Il paraît intéressant de faire connaître au lecteur gersois les réflexions d’un philosophe allemand, Alexander Grau, sur la société moderne actuelle, telles que l’hebdomadaire Der Spiegel les a publiées dans son numéro du 30 janvier 2021.
Der Spiegel résume ainsi la pensée de l’auteur : « Ceinturé dans sa voiture et le casque sur la tête, le citoyen est assis, vacciné, sa santé surveillée, sans fumer, derrière ses airbags qu’il a installés entre lui et la vie – et il a peur ».
Voici des extraits traduits par nos soins :
« L’homme occidental de l’époque post-moderne a peur. Peur du corona, peur des pandémies, du changement climatique, de la criminalité et du terrorisme. Et bien qu’il cherche, de manière quasi-obsessionnelle, à contrôler et à raisonner ses peurs, elles le rattrapent toujours, même dans son quotidien hautement sécurisé.
C’est carrément de façon maniaque qu’il s’est tissé un cocon protecteur de bien-être, de vie saine, de médecine hautement performante et de technologies sécuritaires peaufinées. Jamais les hommes n’ont vécu plus libérés des risques. Jamais plus en sécurité. Pourtant, cela ne sert à rien. Nous n’échappons pas à la peur. Elle détermine la planification personnelle de notre vie, les débats de société et l’action politique. Comme des mouches qui cherchent à se libérer d’une toile d’araignée, nous continuons à nous agiter dans la prison collante de nos phobies. (…)
Le projet de l’époque moderne, lancé autrefois pour libérer l’homme de l’irresponsabilité et de la peur, menace d’échouer à cause de son succès. Privé de ses systèmes traditionnels de maîtrise de la peur [l’auteur fait allusion aux religions NDLR], l’individu libéré et émancipé de l’époque moderne se bat dans les chaînes de ses phobies. Et, dans ses efforts désespérés pour retrouver cette sécurité dont il s’est lui-même privé, il en noie le dernier reste dans l’anarchie et la liberté des prescriptions, des interdictions et des réglementations ».