Mais où sont passés les hivers d'antan ?

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Le printemps est là...mais nous n'avons pas eu d'hiver.

Écoutons cet ancien nous parler des hivers d'antan.

Il a sorti son antique chaise d’où se hérissent quelques brins du tressage et s’est installé plein sud, ce papi qui refuse toute photo…

« Ils se foutraient de moi… »

Il est coiffé de son béret aux cercles de crasse concentriques qui pourraient, comme sur les troncs des arbres, indiquer ses décennies d’existence, un âge qui varie selon les douleurs de son arthrose.

Il grommelle : « Un soleil aussi piquant en janvier et février…Il n’y a plus de saison… »

Et le voilà parti sur les hivers de « son temps ».

De la glace jusque sur les rivières

« Les nuits étaient glaciales et les mares se couvraient de glace qui s’épaississait toujours plus car les températures basses étaient constantes.

Sur le chemin de l’école, les enfants n’hésitaient pas à faire de longues glissades avec parfois quelques bains forcés dans l’eau glacée et les recommandations des parents et du maître restaient sans effet.

En arrivant à la maison, cette glace, il fallait justement la casser à la mare pour faire boire le bétail.

Dès les premiers froids, les bêtes étaient enfermées à l’étable, toute lucarne obstruée par de la paille pour maintenir une bonne température et, comme on n’avait pas d’abreuvoir automatique, les bêtes étaient conduites en petits groupes de 2 ou 4 à la mare.

La neige restait plusieurs jours sauf si elle tombait en février où un proverbe disait « neou de héourè la poulo se l’emporto au pè » (« Neige de février, la poule se l’emporte au pied »)

On construisait des luges avec des douves de barrique et on se rendait sur les flancs des collines. Les descentes étaient bien agréables mais dures étaient les remontées avec l’engin très lourd sur le dos.

Période de « chasse »

Les adultes profitaient de cette période-là pour capturer du gibier et notamment traquer le renard en suivant ses traces ; on le débusquait en détruisant son terrier à la pioche.

Par ces nuits glaciales, on « paratait » (le parat est le nom gascon du moineau )

On tendait de grands filets sur les meules de foin ou de paille où s’étaient réfugiés les oiseaux pour la nuit, quelques coups de bâton et ils se prenaient dans les mailles, un mets de choix pour le lendemain.

Les vacances agricoles

Cette période d’hiver était un temps de vacances pour l’agriculteur qui vivait au rythme du soleil, ce qui changeait les horaires des repas.

Après le verre de café du matin – où la chicorée était en plus grande quantité que les quelques grains de café moulu - on prenait un solide repas avec soupe à 9 heures solaires ; on « goûtait » à 14 heures, pâté, saucisson, pommes et raisins qu’on avait conservés attachés sur une barre de bois à la grange.

A 17 heures, la nuit tombait et tout le monde regagnait la cuisine, la seule pièce chauffée par le feu dans l’immense cheminée.

On allumait le plus tard possible la grosse lampe à pétrole ou la lampe à carbure : les blocs de carbure recevant de l’eau dégageaient du gaz acétylène qu’on enflammait au bout d’un bec.

On se hâtait d’avaler le repas du soir pour s’installer à une bonne place devant le feu où déjà, les pattes dans les cendres, les chiens de la maisonnée s’étaient installés.

La corvée des chemins

C’était la période où on assurait aussi les prestations, c’est-à-dire l’entretien des chemins sur une longueur déterminée par la commune en fonction de la superficie des terres. On commençait par débroussailler pour faire un grand feu et, un sac de paille sous les fesses, on cassait les grosses pierres calcaires qui ensuite seraient étalées pour améliorer le chemin blanc.

On se réchauffait aussi en coupant des haies. J’avais pris des haies à arracher, nous dit le papi, simplement pour avoir du bois pour me chauffer.

Le despouilladé (dépouiller le maïs ) et le tue cochon étaient des manifestations qui agrémentaient cette période hivernale et comme le travail n’attendait pas le lendemain matin, on pouvait veiller fort tard en jouant aux cartes, souvent au jeu de la bourre où on engageait quelques piécettes. »

Le soleil commence à décliner, le papi rentre sa chaise, tire en pointe sur son béret et nous donne son programme de la soirée : « Les c…… de la télé… »

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