Le nom de d’Artagnan résonne aux quatre coins du monde et continue aujourd’hui encore de faire rêver des générations entières. Ce que certains ignorent, c’est que le plus célèbre des mousquetaires a réellement existé, avant de devenir une légende de la littérature de cape et d’épée. Légende vivement entretenue par le petit village de Lupiac, au cœur du Gers, où il naquit.
Une histoire tronquée
D’Artagnan est souvent évoqué à tort comme un simple héros littéraire, mais celui-ci a réellement existé. Il portait le nom de Charles de Batz de Castelmore. Originaire de Lupiac dans le Gers, il fut mousquetaire du roi sous Louis XIV. En effet Charles de Batz de Castelmore et d’Artagnan sont la même personne. On l’appelle d’Artagnan car celui-ci prit le nom de sa mère lorsque qu’il monta à Paris pour intégrer les mousquetaires. Les mousquetaires étaient un groupe de militaires qui relevaient essentiellement de l’autorité du roi.
D’Artagnan est né entre 1611 et 1615. Dès le départ, celui-ci se voua au métier des armes et souhaita intégrer la Première Compagnie des Mousquetaires. Compagnie fondée par Louis XIII en 1622. Les mousquetaires étaient des soldats directement attachés au service du roi. Ceux-ci étaient dotés de mousquet, d’où leur nom de mousquetaires. Néanmoins, n’importe qui ne pouvait pas intégrer cette prestigieuse compagnie. D’une part, il fallait être gascon et, d’autre part, avoir déjà tué. D’Artagnan eut une vie des plus aventureuses, au service du cardinal Mazarin pour commencer. Il entra peu à peu dans les bonnes grâces de Louis XIV et participa à l’éminente arrestation de Nicolas Fouquet. Alors même que l’image du Gascon est malmenée, cette affaire permit de réhabiliter l’image du Cadet de Gascogne.
La rencontre de Charles de Batz de Castelmore avec la littérature
Cet homme fit l’objet de mémoires rédigées par Courtilz de Sandras, sous le titre Les Mémoires de Monsieur d’Artagnan. Celui-ci n’a pas choisi d’Artagnan par hasard, car les deux hommes ont été mousquetaires au même moment, dans la Première compagnie. Celle-ci, très réputée, était à la quasi-majorité constituée par des Cadets de Gascogne. Ces hommes étaient les cadets de leurs familles que les parents envoyaient accomplir le devoir militaire. Néanmoins, l’ouvrage n’a pas eu de réel succès auprès des contemporains de l’auteur.
Ce fut avec Alexandre Dumas (père) que la personne de d’Artagnan prit essor, non pas comme une entité indépendante, mais comme le personnage de son roman. Dumas avait découvert les Mémoires de Monsieur d’Artagnan à la bibliothèque de Marseille. Il n’a, par ailleurs, jamais rendu l’ouvrage sur lequel il s’était fondé pour rédiger son chef-d'œuvre. C’est en 1844 que parut Les Trois Mousquetaires, dans le journal Le Siècle. A la même époque, les éditions Baudry publièrent la version papier qui, au fil des ans, fut suivi de nombreuses rééditions.
Si les œuvres de Gatien Courtilz de Sandras et de Dumas ont de fortes similarités avec l’histoire, elles restent cependant à prendre avec des pincettes. Dans le premier cas, car ce sont des mémoires apocryphes, dont l’authenticité n’est pas avérée. En effet, Les Mémoires de Monsieur d’Artagnan ont été publiées en 1700, soit 27 ans après la mort de d’Artagnan. Dans le second cas, l'œuvre est essentiellement inspirée de faits historiques. Malgré tout, elle demeure une fiction, alimentée par la création de personnages ou par une certaine intimité que l’auteur n’a jamais connue.
Dès lors, Courtilz de Sandras et Dumas ont tout les deux participé à forger l’image de d’Artagnan que l’on connaît aujourd’hui. Dumas a cultivé la légende du Cadet de Gascogne comme l’ont fait Rostand ou Gauthier, ses contemporains. Aujourd’hui, d’Artagnan est ancré dans notre patrimoine culturel parmi bien d’autre héros de la littérature. Comme par exemple Cyrano de Bergerac, Le Vicomte de Bragelonne ou encore le Bossu.
D’Artagnan de nos jours
Depuis Dumas et jusqu’à aujourd’hui, d’Artagnan n’a cessé d’exister. Sa ville natale, Lupiac (Gers) organise chaque année une reconstitution avec plus de 300 participants costumés. Ils mettent en scène d’Artagnan et d’autres mousquetaires. Lupiac participe également à la mise en place depuis 2014 d’une route européenne. Celle-ci devrait s’étendre de Lupiac à Maastricht, lieu de décès présumé de d’Artagnan. Elle comptera pas moins de six itinéraires, dont près de 4000 km. La route est placée sous la gestion de l’Association Européenne Route d’Artagnan (AREA).
Lupiac n’est pas la seule à mettre en avant d’Artagnan. Paris en avait fait de même avec l’organisation en 2014 d’une exposition au musée de l’Armée des Invalides. Celle-ci était consacrée aux mousquetaires et n’a pas omis de parler de d’Artagnan.
Bien sûr, de nombreux produits se sont attribués l’image du mousquetaire. Cela va de l’armagnac, avec la création de la Compagnie des Mousquetaires de l’Armagnac, à l’adaptation au cinéma, en série, jeu vidéo ou encore BD. Récemment, d’Artagnan et ses acolytes ont été au centre de la série The Musketeers, diffusée de 2014 à 2016. Plus original encore, le visage de d’Artagnan a été imprimé sur des timbres mis en circulation en 1997.
Ainsi, d'Artagnan ne s’est pas perdu dans le temps, il a évolué avec celui-ci. Jusqu’à devenir un symbole pour la France, comme l’a démontré la représentation de Philippe Candeloro lors des Jeux Olympiques d’Hiver. Par ailleurs, les Français se sont appropriés l’image de d’Artagnan et des mousquetaires en portant la culture gasconne en eux.
En somme, il est encore possible de lire des romans de capes et d’épée, genre auquel appartient Les Trois Mousquetaires de Dumas. Celui-ci a surtout pris son essor grâce au cinéma. Nous avons déjà évoqué cet aspect, toutefois il semble important d’insister sur la transmission et l’évolution, qu’elles soient de ces héros ou de ce style.
Lucie Orsal
© Photo Hervé Pagès
