Coutellerie et taillanderie: une Vicoise fait revivre des métiers devenus rares

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Taillandier, un mot sorti de notre vocabulaire et un métier quasi disparu avec l’industrialisation début Xxème alors qu’au XIXème siècle, il y avait un taillandier par village et chaque région avait sa spécificité.

C’est sans compter sur l’enthousiasme de jeunes entrepreneurs motivés et passionnés comme Cécile Bouisset qui vient d’ouvrir à Vic-Fezensac son entreprise, la bien-nommée, l’ « Atelier Les Frappantes ».

Rencontre :

Journal du Gers : Cécile Bouisset, qui êtes-vous ?

Cécile Bouisset : J’ai 29 ans. Je suis Audoise et je vis dans le Gers depuis 3 ans.

Je suis venue dans le Gers pour le travail. Je faisais un service civique à Circa car je suis formée à la base aux spectacles vivants.

J’étais chargée de production.

Il y a deux ans, j’ai fait le choix d’une reconversion professionnelle pour plusieurs raisons.

J’étais en itinérance avec une compagnie et j’avais besoin de me poser un peu.

Avec le covid, il devenait difficile de travailler dans le milieu culturel.

Et j’ai surtout rencontré un forgeron-coutelier.

Journal du Gers : Parlez-nous de cette rencontre qui vous a ouvert de nouveaux horizons.

Cécile Bouisset : J’ai rencontré ce forgeron-coutelier, Sébastien Mathieu, sur la foire médiévale de Larressingle. Je  partage aujourd’hui son atelier de forge de Lavardens.

J’ai trouvé ce qu’il faisait magnifique. Voyant mon intérêt pour son travail, il m’a proposé de le découvrir et il m’a ouvert les portes de son atelier que j’ai fréquenté pendant 6 mois régulièrement.

Quand j’ai senti que je pouvais peut-être faire « quelque chose » avec cela, j’ai décidé de faire un CAP en coutellerie, un CAP créé à Thiers, le bassin de la coutellerie.

J’ai suivi cette formation en Charente de septembre 2020 à juin 2021 en alternance.

Ce qui a été décisif dans mon lancement, ce sont les nombreux stages que j’ai pu effectuer, ce qui m’a permis de pratiquer avec d’autres forgerons.

En particulier en Alsace, j’ai rencontré un réseau de forgerons qui font de la taillanderie, c’est-à-dire de la forge d’outils, marteaux, haches, outils pour le travail du bois, outils de jardinage.

J’ai apprécié chez ces  jeunes artisans cette volonté d’allier patrimoine et modernité et surtout ce sens du partage dont ils m’ont fait profiter.

Depuis le début de cette aventure dans l’artisanat, que ce soit dans le Gers ou ailleurs lors de mes stages, j’ai eu la chance de ne rencontrer que des personnes bienveillantes, qui m’ont tendu un tablier et encouragé à prendre ma place en tant que femme dans cet environnement masculin, qui m’ont transmis leurs savoirs avec pédagogie, sans jugements ; cela a été déterminant dans mon choix de réorientation professionnelle.

Ce sont d’ailleurs des personnes qui continuent à me former car la forge d’outils, c’est très complexe ! Je ne suis qu’au début de la vie de mon entreprise.

Journal du Gers : Vous avez donc créé votre entreprise l’« Atelier Les frappantes ».

Cécile Bouisset : Oui, j’ai senti que c’était le moment.

L’entreprise existe officiellement depuis août mais je me suis vraiment lancée depuis début décembre.

J’ai fait le choix de proposer d’abord ce que ma formation de CAP m’a apprise, les couteaux pliants puisque je suis formée à la technique, je connais les temps de production, les matériaux….

Pour la coutellerie, je suis installée à Vic-Fezensac et pour la partie forge, je partage à Lavardens l’atelier de Sébastien Mathieu.

Journal du Gers : Aviez-vous déjà la fibre artistique ou du moins manuelle avant de vous lancer dans cette nouvelle activité ?

Cécile Bouisset : Pas du tout, je me suis lancée dans cet univers professionnel sans avoir été vraiment manuelle avant, sans avoir pratiqué d’activité artistique.

C’est peut-être de l’inconscience ou de la folie ! (rires)

Mais j’ ai toujours admiré le travail manuel sans jamais oser m’y lancer !

Journal du Gers : Qu’est-ce qui vous a plu dans ce travail ?

Cécile Bouisset : Il y a un côté très enfantin dans ce travail qui me plaît beaucoup.

On a l’impression de faire de la pâte à modeler, en plus physique ! Et puis ça allie les compétences créatives et techniques aux compétences scientifiques, il faut par exemple avoir des notions de métallurgie, c’est passionnant.

On porte l’acier à haute température – pour les couteaux forgés – dans une forge à charbon ou à gaz et on le modèle au marteau et à l’enclume jusqu’à en faire une lame. Viennent ensuite les traitements thermiques comme la trempe, qui permettent d’avoir un acier suffisamment dur pour être tranchant.

Le choix de réaliser des couteaux et plus tard des outils vient du fait que j’aime beaucoup le côté utilitaire de ce que je crée.

Certains font des couteaux de collection, des couteaux qui coûtent très cher et qui restent dans une vitrine.

Ce n’est pas ce qui m’intéresse.

Ce qui me plaît, c’est de créer un objet utile, qui va passer dans les mains, qui va avoir une longue vie.

Journal du Gers : Pouvez-vous nous présenter « La petite colline » votre produit de lancement ?

Cécile Bouisset : Le couteau que je propose à la vente est un couteau pliant qui n’est pas forgé.

Je le fabrique entièrement à Vic.

C’est un couteau pliant que j’ai entièrement conçu qu’il s’agisse du dessin de la forme générale ou du mécanisme. Il est en acier inoxydable et son mécanisme est traditionnel avec un cran forcé.

Pour le manche, j’utilise deux types de bois locaux, du chêne et du châtaignier que je teins en noir avec une teinte naturelle à base de vinaigre et de rouille.

Il s’appelle « La petite colline » du fait de sa forme un peu courbée qui rappelle les collines du Gers ! C’est un petit clin d’oeil à l’endroit qui l’a vu naître !

Tout mon stock a été vendu mais je vais en refaire en janvier avec des bois différents.

Journal du Gers : Quels sont vos projets ?

Cécile Bouisset : En matière d’objets que je souhaite fabriquer, j’ai un projet de hachoir à herbes en demi-lune pour janvier-février.

En terme de couteau forgé, je vais proposer un couteau de cuisine qui sera polyvalent.

J’envisage également de réaliser des haches et des outils de jardinage, mais pour ça il faudra attendre quelques années !

Les jardiniers même amateurs ont besoin d’outils de qualité qui durent !

Je vais proposer aussi à partir de février des stages de fabrication du couteau « La petite colline » à la journée.

Les stagiaires ne pourront pas créer leur propre modèle mais ils pourront personnaliser le mien en choisissant le bois du manche, les gravures sur le métal, sur le bois, le type de tranchant…

Je souhaiterais enfin trouver un atelier dans le secteur de Vic-Fezensac que me permettrait de regrouper mes activités de forge, de coutellerie et de taillanderie.

Journal du Gers : La réalisation de « La petite colline » n’est pas votre seule activité actuellement ?

Cécile Bouisset : Non, je travaille aussi à la forge sur d’autres produits que je souhaite développer l’année prochaine.

Je fais également de la rénovation d’outils que l’on m’apporte ou que je trouve dans des brocantes, je les dérouille, je refais les tranchants, je refais le manche… Je leur donne une seconde vie et je les revends moins cher que les neufs.

Si vous connaissez un local qui pourrait intéresser Cécile, contactez-la !

Pour en savoir davantage sur son travail,visitez sa page facebook et son site :

https://www.facebook.com/atelierlesfrappantes

https://www.lesfrappantes.com/

Contact :

[email protected]

06 79 68 36 82

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