La fée, le lutin, la souris

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Un nouveau conte de Noël de François Macé

Pour Noël, François Macé, écrivain et journaliste, (https://lejournaldugers.fr/article/45921-un-ecrivain-parmi-nous)  nous avait offert un conte de Noël Les fées existent-elles encore en 2020 ?

https://lejournaldugers.fr/article/46316-les-fees-existent-elles-encore-en-2020

Il "récidive" aujourd'hui pour notre plus grand plaisir avec un nouveau conte dans lequel nous retrouvons son héros L'Informe à Tics.

Voici le premier chapitre :

L’informatique est une science exacte faite de zéros et de un qui se succèdent en laissant passer l’électricité ou pas. Donc pas de place aux fées et aux lutins, farfadets et autres trolls.

En cette nuit de Noël 2014 en Gascogne dans le Gers, je me suis rendu à la messe de minuit à la cathédrale pour chanter et me recueillir.

De retour dans ma nouvelle maison, deux amis m’attendaient Rocky et Idéfix mes deux chiens.

Je les salue et me dirige vers mon bureau pour regarder mon ordinateur. Depuis de nombreuses années en revenant de la messe je découvre affichées sur l’écran de mon ordinateur des histoires plus étranges les unes que les autres d’année en année.

Je suis convaincu qu’un petit être vit dans mon ordinateur. J’en ai déjà parlé. Je l’ai appelé par dérision ce petit lutin écrivain et tapeur (sur le clavier) l’Informe à Tics. Je l’imagine couvert de boutons avec un drôle de petit bonnet vert en feutre très pointu. Souvent, durant l’année il me joue des tours plus ou moins drôles.

Je me penche et mets en marche mon écran. L’histoire est là ! Elle ne commence pas par « Il était une fois… " Il commence directement...

Je comprends rapidement que le lutin s’adresse à moi. C’est un peu étrange.

Je vais te raconter mon histoire celle que j’ai vécue avant de venir chez toi, ma vie avant de venir dans ton ordinateur.

Le début de l’histoire remonte à un matin, cela fait 26 ans dans une ville lointaine de Russie. Cette ville est située dans le nord, l’hiver, le froid brûle la peau.

Une petite fille est née dans une famille normale, là-bas, comme il y en a tant. C’est l’été. Je crois me souvenir que c’était le mois d’août. Dans cette maison, dans la chambre dédiée à la petite arrivante, j' habitais également. Je portais toujours une chemise à carreaux bleus trop grande et un pantalon beige qui me tombait sur les chaussures qui étaient trop usées.

« Je ne reste que le temps de l’hiver » avait-je promis à la fée qui m’avait trouvé le logement. Le problème est que nous étions en août. Je ne dérangeais pas vraiment du haut de mes 5 cm. La maman replaçait les objets que j’avais déplacés sur la commode. Je suis d’un naturel désordonné. Tous les lutins ne sont pas comme moi. Elle ne comprenait pas vraiment pourquoi il y avait parfois du désordre. Je me faisais petit et me cachais et je redoutais les souris grises qui parfois passaient vivement à proximité de moi. L’une d’elle m’avait même croqué un petit bout de mon bonnet vert en feutrine. J’étais bien dans cette maison. Ceci avancé, je n’avais pas aimé le moment où la famille avait repeint la pièce. Cela avait occasionné trop de chambardement.

Je me suis assis sur le rebord de la commode destinée à recevoir les vêtements de la petite fille. Je penchais ma tête tout en la prenant dans mes mains minuscules, au regard des gants de laine roses, tricotés par la grand-mère.

J’observe en coin le berceau, en bois, vide de tout bébé. Je pensais très fort à la fée.

A ce moment, une lumière vive envahit la pièce. La fée se dessine puis apparaît. Elle est blonde et vêtue de mousseline transparente et tient à la main une baguette magique. Elle s’appuie dessus et m’observe.

La fée me dévisage d’un air désapprobateur :

«Encore là ? , tu ne penses pas que tu exagères ? » .

J’ai marmonné une excuse idiote : « Il fait froid dehors et je m’y ennuie ! " Nous étions en été...

Elle me fait les gros yeux. Ce n’est pas bon lorsque les fées font les gros yeux. Tu te retrouves transformé en lapin ou en souris comme un rien.

« Les gens de cette maison sont très gentils, je voudrais que tu reviennes te pencher sur le berceau de la petite fille qui arrive ce soir. Je ne sais pas encore le nom qu’ils lui ont choisi », lui dis-je. 

La fée s’appuie sur sa baguette et me dévisage.

« C’est bon, je reviens ce soir, elle sera sans doute dans son berceau de bois ». Elle me dévisage et me lance d’un ton sévère :

« Je pense vraiment que tu exagères, mais bon c’est l’été il fait beau. Je suis de bonne humeur. C’est vraiment pour te rendre service ».

Jamais une fée me m’avait parlé comme cela. J’avais échappé à la transformation en souris, c’était déjà cela.

La journée s’écoule longue et monotone. La fenêtre était ouverte. La chaleur pénétrait dans la pièce. Je regardais la mer debout sur la commode .

Soudain, la maman pénètre dans la pièce avec le petit enfant. Je comprends qu’elle rentre de l’hôpital ou la naissance s’est déroulée. Il y du monde. La grand-mère, celle des gants et une autre petite fille.

L’enfant est posée dans le berceau, elle se met à pleurer. Sa maman lui parle et elle se calme puis s’endort. Soudain, elle hurle. L’heure de la tétée arrive, la maman entre et donne le sein à la petite qui était affamée. Entre silences et braillements, j’observe le nouveau-né.

La pénombre gagne la pièce. C’est le soir. Soudain, une lueur illumine la pièce. La fée est revenue. Je perçois par la lueur dégagée par la fée les yeux grands ouverts de la petite fille. Elle porte une brassière sur laquelle est inscrit brodé en lettres roses : Tatiana.

La fée se penche sur le berceau et se met à discuter mentalement avec Tatiana. Les lutins peuvent comprendre ce genre de conversations. Elle me toise du regard.

« J’ai pris la décision de te transformer en souris lorsque j’en aurai fini avec la petite ! » Mon bonnet se met à trembler de peur. La fée ne me regarde plus et se concentre sur le berceau de la petite fille.

Elle lui parle mentalement : 

« Que voudrais-tu pour ta vie ?

- Un prince charmant qui porte le nom d’un roi ! se met-elle à répondre.

- Pour le reste ?

- Je voudrais voyager, avoir une roulotte avec un cheval, parler plusieurs langues et découvrir des alcools aux saveurs différentes de ceux de la Russie.

- Tu n’es pas une Bohémienne ! Tu es Russe ! Veux-tu devenir soldat , interroge la fée.

- Cela ne va pas ?, lui répond la petite.

- Je dois réfléchir un peu, lui renvoie la fée. Il y a beaucoup de commerçants chez les Russes… Veux-tu essayer ?

- Peut-être.

- Tu es difficile ! Tu pourras aussi accompagner les commerçants et traduire dans les langues étrangères.

- Musicien c’est possible aussi ? »

La fée s’appuie sur sa baguette et regarde fixement la petite.

« Ecoute, je ne serai jamais loin de toi, mais je te laisserai choisir ce qui sera le mieux pour toi. »

« Au fait pour le prince charmant au nom de roi, je souhaiterais qu’il soit marmiton aussi, pour la bonne cuisine. Les Russes aiment la bonne cuisine ».

Je suis suffoqué par la discussion, je ne fais pas attention aux objets posés sur la commode. Je bouscule une poupée de porcelaine qui tombe et se brise avec fracas.

La fée disparaît. La lumière du plafond illumine la pièce. Tatiana dort d’un sommeil profond. La maman vient d’entrer inquiète. Elle regarde les débris de poupée puis va chercher un balai et une petite pelle pour le ménage et ramasse les morceaux jonchant le sol.

« Parfois, j’ai l’impression qu’il y a un lutin dans cette pièce » assure-t-elle à la grand-mère.

Je pense en mon for intérieur : « Elle est partie, je ne suis pas transformé en souris »

A ce moment le gros chat de la famille , Pouchkat, me repère et me regarde avec un air curieux. Il est noir avec une grande tache blanche sur le ventre. Il pèse au moins 5 kg, ce qui est beaucoup pour un chat. On se connaît. Il a tenté de me courir après. Je lui ai fait tomber différents objets sur la tête. A force, il se méfie.

Il observe le berceau. Il se dresse sur ses pattes de derrière et passe la tête à l’intérieur pour dévisager la nouvelle arrivante. Maladroit il se prend la tête dans le voilage entourant le petit lit. Il tombe lourdement.

La porte n’est pas fermée complètement. La maman découvre le manège et le chasse avec le balai. : « Ouste ! »

L’histoire aurait pu en rester là....

La suite très prochainement...

Conte et illustrations : François Macé

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