Marc Pontier ne compte plus les cérémonies de la Sainte Barbe !

Capture d'écran 2023-12-10 210200.png

A l'occasion de la Sainte Barbe, nous avons rencontré l'emblématique chef du centre de secours de Vic-Fezensac, Marc Pontier qui a officié de 1973 à 1988 succédant à André Legendre et  laissant ensuite sa place à Robert Camazzola, Jean-Jacques Ospital puis son fils Pierre Pontier depuis 2012.


 

Journal du Gers : Quand êtes-vous entré dans le corps des sapeurs pompiers ?

Marc Pontier : Je peux dire que je suis tombé dans la marmite !

Mon père était charpentier et à l'époque, un artisan devenait automatiquement pompier, c’était comme ça !

On pensait que ces artisans du bâtiment étaient aptes à combattre les incendies.

Je suis devenu pompier en 1954, j'avais 16 ans quand je suis allé dans les premiers feux. C'était à l'époque de Henry Dumont.

On me donnait une lance et j’essayais d’arroser !

Les feux c’était quelque chose de courant à l’époque, c’était le travail essentiel des pompiers.

Il y avait les feux de gerbières, de hangars, de fenières, des feux difficiles à combattre car il n’y avait pas toujours d’eau dans les mares, il fallait aller puiser plus loin, on avait une pompe à main...

Une opération sur un incendie durait au moins 10 heures.

Je me souviens que ma mère me glissait quand je partais dans la poche arrière de ma veste en cuir une banane : « tu la mangeras car tu ne sais pas à quelle heure tu vas rentrer ! » me disait-elle !

Nous n’avions pas le matériel de maintenant et il fallait rester sur le lieu de l’incendie au cas où il repartirait.

photo 1973

Journal du Gers : Quelles étaient les conditions de travail des pompiers à cette époque ?

Marc Pontier : Nous étions logés dans un petit bâtiment où se trouvait le cabinet du dentiste Amblard, place de la Poste.

Il fallait loger là les tuyaux, à peine si on entrait avec les véhicules !

On allait acheter le pantalon et le blouson chez Iraimejean et les chaussures chez Baylac.

On nous ajoutait de gros boutons sur le blouson pour que ça fasse plus pompier !

Par la suite, on nous déplaça dans l’ancienne gendarmerie dont on couvrit une partie, ce qui nous permettait d’avoir un endroit couvert lorsqu’on faisait une journée de manœuvre de travail.

On n’avait pas beaucoup de matériel.

Par exemple, pour désincarcérer des automobilistes, il fallait agir avec de grosses pinces à la main.

On avait aussi une tronçonneuse thermique qui faisait des étincelles, il fallait avoir l'extincteur à côté !

Aujourd'hui on découpe une voiture comme un saucisson !

Notre moto-pompe achetée par la municipalité était tractée par la camionnette d'un pompier !

Journal du Gers : Au cours de votre carrière de pompier, quel est l’événement qui vous a le plus marqué ?

Marc Pontier : Un jour, lors de travaux à la cave coopérative, un ouvrier qui réalisait des soudures s'est électrocuté.

Nous avons été appelés et nous sommes partis avec un appareil que nous avions reçu, un oxy-réanimateur très complexe d'utilisation.

Sur le chemin, Jean Paillas me dit en patois : «  Qu'est-ce qu'on va faire avec ça ? »

Une fois sur place, je me suis approché du blessé qui était allongé et j’ai pratiqué le bouche à bouche. J’avais eu la chance de faire des exercices quelques temps avant sur un mannequin.

Le docteur Jean Cartault arrivé sur les lieux m'a incité à continuer et le gars a commencé à retrouver des couleurs ! C'est un souvenir très marquant !

Hélas, je me suis retrouvé d’autres fois dans des situations d'urgence vitale avec des issues moins heureuses.

Les premiers accidents de voiture avec des enfants de Vic sur lesquels j'ai pu intervenir furent des moments très difficiles.

Je retrouvais parfois un garçon ou une fille que j'avais salué le matin même dans mon quartier....

Je garderai aussi en mémoire une semaine de violents orages en mai où nous avions dû combattre trois feux de hangar dont un à Dému dans une étable avec 40 têtes de bétail toutes asphyxiées.

Retour de feu fin années 70 

Journal du Gers : Comment avez-vous eu l’idée de créer une école de jeunes sapeurs pompiers ?

Marc Pontier : Durant mon exercice de chef de corps, je me souciais toujours de l’avenir.

Comment allions-nous pouvoir conserver un groupe constant ?

C’est là que j’ai décidé de former une section de jeunes sapeurs pompiers. C'était en 1984.

Ce fut une réussite totale avec le concours des parents, les enfants participaient avec enthousiasme à tous les exercices qu’on leur proposait.

Un grand nombre est resté dans le corps des sapeurs pompiers et après des études sérieuses sont devenus des chefs de corps dans les villes ou banlieues importantes.

D'autres sont restés à Vic et ce sont eux qui tiennent les rênes du centre de Vic.

Après les jeunes, je me suis occupé des « vieux » car il n'y avait plus rien pour eux quand ils quittaient le corps.

Au département, j'ai endossé le rôle d'animateur pour les anciens et j'ai fait en sorte que l'on trouve dans tous les centres une section vétérans.

Les vétérans partagent leur expérience et participent aux activités associatives de l'amicale.

De manière générale, j'ai toujours voulu faire "du social". J'avais à l'esprit que pour pouvoir compter sur des hommes de qualité, il fallait leur donner quelques avantages.

C'est ainsi qu'on a fait l'acquisition d'un chalet à la montagne où peuvent aller en vacances les pompiers et leur famille.

Journal du Gers : Le corps des sapeurs pompiers, c'est finalement une grande famille ?

Marc Pontier : Oui, tout à fait, il y a une véritable union entre les trois générations.

On a réussi à créer une véritable culture familiale. Quand un ancien part à la retraite, il perd sa deuxième famille.

Journal du Gers : Quel regard portez-vous sur ce qu'est devenu le centre de secours de Vic-Fezensac ?

Marc Pontier : Quand je m'y rends, j'ai l'impression de rentrer dans un château !

Ils ont un matériel impressionnant qui est renouvelé très régulièrement.

Quand je vois l'évolution, je me dis qu'on n'a pas travaillé pour rien et qu'on a développé quelque chose de bien au fil du temps !

J'ai quitté le corps à 61 ans. Je suis resté chef de corps 15 ans alors que mon père ne voulait pas que je prenne ce poste.

Je ne regrette rien car, malgré le danger, les sacrifices, c'est tellement merveilleux de vivre sa passion !

Si je n'ai pas transmis la passion de la charpente à mes deux fils, je leur ai transmis celle du métier de pompier !

Pierre et Christophe Pontier 

Propos recueillis par Pierre DUPOUY 

Publicité
Suggestion d'articles
Suggestion d'articles