Où sont passées les vendanges d'antan?

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Le département du Gers est une région de polyculture.

Dans toutes les fermes, on trouvait autrefois une partie consacrée à la vigne, sur les collines face au soleil dans l'arajadé. Certains cépages poussaient très bien sur les terres où dominait le peyruset bon pour l'enracinement des variétés de raisin noir comme le bacot ou le merlot.

Le nombre de viticulteurs a peu à peu diminué mais les paysans ont conservé un lopin de vigne pour pouvoir bénéficier de la loi sur la distillation qui leur permettait de distiller 50 litres de vin pour avoir 20 litres d'alcool pur à 40 degrés.

On trouve encore aujourd'hui des surfaces importantes de vigne.

Il y avait d'ailleurs il y a peu de temps une coopérative de Vic-Fezensac très active.

Revenons en arrière au temps où la vendange était le chantier qui suivait las batteros.

On avait dépiqué, on avait rentré le blé, l'orge et il restait une récolte, celle de la vigne. On préparait cette tâche activement.

Il fallait d'abord s'occuper des barriques et tonneaux.

On enlevait le tartre à l'intérieur des tonneaux, produit qui était vendu au chiffonnier du pays.

Au préalable, on introduisait dans le tonneau une bougie : si elle s'éteignait, c'est qu'il y avait encore des gaz à l'intérieur et il fallait attendre plusieurs jours.

On faisait alors entrer dans les tonneaux les personnes les plus minces ou les enfants car l'ouverture était étroite.

On sortait ensuite les comportes, ces bacs en planches qui contenaient une centaine de litres.

Elles s'usaient très vite.

Le charron du village était très contrarié quand arrivaient les vendanges car les paysans qui ne s'étaient pas occupés jusque-là de leur matériel lui demandaient de venir en urgence en prévision des vendanges dans les jours à venir pour réparer les comportes « escudado », c'est-à-dire qui n'avaient plus de fond.

Le charron pestait contre ce laisser aller.

Il fallait aussi préparer le pressoir, le dégager de ce qui l'encombrait.

Lorsqu'on avait un vignoble assez important, il fallait convoquer les vendangeurs qui venaient en grand nombre des Pyrénées et même d'Espagne.

Ils restaient parfois au pays.

«  Je m'appelle Gonzales, disait Madeleine, car l'Espagnol que j'ai épousé i venait pour la troisième fois faire les vendanges chez nous ! »

La population augmentait et la maire de Vic de l'époque avait changé la date de la fête locale pour la Saint Matthieu, patron de Marambat, afin de profiter de cette augmentation conséquente de la population. 

On voyait le matin sur la colline des arajadés, les vendangeurs coiffés de bérets noirs ou d'un chapeau, baquet et ciseaux à la main.

Quand le bac était plein, on appelait le porteur qui n'avait pas de hotte mais portait un baquet à chaque bras.

Quand approchait midi, mon père me demandait d'aller chercher le pain de deux kilos, les pilchards – des sardines salées - et une boîte de Vache qui Rit pour les gosses.

Quand je revenais de l'épicerie, le feu était déjà allumé pour les grillades de saucisse, de ventrèche, de jambon.

On se mettait tous à table avec bon appétit car c'était un exercice très physique de se baisser, couper les grappes et transporter les baquets.

On allait chercher le dessert sur les arbres fruitiers qui poussaient le long de deux allées : des pommes, des poires, des noisettes, des figues violettes et blanches, des noix, du raisin bien entendu

Le propriétaire donnait un petit quart d'heure pour la sieste avant que l'on reprenne le travail jusqu'à ce que le soleil caresse la colline d'en face.

On repartait alors avec la charrette et les comportes.

On portait le contenu des comportes dans le pressoir et on mettait en route la machine à presser : un grosse barre de bois tirait sur une crémaillère faisant descendre un plateau qui finissait d'écraser les raisins et d'ôter le jus.

Le jus s'écoulait et était envoyé par une pompe dans un tonneau ou une barrique.

Le soir, dans la cuisine, un bon repas attendait les vendangeurs : une bonne soupe aux choux avec des morceaux de confit puis du poulet sauté avec des frites, le tout à la graisse d'oie.

Le plus souvent, une énorme marmite de châtaignes cuites à l'eau et parfumées avec une branche de figuier clôturait le repas.

La journée n'était pas encore terminée, avec la lampe-tempête, il fallait revenir au chai "retailler " le marc, c'est-à-dire relever tout ce qui était sorti du pressoir.

On refaisait un tas et on recommençait à pousser la lourde barre.

Ce travail supplémentaire, quand on avançait dans la période des vendanges, était récompensé par un verre de bourret...

Du bourret qui existe toujours aujourd'hui mais qui n'a pas la même saveur que celui que l'on dégustait après la journée de travail...

La campagne des vendanges s'achevait par l'escousso, repas au menu très riche, des dindes, du porc, du veau, de la pâtisserie et du vin nouveau

Pierre DUPOUY

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