En allant assister, le 1er octobre 2021, à la réunion du conseil de la Communauté de communes du Bas-Armagnac (CCBA), qui a lieu à Loubédat, et au vu de l'ordre du jour, on se doute que les débats risquent d'être houleux. En effet, Vincent Gouanelle, président de la CCBA, propose de renoncer au projet de construire un bassin nordique dans le bois des Marnières de Nogaro. Il devait être ouvert toute l'année, grâce aux calories de l'eau chaude fossile du forage sis à côté de la cité scolaire. Et il fait voter ce renoncement par 25 voix contre 16.
Argumentation de Vincent Gouanelle
Vincent Gouanelle ouvre le débat sur un ton neutre. Le principal argument contre le projet est une incertitude relevée par le bureau d'études Adoc sur le potentiel géothermique du forage, qui devrait chauffer à la fois le bassin nordique, l'entreprise de pisciculture et l'hôpital. Si ce potentiel était insuffisant, il faudrait le compléter par une chaudière au gaz ou une pompe à chaleur.
Le deuxième argument, au moins aussi important, aux yeux des opposants, est le reste à régler sur le coût total, une fois les subventions déduites. Le coût total prévu initialement s'élève à 3 734 501 euros HT et les subventions accordées, à 1 512 045,41 euros, soit 40,9 %. De plus, « ce chiffrage doit être revu à la hausse en lien avec l'évolution de l'indice de la construction ».
Autres arguments avancés :
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les diverses modalités de la fourniture de calories ne sont pas connues,
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les attentes de la population vont plutôt vers des espaces ludiques,
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les territoires voisins ne sont pas intéressés par ce bassin : la plupart disposent d'une piscine d'été.
En remplacement, le bureau de la CCBA propose de réaliser une piscine « plus classique et plus modeste » sur le site de l'ancienne piscine de Nogaro ou à proximité, à côté des équipements sportifs existants et du futur pôle enfance-jeunesse.
Cet équipement pourrait comprendre un bassin plus petit pour l'apprentissage de la natation et des installations ludiques. Il serait ouvert seulement à la belle saison pour limiter les dépenses en personnel.
En conclusion, Vincent Gouanelle souligne qu'il ne propose pas un renoncement pur et simple, mais aussi un projet de substitution.
Intervention de Christian Peyret
Décidé à faire aboutir ce projet de bassin nordique qui avait été étudié, accepté et était donc prêt à être lancé du temps de la précédente équipe de la CCBA, Christian Peyret répond avec chaleur :
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la première étude très fouillée effectuée par le bureau d'études Adoc (120 000 euros réglés par la CCBA) « a été saluée par les partenaires-financeurs pour son exemplarité » dans tous les domaines,
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cette étude a été saluée « jusqu'au plus haut niveau de l'État », qui accorde la priorité à l'apprentissage de la natation,
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80 % du coût de l'investissement sont subventionnés ; en effet en plus des 40 % indiqués par Vincent Gouanelle, attribués par l'État (DETR/DSIL), il y a aussi les subventions du Centre national des sports Région, le fonds Leader (fonds européen distribué par le Pays d'Armagnac), la Région Occitanie et le Conseil départemental ; le reste à régler par la CCBA serait de 746 900,20 euros (1),
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la municipalité de Nogaro s'engage à prendre en charge le surcoût éventuel de l'entretien au-delà de 70 000 euros annuels dont la charge était acceptée par la CCBA,
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le site prévu est au cœur de Nogaro, proche de la cité scolaire et devrait être « l'épicentre d'un projet de développement d'équipements de loisirs » ; ce site est reconnu par Adoc comme « le plus pertinent » selon tous les critères,
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une nouvelle étude effectuée par le cabinet Adoc, à la demande de Vincent Gouanelle, est moins optimiste que la précédente, « au motif qu'un projet de piscine est à l'étude à Aire-sur-l'Adour » : elle revoit en baisse les taux de fréquentation et « fixe des dépenses hors normes en matière de chauffage, de frais de personnel et de maintenance » ; or, pour Christian Peyret, le projet d'Aire-sur-l'Adour aurait un coût triple du projet de bassin nordique de Nogaro et son financement est loin d'être assuré,
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s'agissant de la ressource géothermale : contrairement à ce qui est avancé, « les informations récoltées auprès de Veolia indiquant une fourniture de thermies fluctuante sont erronées » : avec le basin nordique, la demande se ferait selon un process différent du process en place actuellement,
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si la gestion est précise, il n'est pas établi que le fonctionnement « engendre un déficit extravagant ».
Après avoir énuméré ces arguments pour le bassin nordique, Christian Peyret déclare que le contre-projet est un projet « au rabais », qui sera directement concurrent des bassins voisins.
Il demande au Conseil :
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d'approuver le projet de bassin nordique, sachant que Nogaro réglera le déficit éventuel au-delà des 70 000 euros acceptés par la CCBA,
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de décider que la commune de Nogaro en sera le gestionnaire exclusif,
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d'associer la commune de Nogaro à sa construction.
À noter que, selon Christian Peyret, d'autres projets sont à l'étude pour l'utilisation de l'emplacement de l'ancienne piscine (hors d'usage).
Autres interventions
Élisabeth Dupuy-Mitterrand, maire de Sion et présidente de l'ancienne équipe de la CCBA, fait chorus avec Christian Peyret. Elle souligne qu'il a fallu cinq ans pour faire aboutir le projet de bassin nordique, qui a recueilli le montant de subventions le plus élevé pour le Gers depuis 10 ans. Pour faire aboutir le contre-projet, il faudra encore cinq ans.
D'autant plus que l'on n'en connaît pas la localisation et qu'il arrive par surprise, sans concertation, trois jours avant le terme fixé pour accepter ou non les subventions.
Pierre Capdepont, maire de Manciet, déclare qu'il était contre le bassin nordique, mais qu'il a évolué : il semble hésitant.
Quitterie Spoerry, maire de Mormès, déclare qu'en acceptant le projet de bassin nordique, la CCBA prendrait un risque. Risque qu'elle ne semble pas vouloir prendre.
Christian Peyret répond qu'il n'y aucun risque pour la CCBA, le risque est pour Nogaro, puisque la municipalité de Nogaro s'engage à prendre en charge la gestion.
Puis on passe au vote à bulletins secrets (25 pour le renoncement au bassin nordique et 16 pour l'approuver). À la proclamation de ces résultats, les conseillers de Nogaro (sauf Roger Combres), Élisabeth Dupuy-Mitterrand et Patrick Guichebarou, maire de Caupenne-d'Armagnac, quittent la salle et ne participent donc pas à la suite de l'ordre du jour.
Remarque
Une donnée a pu jouer un rôle dans ce scrutin : certains élus de la CCBA nous ont dit clairement que ce sont les municipalités successives de Nogaro qui sont responsables d'avoir négligé l'entretien et/ou la réparation de la piscine actuellement hors d'usage. C'est peut-être l'origine d'un malentendu.
(1) Détail des subventions prévues :
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1 512 045,41 euros (DETR/DSIL),
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500 000 euros (CNDS),
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500 000 euros (Région),
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150 000 euros (Fonds Leaderi),
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128 400 euros (Conseil départemental).
Soit un total de 2 790 445,44 euros.
Christian Peyret précise que, de plus, un emprunt de 1 000 000 euros à 0,50 % pendant 30 ans auprès de la Banque des territoires coûterait 35 978 euros par an.
N.B. - Sur la photo de tête : Vincent Gouanelle (micro) et Patricia Galabert , Jean Duclavé, Bernard Hamel (vice-présidents).