Apparemment, l’évocation du passé a ses lecteurs. Certains souvenirs interpellent d’anciens valenciens et par eux, nous pouvons fortifier nos propos. Je n’oublie pas la contribution exceptionnelle d’un ancien maignautois, Isidore Mirel.
Une activité bien particulière
Aujourd’hui, après avoir parlé de l’école qu’il fréquentait à Valence-sur-Baïse, je rapporterai ses propos concernant le dressage et le domptage des animaux de travail.
Voilà ce qu’écrivit Isidore Mirel : combien était passionnant, pour celui qui aimait sa profession, de dompter soi-même ses compagnons de travail, les habituer à son rythme, à sa voix, à ses gestes, à ses caresses. Les mâles que l’on nommait aussi braux étaient plus faciles à habituer au travail que les femelles. En raison de leur faible constitution et de leurs gestations, la période de dressage était souvent retardée ou suspendue. D’autre part, par manque de vigueur, il arrivait qu’elles se rebellaient sous le joug.
Par manque d’aptitude ou de besoin, un certain nombre d’agriculteurs ne dressaient pas leurs animaux. Cet exercice nécessitait une grande agilité, de la prudence, fermeté et douceur. Il était rare que le cheptel de travail soit dressé dans les fermes importantes ; celles-ci renouvelaient leurs bêtes de réforme après les avoir engraissées vers l’âge de 10 ou 12 ans. Une paire de bœufs faisait face aux travaux sur une dizaine d’hectares.
Sur les fermes moyennes ou importantes, il était renouvelé une paire par an. Les animaux livrés à la boucherie étaient acheminés sur le marché de La Villette. C’était la spécialité de certains maquignons, dénommés dans les foires « Les Parisiens ». Certains agriculteurs achetaient dans les fermes d’élevage soit sur les foires, de jeunes braux de 2 ou 3 ans. Ces bêtes avaient été châtrées vers l’âge de 6 mois. Cette opération les rendait à la fois dociles et moins agressives, modifiait leur morphologie. Elles devaient être appareillées, d’une égale force musculaire, osseuse, les membres bien plantés, les cornes parfaitement orientées.
Le premier objectif du domptage consistait à habituer la bête à supporter entre ses cornes une corde passée en nœud coulant et rester ainsi des heures durant attachées à un point fixe. Les points de friction devenus sensibles, l’animal devenait de moins en moins rétif et arrivait à suivre son maître muni tout de même d’un gourdin de manière à freiner tout élan libérateur. Venait ensuite l’accoutumance au joug. Celui-ci était assujetti en 1er au moyen d’une courroie sur la nuque du partenaire toute sa carrière. Le tour du gaucher venait ensuite. Joints et de nouveau amarrés à un anneau, les têtes assez élevées, les bœufs prenaient là l’habitude de la patience et de la résignation. La libération des patients devaient se faire simultanément afin d’éviter tout affolement.
L’apprentissage de la marche était assuré par des promenades sur des chemins peu fréquentés. Lorsque celle-ci était devenue régulière, suivait l’épreuve des guides.
Claude Laffargue