 65, Les Amis de la Terre 32 et la SEPANSO 40 ont gagné leur recours devant le tribunal administratif de PAU pour deux raisons : 

  • d’une part, la violation du schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) Adour Garonne et notamment ses objectifs de non détérioration et d’atteinte du bon état des eaux exigés par le droit de l’Union européenne ; 

  • et d’autre part, la méconnaissance du principe de gestion équilibrée de la ressource en eau compte tenu de l’aggravation du déficit provoqué par cette autorisation 

Malgré ces forts enjeux, la justice a fait preuve de clémence en laissant le temps à Irrigadour de régulariser la situation sans compromettre la viabilité économique du secteur. » 

      Station de Fromentas

Voici ce que répond Michel Chanut :

  • « d’une part, quand l’eau devient rare, les polluants sont en plus forte concentration,

  • d’autre part, les agriculteurs ont prélevé beaucoup moins d’eau qu’ils n’auraient dû selon l’autorisation ».

Et à l’avenir ?

Le 17 février, Irrigadour a décidé de faire appel de cette décision de justice et de déposer un référé sursis à exécution. Cette dernière démarche devrait accélérer le traitement dudit appel.

De plus, c’est l’État qui est attaqué au travers de l’arrêté inter-préfectoral : le préfet des Landes a demandé au ministère compétent, celui de la Transition écologique, de faire appel.

La manifestation du 30 mars 2021

Le 30 mars 2021, à l’appel des Jeunes agriculteurs, des FDSEA et de l’Association de gestion de l’irrigation landaise (Agil), des associations d’irrigants des quatre départements ont manifesté à Mont-de-Marsan. « D’après la police, il y avait 1 600 manifestants et plus de 100 tracteurs.

Christiane Lambert, présidente de la FNSEA a déclaré notamment : « Défendre l’eau, c’est défendre la vie des agriculteurs et les nombreux emplois ainsi que les productions à valeur ajoutée, les traditions gastronomiques ».

De nombreuses pancartes très explicites émaillaient la manifestation :

  • « Pas d’eau, pas de paysans »

  • « Pas d’eau = importations massives »

  • « Nous ne voulons pas d’un désert »

  • « FNE plus toxique que le glyphosate »

  • « Marre que nos imp-eaux financent ces sal-eaux de la Sepans-eau ».

Affaire à suivre…

(1) Sepanso 40 – France Nature Environnement 65 – France Nature Environnement Midi-Pyrénées – Amis de la Terre 32. (2) Ex-président des Jeunes agriculteurs des Hautes Pyrénées, vice-président de la Chambre d’Agriculture des Hautes Pyrénées et membre de la Compagnie d’aménagement des coteaux de l’Adour (d’après La Semaine des Hautes Pyrénées).(2) Site (https://www.fne-midipyrenees.fr/).

N.B. - Sur la photo du haut de page : banderole en place à Aignan.

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