La perception des risques planétaires par les Français
« La ligne de partage entre le Bien et le Mal ne sépare ni les États, ni les classes sociales, ni les
partis. Elle traverse le cœur de chaque homme et de toute l’humanité. » ( Alexandre
Soljenitsyne)
À l’invitation de notre ami du CEPS Vincent Pilley , j’ai participé le 12 septembre dans
les locaux parisiens d’Opinion Way à la reddition de l’enquête (2030) organisée par «
l’Observatoire des Périls Planétaires » ( OPP) présidé par le général d’Armée Bernard Norlain,
ancien chef du cabinet militaire de deux Premiers ministres.
L’OPP a été fondé dans les bureaux des « Initiatives pour le Désarmement Nucléaire (
IDN) » de l’ancien ministre Paul Quilès et inspirées du grand philosophe Jean-Pierre Dupuy. Le
16 septembre, j’assistais par ailleurs au très beau colloque du CEPS au Sénat avec les chefs
d’état-major de l’Armée française.
Je vous en rends compte dans ma chronique du mois en faisant le lien entre ces sujets et le
bilan provisoire de l’Accord de Paris ( 2015) sur le climat dont l’horizon est également 2030.
I) Les résultats de l’enquête de l’OPP : les Français perçoivent de
mieux en mieux les risques planétaires.
L’enquête vise d’abord à identifier les « périls » les plus souvent cités par nos concitoyens,
ensuite à évaluer si ces périls peuvent constituer des « risques » pour l’Humanité. Les périls se
convertissant ou non en risques, la hiérarchie des dangers peut s’en trouver modifier.
Les principaux périls à 2030 :
79 % des personnes interrogées citent au moins un péril ( 2 périls en moyenne).
Selon l’échelle suivante :
● 69 % sont des périls environnementaux découlant du réchauffement climatique ;
● 35 % sont des périls géopolitiques dont le risque de guerre ;
● 22 % sont liés aux enjeux sociaux et sociétaux.
Les principaux risques pour l’Humanité à 2030 :
L’enquête de l’OPP exprime finalement ce qui pour les Français pourrait menacer l’Humanité.
Ainsi :
● À 57 %, des périls liés à l’environnement ;
● À 51 %, des périls géopolitiques dont le risque de guerre nucléaire (26 %) ;
● ou de recul de la démocratie ( 24%);
● À 40 %, des périls sociaux ou sociétaux ( violences et inégalités autour de 30 %);
● À 38 %, des périls technologiques dont l’abus de l’intelligence artificielle cité à 27 %.
On notera la faiblesse des risques économiques ou financiers dans la perception des Français.
II) Les conversations de Gouvion au Sénat : risques de conflit
généralisés.
Les Officiers généraux qui s’y sont exprimés ont fait état d’un risque de conflictualité
généralisée et d’une létalité accrue partout dans le monde. Le multilatéralisme et la régulation
des conflits ne fonctionnent plus. La guerre est devenue partout le moyen direct de se faire
entendre.
Le déclin technologique de l’Europe et sa dépendance des États-Unis en matière d’armement
ont dépassé les seuils critiques. Les propositions de Mario Draghi pour des commandes
européennes groupées et une préférence communautaire en matière d’armement sont
appréciables.
S’agissant du conflit en Ukraine qui n’est qu’une facette de ce qui précède , le scénario le plus
probable est l’enlisement de part et d’autre. Obsolescence technologique du côté russe en
raison de l’efficacité des sanctions , usure humaine du côté ukrainien avec l’énorme aléa de
l’aide américaine en cas d’élection de Trump.
Un dénouement de type « coréen » est le plus probable : ni guerre ni paix autour d’une ligne de
démarcation.
Le réchauffement climatique et les risques de catastrophe induits, notamment la réduction des
terres habitables, multiplie les risques de conflit.
III) 2015-2024 : Où en est l’accord de Paris pour 2030 ? Poursuite du
réchauffement climatique.
Tout se passe comme si médiatiquement le suivi de l’accord de Paris n’était plus un sujet.
On le confond souvent avec la neutralité carbone en 2050 alors qu’il s’agit de réduire les
émissions de CO2 de 55 % à 2030 versus années 90 pour empêcher que le réchauffement ne
franchisse la barre de 1,5 degré. Cet objectif est définitivement perdu. Et il en découlera un
stress hydrique important dans le monde.
Le carbone reste très longtemps dans l’atmosphère ( encore 50 % au bout de 100 ans ) de
sorte que, même si l’on atteignait la neutralité en 2050, l’objectif intermédiaire de 2030 reste
essentiel pour diminuer la vitesse du réchauffement.
L’Europe approchera de l’objectif, mais le reste du monde a complètement dérapé en raison de
la dénonciation de l’accord de Paris par Trump dès 2016.
Le réchauffement climatique dépassera la barre des 2 degrés entre 2030 et 2040 et pour notre
territoire le gouvernement français prévoit + 4 degrés à la fin du siècle. À noter ce qui se cache
derrière ces moyennes : à chaque dixième de degré en plus, les risques de catastrophe
augmentent de manière exponentielle ( incendies , tempêtes , inondations etc....)
Trump a annoncé que s’il était élu il reprendrait le forage des carbones à grande échelle. Et
donc accélération de la catastrophe climatique.
IV ) Pouvons-nous être sauvés par de grandes découvertes ?
L’hydrogène « blanc » est un espoir.
Même si le sujet reste mal documenté, on sait que l’hydrogène « blanc » est présent en
grandes quantités à la surface de la terre qui le produit naturellement et indéfiniment.
Transformable en électricité, il pourrait constituer une ressource énergétique illimitée et
décarbonée. Reste à définir les conditions économiques de son exploitation et ses effets
dérivés sur l’hydrogène industriel.
Au terme de ce tour d’horizon, Vincent Pilley et moi voyons comme une évidence la nécessité
de relancer une immense coopération internationale aujourd’hui en déclin. Nous sommes tous
liés les uns aux autres et la clé pour sauver l’Humanité réside dans le dialogue des cultures et
l’enrichissement des différences.
Les collapsologues estiment qu’il est trop tard, alors que les « catastrophistes éclairés » ( de
l’École de JP Dupuy) estiment qu’en regardant la catastrophe droit dans les yeux on peut
encore l’arrêter. C’est exactement le contraire du déni.
Il faut surtout changer le cœur de l’Homme en y réintroduisant de la spiritualité. Et s’orienter
vers des sociétés sobres à faibles inégalités.
Maxime Maury