Après une récolte de céréales parmi les plus faibles de ces quarante dernières années, des épidémies de fièvre catarrhale ovine (FCO), maladie hémorragique épizootique (MHE) ou encore influenza aviaire (canards et avifaune) et des prix qui ne couvrent toujours pas les coûts de production, la signature de l’accord commercial avec les pays du Mercosur serait la goutte d’eau qui ferait déborder le vase.
Cet accord porterait un nouveau coup de semonce à l’élevage bovin allaitant, déjà en grande difficulté dans nos côteaux gascons, du fait d’une faible création de valeur ajoutée et d’un revenu agricole peu élevé, extrêmement dépendant aux soutiens publics. Alors que cette production se retrouve à la croisée des chemins, la signature d’un traité de libre-échange avec le Mercosur se traduirait bel et bien par une insulte faite à des milliers d’éleveurs. En premier lieu, cet accord continuerait à tirer les prix vers le bas, il se traduirait par une plus grande concurrence entre éleveurs européens et sud-américains. Ainsi, l’élevage bovin allaitant constituerait une variable d’ajustement, voire une « corbeille de mariée » pour permettre l’accès d’entreprises européennes aux marchés publics canadiens et sud-américains.
Ne nous trompons pas d’ennemis, à l’heure où reprennent les manifestations d’agriculteurs, l’heure n’est plus à la tergiversation : le Parti communiste français exige que la France et l’Europe refusent clairement le traité de libre-échange avec les pays du Mercosur. Défenseurs de longue date d’une exception agricole dans les accords commerciaux, les communistes sont convaincus que les biens agricoles ne sont pas des marchandises comme les autres. C’est ce qui a conduit le député PCF André Chassaigne à initier une tribune transpartisane signée par 209 parlementaires de tous bords, refusant la ratification de l’accord avec le Mercosur.
Néanmoins, l’accord commercial avec le Mercosur n’est pas le seul mot d’ordre des agriculteurs en colère. Comme membre de la commission agricole d’Occitanie et Président de la commission eau et risques j’en appelle au dépassement des problèmes structurels que connaît l’agriculture française. La transformation agroécologique de notre agriculture engagée par nos paysans demandera des filets de sécurité publics (prix garantis, régime public d’assurance et de gestion des risques, refus des traités de libre-échange etc.), une formation exigeante et un accompagnement des producteurs. Face aux effets toujours plus spectaculaires du dérèglement climatique et à un contexte géopolitique incertain, il est indispensable de sécuriser les investissements et les revenus des producteurs. Telles seraient les conditions nécessaires pour relocaliser notre agriculture et produire durablement de quoi permettre à chacune et chacun de manger sain et à sa faim.
L’heure est aussi au dialogue entre les exploitants en colère et les autres travailleurs en lutte, eux aussi victimes des ravages quotidiens de la mise en concurrence entre travailleurs, du développement de groupes monopolistes, de l’abandon des pouvoirs publics, de la perte criante de souveraineté alimentaire et industrielle ou encore des privations matérielles, notamment sur la manière de s’alimenter. La fédération du Gers du PCF tend donc la main à tous ces travailleurs et travailleuses et souhaite prendre sa part dans la nécessaire convergence des luttes.
Eric Cadoré, Secrétaire départemental, Fédération du Gers du PCF