Au palco, le président de la commission technique sort le mouchoir blanc, les clarines sonnent, le mayoral local ouvre la porte du chiquero au premier toro de l'incaste Camino de Santiago.
Le toro tourne dans la piste, le ganadero Jean-Louis Darré, la tête au-dessus de la talenquère, le visage fatigué par une nuit sans sommeil, suit avec attention les figures du torero dans son tertio de cape.
Jean-Louis nous dit : "C'est un jour de bonheur pour moi, je suis satisfait de voir une journée taurine avec du bétail français"
Novillada du samedi 6 juillet du Lartet (les Bonnet présenteront à Riscle une corrida piquée, le 3 août)
Le lendemain, le dimanche 7 juillet, concours de ganaderias françaises, à Castelnau Rivière Basse.
On reconnaît que, dans le Gers, l'élevage du bétail brave réussit parfaitement.
Un spectateur précise : "On aurait dû mettre au toro la devise tricolore".
Quand sortira le 6ème toro à l'arrastre, Jean-Louis fera peut-être le bilan de 25 années d'élevage de "bravos".
C'est au retour d'une manifestation d'agriculteurs à Paris que Jean-Louis, écœuré de l'agriculture traditionnelle, décida de mettre, dans les terres du Cantaou, un élevage de toros braves. Pour démarrer son troupeau en décembre 1992, 19 vaches de ventre et un sémental firent leur entrée dans la ferme familiale des Darré.
Il s'agissait du bétail de Jean Riboulet, éleveur camarguais.
Le bétail acheté est de l'incaste célèbre de Guardiola.
La première sortie en public aura lieu à Aignan, le 30 mars 1997. Les trois erales furent lidiés par Sébastien Castella, Juan Luis Cantora et El Fandi.
Ce dernier fut extraordinaire aux banderilles, un novillo fut invité à la vuelta du ruedo posthume accompagné de son ganadero.
On peut noter que les trois novilleros sont aujourd'hui des figures du monde taurin.
Jean-Louis participa à tous les concours, à toutes les novilladas qui offraient des spectacles non piqués.
Il eut, comme il nous le dit, des hauts et des bas, selon la valeur des novillos présentés.
Jean-Louis décide, à l'automne 2002, d'ouvrir une nouvelle ganaderia du nom de Camino de Santiago. Il adore ses novillos de l'Astarac, incaste Guardiola, mais le public, et surtout les novilleros, avaient peu envie de les voir ou de les combattre.
Il a changé d'incaste en introduisant du sang des toros de l'élevage du Marquis de Domecq qui donnait à son bétail plus de noblesse.
Ces bêtes constitueront l'effectif de la ganaderia Camino de Santiago.
Jean-Louis, dans son quart de siècle d'activité, tente toujours de progresser. Des erales non piqués, il passe aux novillos avec picador, puis aux toros de combat.
Sa première sortie aura lieu à Mimizan, puis à Vic-Fezensac, en corrida concours et corrida.
Les organisateurs de corridas viennent voir les toros au campo et les admirent, mais ne signent aucun contrat.
Aussi Jean-Louis part-il faire lidier deux corridas en Espagne.
Jean-Louis accueille aussi de nombreux touristes pour leur faire visiter ses ganaderias et leur faire goûter la viande de ses toros
Pierre Dupouy