Crise sanitaire oblige, les chemins de Saint-Jacques de Compostelle ont été désertés par ceux que l’on appelait, au Moyen Âge, les jacquets ou « les pieds poudrés », ces marcheurs qui allaient chercher, sur le tombeau de Jacques le Majeur, indulgences ou billet pour le paradis.
Vic était un lieu de passage d’une bretelle de la voie du Puy : le quartier cœur de ville compte une rue baptisée rue Saint-Jacques ; elle se dirige vers la basse ville où était édifié l’hôpital Saint-Jacques qui devait être sûrement tenu par la confrérie du même nom ; cet hôpital sur pilotis de pierres se situait dans l’île formée par l’Osse et le canal de fuite du moulin, aux environs du pont métallique actuel.
Plus loin, se trouve la tour Saint-Jacques.
Si notre cité voyait passer des pèlerins et avait créé un centre d’accueil, les Vicois ne se contentaient pas de regarder passer les pèlerins, eux aussi coiffaient le grand chapeau avec la coquille, mettaient en bandoulière la gourde et prenaient le bourdon pour effectuer le voyage en Galice.
C’est l’abbé Loubès qui a retrouvé dans les minutes notariales du 15e siècle trace de ces pèlerins jacobites.
C’est à sa plaquette « Pèlerins vicois vers la fin du Moyen Age » que nous emprunterons les éléments qui suivent.
La route de Saint-Jacques bordée de risques
C’est parce qu’ils avaient conscience des risques qu’ils encouraient que les pèlerins vicois rédigeaient, avant leur départ, un testament enregistré par les notaires de la ville.
Entre 1413 et 1470, dix Vicois partent pour Compostelle.
L’abbé Loubès estime que le nombre de pèlerins était sûrement plus important mais il ne dispose pour ses recherches que des minutes d’une seule étude de notaire alors qu’il y en avait quatre dans notre cité.
Les départs avaient lieu au printemps entre avril et mai ; on préférait mettre avec soi un temps clément.
On remarque qu’aucune femme n’entreprend un tel pèlerinage ; elles devaient se contenter des visites dans les sanctuaires voisins, lieux également de rassemblements pour une religion de groupe.
Des pèlerinages par procuration
Si on hésitait à s’engager sur les chemins de Compostelle ou si on était physiquement handicapé, on pouvait « acheter » son pèlerinage.
C’est ce que fit, en 1451, la dame Mormès, veuve Jean Desangles, elle légua la somme de 14 florins d’or avec une utilisation bien précise laissée aux légataires : faire ou faire faire un pèlerinage à Saint-Jacques de Compostelle dans les deux ans qui suivront son décès.
On peut aussi imaginer qu’un riche marchand de Vic, Jean Rouède, effectua son pèlerinage à cheval puisque son testament a été annulé à son retour, deux mois et demi après son départ.
On retrouve sur les chemins jacquaires, en 1452, Pierre Castelnau et Raymond Dupouy, en 1455 Arnaud Gardères de Pléhaut, Pierre Ricar de Roquebrune, Jean Lausel de Rozès et Gaillard Fillol, exerçant tous deux la profession de forgeron.
Des cagots vicois à Saint-Jacques de Compostelle
Les cagots étaient les descendants des lépreux et, comme tels, ils étaient tenus à l’écart de la vie de la cité : quartier éloigné de la ville, interdiction d’exercer certains métiers de bouche, de convoler avec d’autres personnes que celles de leur communauté.
Or, en 1418, l’abbé Loubès note la présence de cagots parmi les pèlerins jacobites.
Les pèlerinages peuvent donc être considérés comme facteur d’unité et ils ont sans doute favorisé la prise de conscience chez les individus du sentiment de fraternité.