Sauver La France

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Par Dr Maxime MAURY

Dr Maxime MAURY, Officier des Palmes académiques, Président de VIGIE Éco et Ancien directeur régional de la Banque de France. 

« Le triomphe des démagogues est passager, leurs ruines sont éternelles. » ( Charles PÉGUY)

 

Vous avez échappé à un premier projet de chronique dont le titre était :

«  Chronique d’une faillite annoncée ».

J’y ai renoncé par souci de décence. Et par passion de l’espoir.

J’essaie d’exprimer ce que devraient être les objectifs d’un gouvernement « d’Union nationale », ou d’un « gouvernement sacrificiel » pour reprendre l’expression de Jacques ATTALI. Il impliquerait nécessairement une coopération entre les partis politiques pour prévenir la catastrophe d’une faillite annoncée. Il impliquerait de sortir enfin des postures et du mensonge qui sont devenus la base de la politique.

 

I) Les faits sont implacables : une Assemblée Nationale ingouvernable, une dette publique insoutenable.

Il faut garder en tête quelques chiffres politiques et économiques :

1) Politiques :

  • 142 députés d’extrême-droite ;
  • 193 députes de gauche sous influence de l’extrême-gauche, mais avec une émergence sociale-démocrate aux européennes ;
  • 234 députés du centre et de la droite modérée mais non fédérés ; soit vingt de moins que sous les gouvernements précédents ;

 

Ne permettent pas d’atteindre la majorité de 289 sièges !

En outre, des coalitions des trois blocs pris deux par deux peuvent renverser tout gouvernement de majorité relative. Et entraîner une instabilité permanente.

Le groupe des 234 députés ( centre-droit) est en théorie le plus nombreux mais difficile à fédérer car le groupe LIOT est instable ( cf son opposition à la réforme des retraites) ; en outre, les 47 députés LR ne veulent pas participer à une coalition (ni augmenter les impôts) et les macronistes sont eux-mêmes divisés.

Le président est isolé, mais il détient constitutionnellement les clés de la continuité de l’État.

En réalité , tout le monde ne pense qu’à l’élection présidentielle de 2027 alors que la crise de la dette est juste devant nous (2025-2027).

2) Économiques :

La France va emprunter cette année 9000 euros par seconde ( soit 285 milliards, pour combler une impasse budgétaire représentant au moins 1/3 des recettes , payer les intérêts et renouveler les titres de dettes échus).

L’équation de soutenabilité de la dette suppose de revenir à un équilibre primaire (avant paiement des intérêts) ; elle impliquerait une économie ( ou des recettes) supplémentaires de 98 milliards d’ici à 2027.

C’est notre feuille de route européenne qui nous impose une marche très haute de 30-40 milliards par an.

Cela nécessiterait qu’un gouvernement

« d’Union Nationale » prenne des mesures de compromis remettant à plat toute l’organisation de la France.

Nous les esquissons à grands traits :

II) Les mesures à prendre pour sauver la France ne sont ni de droite ni de gauche , elles s’imposent à la raison à partir des faits documentés et exigent des synthèses intelligentes :

II)1) Le tiers des dépenses de l’État sont des dépenses de fonctionnement dans un pays qui est le plus centralisé du monde. Il s’en suit que pour l’éducation et la santé nos ratios coûts de fonctionnement / services opérationnels sont plus élevés que dans les autres pays européens.

Le « mille-feuilles » administratif et ses doubles emplois (à cinq couches), le nombre anormalement élevé des élus (cf le dossier jamais abouti du Conseiller territorial) qui fait de nous le seul pays au monde ayant un élu pour 100 habitants contribuent à ces surcoûts anormaux.

L’autonomie des établissements publics est inexistante ou faible et les usagers ne sont associés à rien.

La solution passe donc par un grand plan de décentralisation soumis au référendum pour remettre à plat toutes nos dépenses en partageant les recettes entre les différents échelons territoriaux.

La bonne méthode serait de confier à un groupe de personnalités engagées dans ce sens le soin de préparer un projet référendaire. Le président devrait se tenir en retrait et se contenter de mandater quatre personnalités prônant la décentralisation :

  • Gérard Larcher , président du Sénat ;
  • David Lisnard , président des Maires de France ;
  • Éric Woerth , député ;
  • Carole Delga , présidente des régions de France.

Si le président reste à distance, le référendum sera gagné car 55 % des Français font confiance aux collectivités territoriales. L’ensemble de notre gouvernance en sera transformée. Et une voie de diminution des dépenses s’ouvrira.

II)2) Le pouvoir d’achat, présenté comme préoccupation majeure, ne peut progresser que par la multiplication des emplois et une meilleure association des salariés au partage des profits. Il conviendra de dire enfin la vérité : le pouvoir d’achat n’a pas baissé en France depuis 2017 ( selon l’INSEE, il aurait même progressé de 7 % environ). L’augmentation massive du SMIC détruirait des centaines de milliers d’emplois comme démontré par Gilbert CETTE et Pierre CAHUC.

C’est dans l’extension de l’intéressement , de la participation et de la loi Travail ( prime « Macron ») qu’il faut rechercher plus de pouvoir d’achat. Ainsi que dans la diminution des charges sociales qui exige de remettre à plat certaines prestations. La France doit travailler plus comme l’indique un rapport récent de l’OCDE.

II)3) L’examen d’un impôt sur le patrimoine renforcé semble inévitable. Il était préconisé dans le rapport du macroniste Jean PISANI-FERRY qui recoupe indirectement les conclusions de Thomas PICKETTY. En effet, les inégalités de patrimoines ont atteint le niveau le plus élevé depuis 1910 ( source : Conseil d’Analyse Économique ).

II)4) Il existe également un consensus gauche-droite pour taxer le rachat de leurs propres actions par les entreprises, ainsi que les distributions de superdividendes. Ce devrait être un projet européen mais on peut l’initier en France.

II)5) Il convient d’expliquer plus que jamais aux Français que leurs retraites doivent être financées. Outre que le régime général est à nouveau déficitaire , celles des fonctionnaires génère un déséquilibre de 56 milliards selon la Cour des comptes.

Ainsi la seule alternative à la Loi Borne serait la retraite à points qui imposerait de redessiner toute la carrière des fonctionnaires. Énorme chantier. Une alternative est de lancer des fonds de pension. D’énormes pressions s’exercent pour désindexer les retraites, il faut y résister.

II)6) Enfin, des mesures lisibles devront être prises pour maîtriser l’immigration et renforcer la sécurité :

  • Compte tenu de la baisse de sa population active , la France a besoin d’une immigration choisie ;
  • Des quotas d’immigration sont à négocier pays par pays en contrepartie du retour des immigrés délinquants ;
  • Le droit du sol doit s’appliquer plus sélectivement et devenir Français devrait impliquer un serment en Mairie de fidélité aux valeurs de la République ;
  • La délinquance des mineurs doit être plus sévèrement réprimée.

En toute hypothèse , la France n’aura pas de majorité. Il s’agit seulement d’éviter que son gouvernement ne soit renversé. Cela ne pourra se faire que par une politique de compromis qui concilie le redressement de nos finances publiques et la justice sociale.

Si ce n’est pas possible , le président de la République devra prendre ses responsabilités et recourir à l’Article 16 de la Constitution qui lui permettra de gouverner par ordonnances pour :

  • faire face à l’urgence ;
  • assurer la continuité de l’État et des paiements ;
  • tenir nos engagements internationaux.

Avec des mesures appropriées, la France peut reprendre un bon cap en trois mois. Le Parlement pourra se réunir mais il ne votera pas de Lois durant cette brève période. Ce qui d’ailleurs ne changera rien puisqu’il est devenu impuissant.

 

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