Nous commençons la publication de comptes rendus d’entretiens avec des producteurs de palmipèdes que nous avons rencontrés. La question de l’avenir des exploitations se pose avec force. Nous donnons la parole à ceux qui en vivent.
Les producteurs craignent que si les pouvoirs publics ne trouvent pas rapidement - et surtout ne mettent pas en œuvre - des solutions, on aille vers une catastrophe.
Les retraités sur le pont
Les retraités agricoles, eux aussi, sont inquiets. C’est ainsi que Pierre Guichanné (1) nous dit : « Cette épizootie a condamné plus de 2 millions de volailles sur le Sud-Ouest, avec des abattages de volailles contaminées, mais aussi des abattages préventifs autour des zones « foyers » sur ordre de l’administration. Des moments particulièrement difficiles pour les producteurs, qui se sentent démunis, malgré leurs efforts ». C’est toute la filière qui est en danger : « trésorerie impactée des éleveurs, avec des plannings de remise en place chamboulés, des vides sanitaires allongés, des charges de biosécurité supplémentaires, baisse et perte de débouchés via les abattoirs, les ateliers de transformation qui subissent le chômage technique etc. »
Pourquoi les retraités agricoles se mêlent-ils de cette affaire ? Parce qu’ils « s’interrogent, pour l’avenir, sur les futures reprises d’exploitations, sur l’installation des jeunes et, par conséquent, sur la pérennité de nos structures sociales et organisations professionnelles. » En effet, si aucune solution pérenne n’est trouvée, quel jeune agriculteur voudra entrer dans la filière ?
Rencontre de Loïc Lebranchu
Loïc Lebranchu, né en 1985, est le premier producteur rencontré. Depuis 2010, il élève, avec son père, des canards à Pouydraguin. Pour lui, son métier consiste, avant tout, à offrir aux canards le bien-être et les meilleurs soins possibles. C’est-à-dire, d’abord une litière propre tous les jours.
Bien entendu, ses canards sont "à l’abri" en permanence : nous n’avons pas pu approcher le bâtiment d’élevage à moins de 100 m pour le photographier ! Loïc Lebranchu estime que les causes de la crise actuelle sont claires : dans les Landes, la claustration des palmipèdes – en vigueur légalement - n’a pas été totalement respectée. Pourquoi ? D’après lui, parce que des dérogations ont été accordées aux producteurs qui n’avaient pas les moyens d’investir pour mettre leurs volailles à l’abri.
Selon lui, le ministre de l’agriculture aurait dit – après coup - qu’autoriser ces dérogations était peut-être une erreur...Loïc Lebranchu met en parallèle la situation en Vendée où, avec 2 200 000 volailles, il y a eu ...3 cas de grippe aviaire : elles sont claustrées. Certes, l’État a une part de responsabilité, mais la profession n’est pas assez sévère avec les producteurs dont l’exploitation n’est pas au niveau requis. C’est aussi aux coopératives de faire respecter les normes indispensables.
Loïc reste optimiste pour l’avenir : le Gers a été épargné sur tout son territoire du centre et de l’est. Dans l’avenir, le petit canard basque kriaxera, qui reste indemne, représentera peut-être une des solutions à la crise. De même qu’une réflexion sur la sélection intensive et le clonage qui privent les canards de leur immunité naturelle. Il reste, bien entendu, le problème des oiseaux sauvages.
(1) ancien maire du Houga, ex-président de la Communauté de communes du Bas-Armagnac et représentant de l’AICRA 32 (Association inter-cantonale des retraités agricoles du Gers).