Lupiac – Les parfums exquis de Louis XIV

Scan Illustration mode Grand siècle 1bis principale.jpg

Un spécialiste les a reconstitués pour le Festival d’Artagnan le 14 août

Mis à jour le 21 août 2016 avec le conférencier

André Chauvière (né en 1945) a fait toute sa carrière dans l’industrie et l’artisanat du parfum. Sous l’habit de l’apothicaire du Grand siècle, il a présenté les plus exquises fragrances de l’époque de Louis XIV, reconstituées par lui-même, tout en expliquant leur composition. Et, avec son épouse, également en vêtements d’époque, il a proposé aux chalands plusieurs parfums reconstitués de cette époque, comme « l’eau d’ange du parfumeur royal ». Puis, dans l’après-midi de cette belle journée, il a prononcé une conférence sur ces parfums.

Il y a eu un tournant considérable au XVIIe siècle dans la fabrication des parfums : le mariage des arômes et de l’alcool, dont la distillation a pris de l’ampleur à la fin du XVIe siècle. Et le conférencier de faire sentir par son public des bandes de papier imprégnées successivement d’ambre gris, de musc et de civette, trois fragrances de base. L’ambre gris est issu de déjections des cachalots, le musc est extrait des glandes porte-musc du chevrotain – un cervidé de Sibérie. Quant à la civette, elle porte des glandes similaires à l’odeur de musc et de fleurs. À l’époque, on la comptait parmi les chats sauvages et on en faisait l’élevage aux Pays-Bas.

L’eau d’ange du parfumeur royal

Et voilà qu’arrive en France venant d’Italie, sous le terme générique "d'eaux d'ange" -  un symbole de la Renaissance italienne - cette « eau », connue en France  sous le nom « d’eau d’ange du parfumeur royal ». Elle allie aux matières citées ci-dessus du benjoin, du storax et des épices comme la cannelle et la muscade. Le benjoin et le storax sont issus de grands arbres (ou baumiers) d'Extrême-Orient ( ce sont des résines sous forme de "larmes") reçus par échange de cadeaux entre souverains. Les seigneurs et les dames « de condition » (nobles) en appliquent sur leurs gants, leurs habits et leur peau.

Un grand nombre de parfums imitant cette eau d’ange sont créés. Un autre parfum de l’époque est digne d’intérêt : c’est « l’eau d’ange vénitienne », proche de l’eau d’ange du parfumeur royal, mais avec une addition d’eau de rose. Le conférencier cite aussi « l’eau de rose musquée », fabriquée avec des roses de Damas, d’où l’on extrait encore aujourd’hui les huiles essentielles pour la parfumerie.

Ces parfums mûrissent comme des grands vins

Jusqu’à la moitié du XVIIe siècle, c’était les apothicaires (pharmaciens de l’époque) qui fabriquaient les parfums. Mais ensuite, avec l’arrivée du citron et des fragrances de citron, de cédrat et d’orange, ce sont les maîtres distillateurs-limonadiers qui s’en chargent. La mode est alors à ces « eaux fraîches » aux parfums d’agrumes, comme « l’eau sicilienne odorante » qui contient du safran, du jasmin, du cédrat etc.

André Chauvière explique que les bons parfums évoluent avec le temps et s’améliorent avec les années, comme les vins de garde.

L’eau de la reine de Hongrie

Une supercherie littéraire a été, selon le conférencier, la légende de l’eau de la reine de Hongrie, à base, à son origine au XVe siècle, de romarin. C’était censé être la panacée. La Cour a espéré que cette eau – arrivée en France en 1669 - guérirait les nombreux maux dont souffrait le roi. Cette rumeur a provoqué un développement considérable de cette « eau », additionnée de sarriette, de sauge, de marjolaine etc.

André Chauvière termine en parlant de l’eau de Cologne. Selon lui, son origine est lointaine, puisque ce serait une eau de l’empire de Byzance, réapparue d’abord avec Catherine Sforza sous le nom « d’eau merveilleuse et divine » (aqua mirabile et divina). Elle contenait de la bergamotte, des agrumes et de l’alcool.

Cette conférence a permis aux auditeurs d’André Chauvière d’aborder un thème enchanteur, mais réservé à des spécialistes.

Un grand spécialiste des parfums

Ingénieur chimiste de formation, André Chauvière passe l’année 1970 dans le raffinage du pétrole. Mais il a l’occasion d’entrer dans une entreprise de parfumerie qui se crée en Suisse en 1971. Or, il habite à Évian, tout près de la frontière suisse. Désormais, son métier, c’est diriger le laboratoire qui analyse les matières premières des parfums pour s’assurer de leur innocuité (1). Parenthèse : les arômes alimentaires et les parfums ont des troncs communs dans leur composition chimique. Il participe aux réunions internationales de l’industrie des parfums et des arômes, qui est en charge de gérer les éventuels problèmes.

Puis André Chauvière est chargé de rechercher dans les textes anciens la composition des parfums d’autrefois. Il se plonge dans cette tâche. Mais en 1990, son entreprise est rachetée et il doit quitter son labo pour un travail administratif. Il décide alors de créer sa propre entreprise de fabrication artisanale de parfums, Profils olfactifs. Il en est à la fois le patron et le personnel. Il a permis à ses auditeurs de humer des parfums très distingués.

Notre conférencier va bientôt habiter dans le Gers, près de Jegun.

À noter que c’est grâce à l’historienne Odile Bordaz, la spécialiste de d’Artagnan, qu’il est venu au Festival. Ils se sont rencontrés aux Journées de la rose organisées à l'abbaye royale de Chaalis (près de Senlis) par l’Institut de France, où André Chauvière intervenait.

(1) Par exemple, certaines pourraient provoquer une photosensibilisation de la peau (réaction exagérée de la peau exposée au soleil).

 

36 André Chauvière pendant sa conférence 1bis 140816.jpg
36 André Chauvière pendant sa conférence 1bis 140816.jpg
36bis Les flacons de la conférence et les bandes de papier tests 1bis 140816.jpg
36bis Les flacons de la conférence et les bandes de papier tests 1bis 140816.jpg
24 André Chauvière humant une de ses compositions 1bis 140816.jpg
24 André Chauvière humant une de ses compositions 1bis 140816.jpg
25 André Chauvière analyse la composition 1bis 140816.jpg
25 André Chauvière analyse la composition 1bis 140816.jpg
26 André Chauvière commente la composition 1bis 140816.jpg
26 André Chauvière commente la composition 1bis 140816.jpg
Scan Illustration mode Grand siècle106.jpg
Scan Illustration mode Grand siècle106.jpg
Publicité
Suggestion d'articles
Suggestion d'articles