Le Journal du Gers rencontre le 2 juin Hugo Dereymez, le cuisinier de la cantine de l’école de Nogaro et Isabelle Collomb, maraîchère bio du Jardin de Léo à Sainte-Christie-d’Armagnac. Pour échanger sur la discussion qu’ils ont eue avec le maire de Nogaro, Christian Peyret et le public. La discussion a eu lieu dans les locaux de Parlem TV, qui l’a filmée (1).
Le sujet : le défi bio de la cantine scolaire
Ce défi, voulu par la municipalité, est relevé par l’équipe de Hugo Dereymez. On se souvient que le label Ecocert de niveau 1 a été conféré à ladite cantine le 4 mars 2015 par Carole Laramas, responsable Ecocert « cuisine ». Alors qu’il fallait, pour obtenir ce label, utiliser au moins 10 % de produits bio et locaux, la cantine en utilisait 25 %. Eh ! Bien aujourd’hui, les repas proposés sont bio à 70 %, mais les denrées bio qui y entrent ne coûtent que 45 % du prix total des denrées du repas. Et la qualité est là.
Comment c’est possible ? Les produits bio arrivent bruts : il faut les nettoyer, les éplucher, les couper. Hugo Dereymez prend l’exemple d’un vrai cassoulet avec de la saucisse de Toulouse et du fromage : coupés à la main alors qu’ils sont frais, ces produits, non conditionnés coûtent moins cher. Cela fait plus de travail que de prendre des plats préparés et conditionnés qui n’offrent pas la même qualité. Mais pour 200 repas (160 enfants, plus les enseignants et l’équipe de la cantine), c’est faisable. Mais pas pour 15 000 ! Le repas revient à 7,40 euros (les familles paient 2 euros et quelques centimes) au lieu de beaucoup plus cher pour les repas conditionnés par les grandes entreprises spécialisées. À cause de ce travail de conditionnement et des emballages divers. Dans ces 7,40 euros, les denrées entrent pour 2,13 euros par repas servi. E reste est dû à aux produits d' entretien, aux énergies,à l'amortissement du matériel et à la main d' œuvre.
Sécurité, hygiène et lutte contre le gaspillage
Les légumes sont lavés et décontaminés au vinaigre blanc et non avec une solution chlorée : aucun produit chimique n’est employé. Les installations sont nettoyées à la vapeur sèche : là encore, pas de produit chimique.
Pour tout aliment transformé dans les cuisines (ne serait-de que du fromage ou des tomates qui ont été coupés), il est prélevé un échantillon de 100 g mis en sachet, étiqueté et conservé au frais pendant 7 jours. Pour permettre des analyses en cas de maladie.
Aucun aliment n’est conservé d’un jour à l’autre en chambre froide ou ailleurs. Seul le pain est parfois congelé.
Enseigner aux enfants la qualité des aliments bio
Le repas est toujours composé de 5 parties : une entrée, un plat protéiné, une garniture de légumes, un produit lacté et un dessert (parfois le produit lacté et le dessert ne font qu’un). Le cassoulet et les plats de ce genre ne sont pas fréquemment proposés. Quand c’est le cas, l’équilibre est assuré par les menus des autres jours de la semaine (poisson et légumes le lendemain).
Chaque jour, on explique aux enfants le menu qu’ils vont manger et l’on en parle avec eux. De plus, une commission constituée d’un ou plusieurs élus, de parents et d’animateurs est en place pour discuter des repas. Hugo raconte la surprise des enfants devant des tomates jaunes, noires et vertes : « Mais ce ne sont pas des tomates ! »
Les parents se disent globalement satisfaits et racontent que, à la maison, les enfants demandent pourquoi le repas n’est pas bio…
Il y a en projet, si les subventions arrivent, d’acheter une table de tri des différents déchets qui donne le poids de chaque type : ce seront les enfants qui l’utiliseront.
Christian Peyret explique que la commune adhère au PNNS (Plan national nutrition santé) pour travailler à l’équilibre des repas et à l’activité physique pour tous. Un terrain multisports va être aménagé dans ce but derrière la salle d’animation.
Il remarque que Hugo a mis en place un plan de commandes chez des fournisseurs bio locaux avec une équipe de cuisine qui n’avait pas cette habitude de travailler le bio. « On est partis de rien en termes bio : l’équipe travaillait bien, mais n’avait pas la vision du bio, mais elle a adhéré tout de suite au projet », explique Hugo.
Mais il y a une limite physique à faire de la cuisine bio : il n’y a pas, actuellement, dans la région, d’offre bio suffisante pour faire des repas 100 % bio.
Le Jardin de Léo
Hugo note que lorsque Isabelle Collomb ne peut pas fournir suffisamment à la demande de la cantine, il s’adresse à d’autres fournisseurs bio, mais la différence de qualité et surtout de goût est énorme. La maraîchère explique qu’elle une des rares productrices à utiliser ses graines et, donc, à fabriquer elle-même ses plants. Elle cultive 1,7 ha uniquement en bio : salades, courges, mesclun, pommes de terre etc. et des fruits (cueillis tous les matins). Elle produit des légumes d’avril à novembre. Et fournit des particuliers et 2 restaurants, en plus de la cuisine d’Hugo Dereymez.
Livre de recettes
À la demande de parents à qui leurs enfants disent : « À la cantine, c’est bon, ici c’est pas bon ! », Hugo envisage d’écrire un petit livre de ses recettes où il insérera aussi quelques conseils pour réaliser l’équilibre alimentaire et pour bien acheter.
Un autre projet, sans doute plus difficile à réaliser, serait « d’accompagner » un artisan boulanger local dans la fabrication de pain bio.
Le défi alimentaire, voulu par la municipalité quand elle a recruté Hugo, est donc bien relevé par celui-ci. À noter que Christian Peyret a refusé l’installation d’un vendeur de hamburgers...Il conclut d’une manière générale sur les efforts de la municipalité pour améliorer les services dans le cadre des contraintes budgétaires.
(1) http://parlemtv.fr/?La-cantine-scolaire-de-Nogaro