Lors des Rencontres littéraires de Nogaro, un public nombreux, jeune en majorité, suit les débats de la première table ronde du 3 juin, avant la proclamation du lauréat du Prix « Jeune mousquetaire du premier roman » des lycéens. Et la remise d'un chèque de 1 000 euros par la municipalité de Nogaro. Le présent article vient compléter celui-ci (https://lejournaldugers.fr/article/57920-les-rencontres-litteraires-de-nogaro-passionnantes).
Le sujet de ce débat peut paraître paradoxal, mais il sous-entend que la culture écrite peut être une arme d'attaque et/ou un bouclier. Notons que d'autres tables rondes étaient prévues, dont une sur le thème suivant : « Peut-on écrire avec légèreté sur des sujets graves ? » et : « Publier un premier roman, et après ? »
« L'écriture, un sport de combat ?
Les participants à cette table ronde sont les écrivains, Ian Manook (L'oiseau bleu d'Erzeroum), Julie Ruocco (Furies) et Elsa Vallot Le corps, le sang, la rage). Noter que les notes d'où sont issues les lignes suivantes ne sont peut-être pas totalement fidèles, ni totalement complètes. Elles donnent néanmoins une idée de la discussion.
Le débat est lancé
Ian Manook lance le débat en disant que l'écriture n'est ni un sport, ni un combat – on écrit par plaisir.
C'est un sujet de choix pour Elsa Vallot, dont le roman fait l'éloge de la boxe ! Pour l'écrire elle a eu des échanges qui ont été des combats qu'elle n'oublie pas. Et elle était aux prises avec un corps en lutte.
Pour Julie Ruocco, certes, on « s'attaque » au sujet, on entraîne le lecteur.
L'horizon s'élargit
Ian Manook remarque que plus on écrit, plus l'horizon s'élargit, plus on lutte contre l'ambiguïté. Dans ce sens, l'écriture est globalement un combat (on comprend que c'est le travail d'écrire qui est un combat).
Mais le combat qui compte, c'est celui de la résistance culturelle. Pour cette résistance, un livre est une arme.
Elsa Vallot pense même que son livre est une sorte de bombe. « J'étais en lutte jusqu'au bout ».
Pour certains écrivains,c'est un bouclier
Julie Ruocco approfondit le débat : elle voit l'écriture plutôt comme un bouclier que comme une arme, comme le bouclier de Persée dans la mythologie grecque (il doit tuer la Gorgone, dont le regard est paralysant). Il a un bouclier en bronze dont l'intérieur est poli comme un miroir, qui lui permet d'éviter tout regard direct avec la Gorgone ; Julie Ruocco préfère la ruse comme arme : le bouclier de Persée donne l'illusion d'échapper à la réalité. C'est un moyen qui permet de lutter contre la peur et la sensibilité aux émotions (on pense à ses descriptions des horreurs de la guerre en Syrie).
Ian Manook fait l'éloge de l'écriture. Les textes sont beaucoup plus fouillés que ce qui passe à la télé et l'on peut revenir dessus : on a le temps ! Et, en écrivant, on a donc le temps de chercher ce qui est percutant, ce qui fait mal.
L'écriture est-elle automatique ?
Richard Tostain : « L'écriture vient-elle sans réflexion, l'écrivain est-il entraîné par l'enchaînement de l'histoire ? »
Ian Manook estime que « l'angle s'impose de lui-même ». Ainsi, dans L'oiseau bleu d'Erzeroum, il a fait entrer la notion de l'existence de Kurdes « Justes » (les Kurdes étaient les exécutants du génocide arménien). Tout comme les Juifs ont reconnu qu'il y avait des Allemands « Justes ».
Richard Tostain : « Comment voyez-vous vos romans ? »
Réponse de Ian Manook : un témoignage reçu de ma grand-mère à 5 ans et reproduit à 50 ans.
N.B. - Sur la photo du haut de page : Julie Ruocco, Ian Manook, Elsa Vallot et Richard Tostain.