Petite parenthèse

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Battre sa coulpe

Attention, on ne demande plus « Comment allez-vous ? », mais « Et vous, vous faites quoi pour la planète ? ». Eh oui, c’est important de vivre avec son temps ! Car, à l’heure de la « transition énergétique » qui n’a jamais autant fleuri sur les lèvres de nos gouvernants que depuis une flambée du prix de l’essence, chacun est prié de décliner faits et gestes prouvant sa bonne conduite zéro déchet.

Sur le podium des belles trouvailles, éteindre les lumières lorsqu’on quitte une pièce (Eurêka, on n’y avait pas pensé !), trier ses déchets (on n’était pas au courant), prendre les transports en commun plutôt que la voiture (facile quand on vit loin de toute agglomération), faire pipi sous la douche (ça ne fonctionne pas avec le bain, surtout si vous avez plus de 18 mois)…

Bref, vérifier jusque dans vos petites manies si vous avez bien pigé le message, et surtout, surtout, vous culpabiliser à mort. Parce que même ouvrir la porte du réfrigérateur, c’est mal !

Et en attendant de se glisser dans la peau du Spiderman planétaire, chacun est prié de battre sa coulpe.

Justement, tant que l’on est dans les prières, restons-y pour remonter à l’origine de cette expression, qui signifie reconnaître ses torts, se repentir. «Mea culpa, mea maxima culpa », ça vous rappelle quelque chose ? La coulpe vient en effet du latin « culpa », la faute, qui donnera également la culpabilité.

Les pénitents ont commencé à la battre dès le XIIe siècle, en se flagellant ou en se frappant la poitrine à grands coups. Histoire de montrer à toute la communauté que, oui, ils avaient bien compris qu’ils étaient à l’origine de tous les malheurs du monde.

Si cette fâcheuse tendance à se frapper a fini par disparaître, ou du moins par s’atténuer, l’expression « battre sa coulpe » a continué son petit bonhomme de chemin, du XVe siècle à nos jours.

Alors, bien sûr que chacun fait ce qu’il peut pour limiter les dégâts et transmettre aux générations futures une Terre plus belle, plus propre, plus tout.

Mais sermonner et culpabiliser les populations pour qu’elles baissent le thermostat de la planète par des privations, pendant que d’autres ouvrent grand les fenêtres pour évacuer les fumées noires de l’armement à outrance et de la production industrielle, il y a comme un truc qui cloche…

Illustration : Nuremberg Chronicle, par Hartmann Schedel (1440-1514)

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