On s’en doutait en assistant le 5 novembre à la préparation du centième anniversaire de l’armistice du 11 novembre 1918 (1). La cérémonie, ou plutôt la double cérémonie – d’abord au carré militaire, puis au monument aux morts - qui a eu lieu dans une ambiance grave et recueillie, a été réussie.
Outre Patricia Galabert, maire du Houga, les enfants ont été les principaux acteurs. Au carré militaire du cimetière, ils ont déposé une gerbe avec les anciens combattants et ils ont fait l’appel des 56 morts du Houga en précisant leur affectation pour mieux « leur redonner existence ». Au monument aux morts, ils ont lu la lettre, émouvante et pleine de tact, envoyée par un poilu, depuis le front, à la famille d’un de ses camarades tué au combat. Et ils ont chanté. Le rôle qui leur a été donné, illustre la citation faite par la maire de cette phrase de Serge Barcellini (président du Souvenir français) : « La tombe d’un combattant de la Grande Guerre, c’est plus qu’un héritage, c’est un signal pour l’histoire partagée des citoyens du futur ».
Notons aussi la performance de la fanfare qui a joué à la perfection les airs appropriés.
Au carré militaire
C’est devant les six tombes des poilus du carré militaire, que Patricia Galabert prend la parole. Pour concrétiser le tragique de la Grande Guerre et aider à s’en souvenir.
« Commencée avec cavaliers en gants blancs et fantassins en pantalons rouges, très vite la guerre change de nature ». Avec l’aviation, les gaz de combat, le matraquage d’artillerie et enfin les chars de combat. Toute une génération de jeunes hommes perdue et des régions riches ravagées.
Elle note que les derniers soldats démobilisés (les plus jeunes), l’ont été en octobre 1919, pour être remobilisés 20 ans après en 1939. D’où la conviction amère que la « der des ders », non seulement n’était pas la dernière, mais qu’elle n’avait servi à rien.
Au monument aux morts
Action hautement symbolique : comme le 11 novembre 1918, le clairon sonne l’armistice aux 4 points cardinaux.
La maire rappelle que l’ensemble des Alliés a perdu 9,37 millions de soldats et 3,67 millions de civils morts. La France, qui avait 39,6 millions d’habitants, a perdu 1 397 800 soldats, 300 000 civils. À ces pertes s’ajoutent 4,27 millions de blessés (gazés, amputés, gueules cassées) sans compter les survivants frappés de chocs post-traumatiques.
Patricia Galabert cite Henri de Montherlant sur les morts de Verdun « Si tous les hommes qui sont morts ici se levaient, ils n’auraient pas la place de tenir, parce qu’ils sont tombés par couches successives ».
« Cette mort en masse », signe d’une guerre devenue industrielle, a été « d’autant plus insupportable qu’elle inversait l’ordre des générations. Les soldats, jeunes adultes, meurent avant leur parents. Ils n’ont pas eu ou n’auront plus d’enfants. » D’où une chute brutale de la natalité, un manque de travailleurs, l’appel à la main d’œuvre étrangère et le vieillissement du monde rural.
« Le 11 novembre, c’est aussi le souvenir de l’immense souffrance » de ces hommes « envoyés conquérir des morceaux de collines. Pour pas grand-chose et parfois pour rien ».
Nos enfants ne doivent pas être infirmes de leur passé
La maire poursuit : « le travail de mémoire est d’autant plus important aujourd’hui qu’il n’existe plus de témoins ni d’acteurs directs de ce conflit ». D’où la présence à cette cérémonie des écoliers aux côtés des anciens combattants pour assurer la transmission de la mémoire, par des lectures et des chants.
Et il y a eu le 2ème Guerre mondiale... Donc, un seul moyen pour préserver la paix : s’efforcer d’étouffer les ferments de division : « indifférence, intolérance, racisme, individualisme et repli sur soi. » Car la paix est elle-même la seule voie pour faire vivre les valeurs démocratiques et républicaines qui sont au cœur de notre idéal européen.
(1) https://lejournaldugers.fr/article/30807-lecole-du-houga-prepare-le-11-novembre