Journalisme : vocation ingrate, métier dangereux

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« Personne n’aime le porteur de mauvaises nouvelles » Antigone, Sophocle.

W. E. Gutman

Le journalisme est le premier brouillon de l’histoire. Tandis que les révisionnistes, s’affairent à banaliser la vérité, à la falsifier, à l’ensevelir, à calomnier ceux qui la poursuivent, à les museler et, in extremis, à les supprimer, les journalistes captent les images, les sons, les odeurs impérissables du drame humain.

On nous reproche de dire des vérités inconvenantes, de chercher la bête noire, de ridiculiser les canailles haut-placées, de lamenter les guerres illicites, immorales, et ingagnables. On médit notre culot, on nous accuse parfois même de trahison. Nos divulgations, gênantes, souvent compromettantes, toujours inopportunes, sont méthodiquement anathématisées par ceux qu’elles prennent pour cible. Nous sommes les pourvoyeurs de « fake news, » les « ennemis du peuple. » 

Quand nos exposés sont effrontés ou affolants, on nous accuse de donner au public des palpitations. Nous sommes les boucs émissaires du dévergondage répandu que la « société, » afin de l’endurer, préfère oublier. Tout ce que nous rapportons sera calomnié.

Dotés d’une saine curiosité et de souplesse intellectuelle, un grand nombre de lecteurs nous accompagnent. C’est à eux que nous consacrons nos rubriques. D’autres, impatients, distraits, parfois malveillants, scrutent et dissèquent nos écrits comme s’ils recelaient un message codé subversif. Certains prônent même la censure. Ils exhortent la presse à regarder ailleurs. Ils sont tellement ébranlés par la vérité qu’ils veulent l’abroger, la gommer, l’incinérer. L’histoire regorge d’autodafés dont les crieurs publics sont les premières victimes.

Cela peut expliquer pourquoi certains médias, pour survivre, se détournent des questions pesantes du jour et se penchent soit sur les faits divers sordides dont le public est assoiffé, ou sur les banalités quotidiennes qui nous éloignent de la réalité. Le « politiquement correct » (le sacrifice de la vérité sur l’autel de l’hypocrisie) apaise les lecteurs et soulage les publicitaires qui ne se soucient que de leurs revenus.

Nous ne sommes pas payés pour résoudre les maux que nous montrons du doigt. Notre mission est de chercher, découvrir et diffuser. La vulgarisation de faits incontestables n’est pas un acte de trahison. Critiquer n’est pas antipatriotique. C’est le droit et le devoir de tout citoyen. Une presse libre et indépendante est l’armature de la démocratie. Le vrai traitre est le silence. Se taire, c’est devenir complice.

W. E. Gutman est un journaliste indépendant franco-américain. Il vit en Floride.

Illustration Pixabay.com

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