"On a toujours besoin d'un ornithologue chez soi ", c'est ce qu'ont dû se dire les guides touristiques qui ont fait appel à Pierre Forêt pour assurer le sauvetage d'un martinet ayant raté son vol depuis l'édifice de Larressingle.
Ce dernier nous fait le récit de l'aventure gasconne du martinet.
"Un martinet tombé maladroitement du mur d’enceinte de la forteresse s’est récupéré en souplesse sur le rameau d’un Buxus sempivernens.
L’arbre du buis commun peut atteindre 5 m de hauteur et par chance il est situé au-bas de la façade principale du château.
Alerté par Annabelle ( guide nature à l’Office de Tourisme de Condom-Ténarèze ) et Virginie guide de l’O.T à l’édifice du XIIè , je me suis rendu sur ce haut lieu de cet héritage gascon.
Celui-ci était un juvénile mais il est assez fréquent que même un adulte rate le 1er vol.
Par contre une fois au sol, leurs pattes très courtes et leurs ailes trop longues rendent l’envol impossible. Il ne peut marcher ses pattes étant complètement atrophiées.
Elles ne lui permettent même pas de se poser sur un fil ou une branche mais uniquement de s’agripper aux parois verticales.
Stressé mais pas blessé je l’ai trouvé suspendu à près de 3 m « d’altitude « sous la canopée du buis, s’accrochant tant bien que mal au-dessus du flux permanent de visiteurs.
Si je chute au sol c’en est fini pour moi
Après l’avoir dégagé délicatement, je l’ai posé sur mon épaule puis lui ai donné une becquée version goutte-à-goutte.
Enfin je me suis dirigé à l’arrière de la forteresse visant une pente douce enherbée au-dessus de la douve pour lui donner une impulsion en l’air.
Mission accomplie pour ce fou volant !
Vue dégagée. Décollage imminent
C’est un de mes oiseaux favoris. Il est vraiment taillé pour le vol : avec son corps fuselé et ses ailes en forme de faux, j’aime l’entendre fendre l’air quand il pique à près de 200km/h surtout lorsqu’ils sont en escadrille à la tombée la nuit. C’est un spectacle de haute volée.
Je me suis toujours demandé où ils allaient ensuite. En fait ils disparaissent brusquement pour monter à la limite de la stratosphère et donc de l’oxygène.
Et là, ils y trouvent un bon matelas pour dormir. Comme les grands migrateurs une moitié de leur cerveau reste en veille, l’autre étant en sommeil profond.
Dix mois sans se poser. Le martinet s’accouple, dort et mange en vol. Des milliers d’insectes par jour. A commencer par les moustiques !
Plus que protégé car en déclin depuis 10 ans avec une baisse de 40% en France et en Europe.
L’une des nombreuses causes étant la perte de l’habitat.
A Larressingle le ravalement de la façade principale débute en septembre prochain.
Il faudra trouver ( encore ) un vieux château gascon ou une tour/clocher."
Texte et photos : Pierre FORET