Bon usage de la peur, ajouter de la peur à la peur

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le mot de Gilles

LE BON USAGE DE LA PEUR
Vous étiez un juge antiterroriste qu'on interviewait ici et là et qui avait régulièrement l'occasion de se montrer pour dire des choses, et que l'on écoutait.
Et puis un jour on vous a oublié parce que la loi de la magistrature est très sévère, on ne peut pas occuper le même poste plus de sept ans.
Même si l'on fait bien son travail.
Soudain les sunlights se sont éteints, les micros ce sont retirés, exactement comme pour Chantal Goya lors de sa traversée du désert.
Alors, il reste toujours la peur. En ce moment ça se vend bien, ça se vend même très bien.
On fait un premier essai en racontant deux ou trois trucs du passé, ça marche bien, mais c'est quand même pas facile de raconter toujours la même chose… au bout de quelques interviews les journalistes réclament du neuf, et du vrai neuf on n'en a pas ! Ou plutôt on n'en a plus.
Alors on en rajoute chaque semaine sur la peur. Ça plaît aux journalistes à défaut d'information nouvelle. Mais là aussi on ne peut pas dire chaque semaine la même chose, alors à chaque fois, on en rajoute un peu plus, en disant que ça va être terrible, plus terrible, plus plus terrible que terrible. Jusqu'à cette semaine là dans Paris-match ou on se lâche total : ce sera un 11 septembre.
En plus, on est conforté, il y a régulièrement des attentats, donc le business de la peur ça marche bien.
Mais faire plus fort que le 11 septembre ça va être difficile. Peut-être, la prochaine fois, va-t-il nous annoncer que le gouvernement sera obligé de se replier à Bordeaux ?

Prendre la parole dans de grands médias, c'est prendre une responsabilité. Ajouter de la peur à la peur dans notre pays, c'est prendre une responsabilité grave. Le faire pour des motifs personnels, ça ressemble tellement à ces politiciens de 14e catégorie que l'on voit trop souvent sur nos écrans…

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