Une belle diablerie !

liberté égalité Fraternité.jpg

Chronique d'une citoyenne désabusée: moi.


La politique, on nous en parle sans cesse. À la télévision, dans les journaux, sur les réseaux sociaux, on en bouffe à toute heure, comme une sorte de nourriture industrielle qui n’aurait plus de saveur.

D’un côté, les partis se livrent une guerre sans merci pour capter nos voix, de l’autre, nous, citoyens, nous regardons tout ça, incrédules, dans une posture entre la résignation et le désenchantement. Car oui, la politique, souvent, c’est une belle diablerie. Un spectacle, une illusion, où la vérité semble avoir disparu sous des couches de promesses creuses et de discours formatés. Et lorsque l'on gratte un peu, on découvre que derrière les beaux mots se cache un monde où la manipulation, l’escroquerie et la perversité règnent en maîtres. Comment faire face à tout cela ? Comment s'y retrouver quand chaque promesse semble être une farce, chaque geste un calcul, chaque leader une marionnette tirée par des fils invisibles mais puissants ? Peut-on vraiment naviguer entre les gouttes sans se faire piéger par ces bonimenteurs de tout bord ?

La politique est un théâtre de l'absurde, depuis la nuit des temps. La politique moderne, si l’on y réfléchit, ressemble à une grande scène de théâtre, un lieu où l’on joue un rôle. Il suffit de voir l’apparente aisance avec laquelle les leaders politiques jonglent avec les faits, réécrivent l’Histoire, et transforment leurs erreurs en « malentendus » ou en « fautes de communication ». Le politicien d’aujourd’hui ne vend plus une vision de société ; il vend une image de lui-même. C’est le culte du « blabla», l’art de se réinventer, de se donner des airs d’homme ou de femme providentiel, capable de sauver la nation, tout en restant intouchable et implacable.

Derrière cette façade, on comprend vite qu’il y a bien peu de sincérité. Les débats deviennent des batailles d’ego, les enjeux réels sont souvent relégués au second plan au profit de la gestion de l’image. Le message se déforme, devient flou, et l’important n’est plus de gouverner pour le bien commun, mais de durer, de conserver le pouvoir.

Ne pas se laisser piéger : une question de discernement.

Comment, dans ce marécage, éviter de se faire avoir ? D’abord, il y a cette règle essentielle : l’esprit critique. Cela paraît évident, et pourtant, peu de gens l’appliquent de manière systématique. Chaque discours, chaque interview, chaque campagne est une construction. Ce que l’on te dit n’est pas toujours ce qui se cache derrière.

Les promesses électorales sont souvent comme des ballons gonflés d’air, bien gonflés pour l’occasion, mais qui finiront par éclater dès qu’ils seront soumis à l’épreuve de la réalité. La politique, c’est aussi un jeu de pouvoir où les mots sont des armes. Les chiffres, les faits, les résultats ? Souvent absents ou tordus. La clé est donc de toujours questionner : « Qui parle ? Pourquoi ? Quels sont ses intérêts ? » L’objectivité n’existe pas en politique, elle est toujours teintée par des aspirations personnelles et des relations de pouvoir. Dès lors, il devient primordial de diversifier ses sources d’information. Le plus grand des pièges c'est de picorer, choisir uniquement ce qui va dans le sens de notre propre opinion. Se laisser enfermer dans une seule perspective, qu’elle soit de gauche, de droite ou autre, c’est se condamner à n’entendre qu’une partie de l’histoire. À force, on finit par ne plus comprendre les enjeux réels, mais à se perdre dans des débats futiles ou des oppositions stériles. La politique est un monde en perpétuelle évolution. Une chose est sûre : il est difficile de rester neutre et de ne pas se laisser emporter par l’émotion ou par les apparences. Mais une chose est encore plus importante : ne jamais perdre son sens critique et sa capacité à réfléchir par soi-même.

L’intégrité est la seule forme de résistance.

Face à cette machine politique qui semble broyer tout ce qu’elle touche, où se trouve le salut ? Peut-être est-ce là la véritable question : comment, malgré tout, rester intègre et ne pas se laisser gagner par la tentation des compromis, des petites corruptions, des trahisons nécessaires à la "survie" politique ? Le cynisme semble parfois la seule attitude rationnelle à adopter, mais il n’y a rien de plus destructeur que le cynisme dans le long terme. Il éteint tout idéal, toute possibilité de changer les choses. En réalité, l’intégrité est le seul bouclier que l’on ait contre cette dérive. Cela ne signifie pas rester naïf, mais bien de refuser de se laisser emporter par les tentations du pouvoir et de l’opportunisme. Il existe des formes d’engagement qui ne nécessitent pas de se salir les mains. L’action citoyenne, les associations locales, les initiatives de terrain – voilà des moyens d’agir autrement, loin des grands discours et des faux-semblants des partis politiques. Et c’est là, peut-être, que réside la véritable politique : dans le concret, dans la transformation des choses à petite échelle.

Malgré le cynisme ambiant, malgré les déceptions et les trahisons, il reste une lueur d’espoir. La politique est, certes, une "diablerie" en de nombreux aspects, mais elle reste, en fin de compte, l’affaire des citoyens. Et nous, citoyens, devons choisir entre le renoncement et l’engagement. Naviguer entre les gouttes, certes, mais ne jamais oublier que si la politique est un théâtre de l'absurde, il est possible de jouer le rôle de l'individu qui, malgré tout, cherche à garder sa liberté et son intégrité.

Au fond, le plus grand piège serait de se laisser convaincre qu’il n'y a plus d’espoir et que tout est joué. Tant qu’il y a des gens prêts à se lever et à dire "non" à la manipulation, il y a toujours une chance de voir un autre type de politique émerger. Mais cela dépend de nous, pas des bonimenteurs.

Isabelle Gaignier 2025

Photo : Urne utilisée en 1848, entreposée au musée historique de Haguenau.

Illustration Isabelle Gaignier

Publicité