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La semaine dernière, nous avions échangé avec Patricia, animatrice au Château Fleuri, au sujet de la reprise des visites.
Elle nous avait confié que les résidents préparaient un numéro spécial confinement de leur journal interne, "L'écho du Château"
Elle nous a adressé en "avant première" un article extrait de cette édition spéciale qui paraîtra probablement fin de semaine prochaine.
Merci à Patricia, à Madame Danièle Mothe, résidente et présidente du Conseil de Vie Sociale du Château Fleuri et à tous les résidents de nous faire partager, à travers ces textes, le ressenti des résidents en Ehpad, confinés depuis le 16 mars...
Et tout s’est arrêté... Et après…
Ce monde lancé comme un bolide dans sa course folle, ce monde dont nous savions qu'il courait à sa perte mais dont personne ne retrouvait le bouton "Arrêt d'urgence".
Cette gigantesque machine a soudainement été stoppée net.
À cause d'une toute petite bête, un tout petit parasite invisible à l'œil nu, un petit virus de rien du tout....
Quelle ironie ! Et nous voilà contraints à ne plus bouger et à ne rien faire.
Mais que va-t-il se passer après lorsque le monde va reprendre sa marche, après lorsque la vilaine bête aura été vaincue ?
À quoi ressemblera notre vie après ?
Qu'en pensez- vous ? Je vous invite à y réfléchir. Vos pensées et vos opinions sont importantes pour nous tous.
Merci et courage à vous tous.
Un grand merci à tout le personnel pour son courage et son dévouement.
Claudine Antoniolli, Bénévole
Apprendre, comprendre et accepter ce qui est !
Qu’ai-je appris individuellement de la situation du fait du confinement intégral, imposé par le Gouvernement et l’Agence Régionale de la Santé, suite au Coronavirus mondial, aujourd’hui si dévastateur ?
On n’en connait pas les causes, ni le traitement, à ce jour.
Moi, résidente en maison de retraite, au Château Fleuri depuis un an, avec suppression des sorties à l’extérieur, suspension des visites familiales et autres, des interventions des paramédicaux, des intervenants extérieurs et des bénévoles à dater du 16 mars 2020.
Puis, ajout de confinement « intégral » en chambre à compter du 30 mars 2020, avec port des repas, en solitaire, chez soi ; nous conservons le droit de nous promener dans le parc-jardin, comme avant, mais en solitaire aussi, pour éviter la contagion fulgurante planétaire.
J’ai appris à faire face au choc : sidération, déprime, vite des numéros de téléphone des copines pour pouvoir communiquer sans contact physique !
Apprécier la possibilité d’organiser mes journées, faire des projets avec l’animatrice et la Direction pour prendre le relais gym (suite au courrier d’encouragement de la prof, Marie-Pierre), répondre aux lettres de tendresse des enfants, aux messages de Franck, animateur mémoire RED, du président Pierre Antonello, qui nous aident à sortir un peu d’un sentiment d’être abandonnés.
Explorer un ressenti de vie en solitaire, sens de la solitude en collectivité, du temps disponible, du besoin de lien à soi et à l’autre, de la crainte de l’intrusion du Covid 19, alors que le personnel s’ingénie à nous préserver par le port du masque en continu, ce dont nous leur sommes reconnaissants.
La peur de la mort éventuelle, la peur de l’inconnu. Le besoin d’en parler, d’échanger, de se libérer avec l’aide et l’appui d’un psychothérapeute. Ces derniers ont établi la proposition de thérapie par téléphone, eux-mêmes confinés chez eux. La prise de conscience que ces préoccupations sont communes au personnel de l’établissement, à la société entière, confinée.
Alors, aujourd’hui, le 10 avril 2020, comment envisager l’après Coronavirus pour nous, en maison de retraite, en Ehpad ?
À entr’apercevoir l’étendue de la tâche de l’animatrice, Patricia, en cette période inédite de confinement, nous avons découvert la chance de pouvoir compter sur les talents des uns ou des autres, résidents, bénévoles, personnels pour apporter leur soutien à l’animation au quotidien.
Aussi, nous avons pris conscience de la nécessité, en fonctionnement « normal », de bénéficier de la présence des bénévoles, des intervenants extérieurs dont nous sommes privés aujourd’hui et de l’opportunité de décloisonner un peu les différents services complémentaires. Ils nous témoignent leur affection épistolaire, en attendant. Merci à eux !
Danièle Mothe, Résidente
Besoin d’en parler…
Lundi 27 avril 2020
Après un week-end, toujours ressenti avec un sentiment de solitude, d’abandon en Ehpad, aggravé par les informations catastrophiques journalières du Covid 19, depuis le 16 mars 2020, j’ai craqué, pleuré.
C’est à devenir fou en confinement, isolé dans notre chambre avec des « entrants » pour nous apporter « le repas biste heit », pour ne pas avoir le temps de nous contaminer.
Moral à zéro… Faudrait-il que nous soyons coupables de perdre la parole, puisque condamnés au silence de l’isolement en chambre qui touche tant à notre vulnérabilité ? Moral en berne quoi ?
Depuis le « faire part » à mes « auditeurs » administratifs-soignants, nous avons pris conscience des dégâts dus plus au confinement qu’au Coronavirus, à résoudre. À bons entendeurs !
Mardi 28 avril 2020 : jardin d’amour bienveillant
Chaque jour, quand le temps le permet, je pars rencontrer la nature, lors de ma marche de santé en « solitaire » dans le parc-jardin, comme le permet actuellement encore le confinement.
De bon matin, trois barres parallèles où des résidentes m’adressent la parole de leur premier étage, heureuses de pouvoir converser un peu. Ouf ! le bonheur de sortir de notre mutisme, imposé par le coronavirus.
Et oui ! « à la chambre ».
J’arpente les lieux le long des haies en plein champ ; besoin de coller au sol, dans la rosée même avec mes « esclops » de marche. Marcher, voir s’éclore, chaque jour, des nouvelles branches.
Hier, les cerisiers, aujourd’hui les grappes de fleurs d’acacias. Voir les arbres se couvrir de feuilles nouvelles ployées sous le vent et écouter le chant des oiseaux dans le buisson sauvage.
Ces derniers temps, l’après-midi, des cohortes espacées de résidents en chaise roulante ou accompagnés « au bras » par les personnels découvrent la merveille des lieux printaniers et le charme d’aller dehors avec l’envie d’y revenir, dorénavant. Sortir, aller à la rencontre de soi et des autres, sortir de notre confinement.
Danièle Mothe
Photo Patricia Lafon : Madame Danièle Mothe, résidente et présidente du Conseil de Vie Sociale du Château Fleuri