« La vérité de demain se nourrit de l’erreur d’hier » disait l’aérien Antoine de Saint-Exupéry lorsqu’il décida de regagner la Terre des hommes. Et en matière d’erreur, la question de l’aéroport controversé de Notre-Dame-des-Landes est un exemple du genre avec cinquante ans d’errements, de tâtonnements et d’atermoiements. Tout porte à croire que le Premier Ministre, Édouard Philippe, a beaucoup appris puisque c’est avec courage qu’il vient de clore, le 17 janvier dernier, cette interminable saga. La décision prise est réjouissante et gageons qu’elle augure, enfin, l’abandon des projets pharaoniques et hors sol pour un retour bienvenu sur la terre des hommes.
Il faudra néanmoins que les citoyens, les deux pieds ancrés au sol, demeurent vigilants. En effet, face visible de l’iceberg, l’État devra indemniser le groupe Vinci suite à l’abandon du projet. A priori, rien à redire. Face cachée, le même groupe Vinci, n’a pas manqué, à de multiples reprises, de manifester son intérêt pour le rachat, encore hypothétique, de parts de la société Aéroport de Paris (ADP) si l’État se décidait à vendre et à perdre son statut d’actionnaire majoritaire. Et là, dans les pas d’Augustin de Romanet (président d’ADP), il y aurait beaucoup à redire. Vendre ce fleuron des transports, qui plus est particulièrement rentable, serait une double hérésie. Espérons donc que sur ce sujet, le Premier Ministre ait également appris des erreurs du passé. Si sa mémoire chancelle, il dispose d’un exemple récent en la vente de l’aéroport de Toulouse par le gouvernement de Manuel Valls. Malgré l’opposition des élus locaux, l’État d’alors, pour quelques monnaies sonnantes et trébuchantes s’était vendu à un consortium privé. Las, avec la complicité étatique, ledit consortium vide les caisses sans s’intéresser à ce bien qui aurait dû demeurer public. Les Ministres de l’Économie de l’époque, Arnaud Montebourg puis son successeur, un certain Emmanuel Macron, auraient pourtant dû savoir que la Ville rose entretient avec l’aviation un rapport quasi-charnel. Pourtant, Carole Delga, députée de Haute-Garonne et alors secrétaire d’État aurait pu les en avertir. Mais il est vrai que celle qui depuis est devenue Présidente de la région Occitanie ne semble pas apprécier l’avion.
En effet, Carole Delga aime le train. Et pas n’importe quel train. Celle qui a gravi les échelons de la politique à la vitesse du Concorde, ne goûte guère le train de sénateur, ni celui des lignes secondaires. Carole Delga aime aller vite et désire avec ardeur sa Ligne Grande Vitesse reliant Bordeaux à Toulouse. Voilà encore un projet à plusieurs milliards d’euros défendu au détriment des terres agricoles, de l’environnement et du réseau ferroviaire lui-même. Tout cela pour gagner une heure de trajet…et fragiliser l’aéroport. Quand est-ce que nos dirigeants prendront soin de l’existant et préféreront-ils maintenir et réhabiliter les réseaux qui desservaient nos territoires plutôt que de mener des projets somptuaires avec la capitale pour seul point de mire ? Au lièvre dispendieux, optons davantage, avec la revue Limite, pour l’esprit de l’escargot.
Mais revenons à nos moutons et à ce lien historique de Toulouse et de l’avion. Ce lien se noue dès le début du XXème siècle, à l’époque où Jean Mermoz et Antoine de Saint-Exupéry séjournaient à l’Hôtel du Grand Balcon, époque des prémisses de l’aéropostale. Cette compagnie fut fondée au lendemain de la première guerre mondiale par un ingénieur bigourdan dont le nom parlera à de nombreux Gascons : Pierre-Georges Latécoère.