L’écriture des Papillons jaunes à Caupenne-d'Armagnac

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Avec Françoise Vignet, poète

Avec des exercices très simples, Françoise Vignet réussit, avec une grande facilité, à faire écrire et dire à chacun le fond – ou une partie du fond – de sa pensée. C’est facile, car on n’invente rien, quand on exprime ce à quoi l’on tient.

Mercredi 11 septembre, Les papillons jaunes s’installent à Caupenne-d’Armagnac, sous la tonnelle naturelle formée par les platanes, entre la salle des fêtes et la mairie. Françoise Vignet (1) donne d’abord un texte à lire. Un conte d’Henri Gougaud, Le Maître du jardin. Un roi est convaincu qu’il obtiendra l’immortalité, en tant que maître du jardin, si un fameux rosier fleurit enfin. Tous les jardiniers échouent et sont condamnés. Mais survient un jeune jardinier qui relève le défi. Il cajole le rosier tant et tant, qu’un grand ver parasite sort des racines. Et le rosier fleurit. Puis le roi meurt, très déçu. Le jardinier lui dit alors que c’est lui, le jardinier, qui est le maître du jardin, car il aime le rosier.

Violence et douceur

Il est demandé aux Papillons de faire deux listes : une de mots évoquant la violence, représentée par le roi, et une de la douceur et de l’amour, représentés par le jardinier. Les listes, lues à haute voix, sont diverses. Pourtant, certains mots reviennent plusieurs fois, comme « mensonge », pour la violence. Question du rédacteur de ces lignes : les personnes qui ont choisi ce mot, ont-elles été victimes de calomnies ? Le mot supériorité émerge aussi, allié à la violence, mais une seule fois.

Dans la liste douceur-amour, nous remarquons les mots « accepter, souffrir et intérioriser ». Sont-ils choisis par une personne qui a dû beaucoup prendre sur soi ?

Dans mon pays, dans mon jardin…

Un deuxième exercice consiste à écrire « à la manière de » René Char et Tahar Ben-Djelloun (2), ce que l’on « voit » dans son pays, son jardin imaginaire. Françoise Vignet s’y soumet. Merci à elle de nous autoriser à publier ce premier jet d’un texte qui pourrait bien être un nouveau poème. Nous ne donnons pas les textes des Papillons, mais, à titre d’exemple, nous donnons notre propre essai (3).

Dans presque tous les textes qui ont été écrits, chaque Papillon se livre un peu ou beaucoup en décrivant un monde existant ou rêvé où il se sent bien. Une personne n’a rien écrit, deux autres ont écrit un texte – apparemment - sans lien avec un pays imaginaire. Peut-être ont-elles une certaine réticence, compréhensible, à se livrer...

Le texte de Françoise Vignet

Dans mon pays

      le silence n’est pas tranchant.

      On le préfère souple ; épais mais transparent, enveloppant comme une étole pour les dos courbés, les épaules lasses, les corps douloureux.

      S’il vous encombre, il s’éclipse lui-même.

Dans mon pays

      assaillir de questions ne viendrait à l’esprit de personne. On y couperait court par un grand éclat de rire.

Dans mon pays

      il arrive que l’on creuse des oubliettes profondes pour y jeter, non sans les avoir tamisés, les souvenirs détestables, car il faut laisser sa place au présent.

      Et ce qui restera dans le tamis sera le terreau d’un poème.

Dans mon pays

      si la beauté manque, on la crée.

      La faim est toujours invitée.

(1) Voir présentation (https://lejournaldugers.fr/article/37335-francoise-vignet-poete-a-averon-bergelle).

(2) De Tahar Ben-Djelloun :

Dans mon pays

on ne prête pas

on partage.

Un plat rendu

n’est jamais vide ;

du pain

quelques fèves

ou une pincée de sel.

De René Char :

Dans mon pays, les tendres preuves du printemps et les oiseaux mal habillés sont préférés aux buts lointains. (…)

Dans mon pays, on ne questionne pas un homme ému. (…)

Bonjour à peine, est inconnu dans mon pays. (…)

Il y a des feuilles, beaucoup de feuilles, sur les arbres de mon pays. Les branches sont libres de n’avoir pas de fruits. (…)

Dans mon pays, on remercie.

(3) Dans mon pays lointain

        on appelle un chat un chat

        on ne prend pas la mouche

        on ne prend pas la part du lion.

Dans mon pays lointain

        on espère en l’avenir

        on est loyal.

Dans mon pays lointain

        on pardonne les erreurs

        on fait confiance.

Dans mon pays lointain

        l’amour vaut plus que l’argent

        on apprécie le silence

        la mort fait partie de la vie.

1 Françoise Vignet et Solange Collado 1bis 110919.jpg
1 Françoise Vignet et Solange Collado 1bis 110919.jpg
2 Françoise Vignet  1bis 110919.jpg
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6 Aparté avec Françoise Vignet 1bis 110919.jpg
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