Le Prix littéraire Mousquetaire du 1er roman à Nogaro pour Lucas Belvaux

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Gros plan sur la table ronde «politique et art» (1er de 3 articles sur les Rencontres littéraires)

Pendant Les Rencontres littéraires de Nogaro, Le Journal du Gers a choisi d'assister – parmi les nombreuses réunions avec les écrivains - à la table ronde du début de l'après-midi du vendredi 2 juin. Celle-ci s'est terminée par la remise du Prix littéraire des lycéens, sous la forme, comme c'est devenu la tradition, d'un chèque géant de 1 000 euros, remis à Lucas Belvaux pour son roman Les Tourmentés.

Après cette table ronde, la parole est donnée à Matthieu Seel qui lit une série de ses textes en musique. Des textes qui racontent, avec une force de frappe inouïe, l'enfer vécu par un gamin perdu dans une des pires banlieues parisiennes. Un article ultérieur sera consacré à cette lecture, avec de larges extraits des textes.

Table ronde sur le thème : « Littérature et cinéma : quand l'art est politique »

Jérôme Leroy (l'écrivain président du jury), Lucas Belvaux (cinéaste et romancier) et Laurine Roux (romancière titulaire de plusieurs Prix) discutent avec Richard Tostain, libraire de La Chouette qui lit à Marciac. Nous avons pris quelques notes – trop brèves – que voici.

Disons tout de suite que ce thème nous rappelle nos années de lycée avec des sujets de dissertation à partir de la théorie de Théophile Gautier (Le capitaine Fracasse) de l'Art pour l'Art : il refusait l'engagement de l'écrivain et voyait dans la beauté la seule fin de l'art.

Les orateurs balaient cette idée en disant que « tout est politique ». Cela nous rappelle un professeur pour qui tout était de la physique et un autre qui voyait la philosophie partout.

La technique et l'essence du roman

La conversation s'est rapidement orientée vers la technique et l'essence du roman. Lucas Belvaux confie qu'à force d'écrire et de filmer, il en arrive à aimer ses personnages et qu'il ne peut donc pas leur faire faire n'importe quoi. Laurine Roux se sent chacun de ses personnages.

Une question intéressante posée par Richard Tostain : « Est-ce que vos romans sont prophétiques ? ». Pour Laurine Roux, ce ne sont pas des prophéties, mais ses angoisses qu'elle livre et, parfois, le lecteur perçoit un sens politique contraire au vœu de l'auteur. Jérôme Leroy, qui « se drogue à l'actualité », fait un travail de hiérarchisation des informations en recherchant les signaux faibles, comme celui du cas de pneumonie inconnue en Chine en octobre 2019 qui était traité en 10 lignes en page 4 du Monde. Lucas Belvaux remarque que les Armées américaine et française font appel à des scénaristes civils pour bâtir des avenirs possibles sur le temps long.

Le roman policier et le roman noir

Jérôme Leroy estime qu'il y a un public pour les histoires d'effondrement apocalyptiques. C'est-à-dire pour les roman noirs. Il distingue le roman noir du roman policier : dans ce dernier tout rentre dans l'ordre à la fin, alors que dans le roman noir, c'est noir du début à la fin. C'est la mise en récit du chaos du monde, ajoute Laurine Roux. Nous sommes forcément porteurs de mauvaises nouvelles, insiste Jérôme Leroy.

Différence entre livre et film

Cette question était d'autant plus intéressante que Lucas Belvaux est réalisateur de films et romancier et que que Jérôme Leroy et lui ont collaboré au scénario du film Chez Nous, projeté samedi 3 juin et sur lequel nous reviendrons.

Tous les orateurs s'accordent pour dire que le livre laisse le lecteur libre de se représenter à son idée les personnages et les situations. Alors que le film vous livre une image unique qui s'impose et que l'on ne peut adapter à son propre goût et l'on ne peut y réfléchir, puisqu'il n'y a pas de pause possible. Lucas Belvaux donne le cas du commissaire Maigret de Georges Simenon : en lisant les romans de l'auteur, chacun se fait une idée du policier. Mais les cinéastes ont choisi tantôt Jean Richard, Jean Gabin, Bruno Kraemer ou Gérard Depardieu pour l'incarner et il n'y avait pas de choix pour le spectateur.

Donc, vive la lecture !

La place des personnages secondaires

Les orateurs s'accordent sur le fait que certains personnages que l'on croit secondaires prennent de l'importance dans le cours du récit. Une autre possibilité, c'est celle de la Comédie humaine de Balzac, où les mêmes personnages ont une importance différente selon le roman dans lequel ils figurent. Jérôme Leroy note qu'il lui arrive de mettre en exergue un personnage et de le faire mourir au milieu du récit pour créer la surprise.

Petites remarques

Nous sommes restés un peu sur notre faim sur ce thème délicat des relations entre l'art et la politique. Malgré tout, ces échanges ont été très intéressants.

Nous avons été déçu que les orateurs n'aient pas compris la question de la salle sur la maïeutique (la méthode de Socrate pour faire accoucher les idées) pour construire leurs personnages. Enfin, nous avons posé une première question qui a eu peu d'échos, de même que la seconde : le public ne se détourne-t-il pas de plus en plus des mauvaises nouvelles : la réponse est non. Puis, que pensent les orateurs du caractère que l'on dit prophétique des romans de Houellebecq ? Après un moment d'étonnement, Jérôme Leroy répond que Houellebecq a mis au jour des idées , mais que ses commentaires sont discutables.

NB - Sur la photo du haut de page, de gauche à droite : Jérôme Leroy, Laurine Roux, Lucas Belvaux et Richard Tostain.

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