Dernier marché de nuit de l'été, veille du 15 août, les anciens sont assis place du kiosque.
« C'est vrai, aujourd'hui, nous avons les marchés de nuit mais que sont devenues les grandes foires comme celle du 16 août ? » déclare d'un d'eux.
Effectivement, la foire du 16 août de Vic-Fezensac remonte loin dans le temps puisqu'on en trouve la trace dans l'annuaire du Gers en 1874.
Les points de vente de la foire se répartissaient sur toute la ville : le bétail place Mahomme, les moutons au Barry, les chevaux derrière l'église, les porcs sous les grands ormes.
Les souvenirs jaillissent...
Petits gris
Les orages d'été étaient plus fréquents qu'aujourd'hui et on utilisait moins de pesticides, on pratiquait beaucoup moins l'écobuage et les escargots étaient nombreux sur les peyrusquets.
Après la plus petite averse, on partait à la chasse et on plaçait « les petits gris » au grenier en prenant soin de dresser une muraille de cendre pour éviter les évasions.
On les arrosait de temps en temps pour les faire « corner » et qu'ils se nourrissent de la farine de maïs qu'on leur donnait.
Après avoir gardé la quantité nécessaire pour les escargolades familiales, on mettait le reste à la vente pour la foire du 16 août.
Ainsi, il y avait de nombreuses caisses de gastéropodes que venaient acheter les restaurateurs car cette foire aux escargots était réputée.
Les furets
Les transactions se faisaient sur les peyris, les marches en face le kioque où se tenait un autre point de vente, celui des furets.
Avant l'arrivée de la myxomatose, le lapin pullulait au point d'être considéré comme nuisible.
Et comme le tir au fusil était coûteux et qu'on n'achetait pas toujours le permis de chasse, on avait recours au furet, petit mustélidé voisin du putois.
On le glissait dans les galeries et il allait débusquer le lapin qu'on capturait dans une bourse.
Par conséquent, des éleveurs proposaient dans des cages grillagées des familles de furets, des blancs peu cotés et des putoisés plus combattifs.
Les transactions d'achat portaient sur le prix mais surtout sur le comportement de l'animal.
En effet, le furet possède des dents aigües. Le vendeur s'efforçait donc de montrer qu'il était « gentil » et il le promenait sur son bras, présentait ses doigts devant sa gueule. L'acheteur était alors conquis et l'animal était mis dans une poche en tissu.
Titin ou Titine – car tels étaient le nom de baptême selon le sexe - étaient d'excellents auxiliaires de chasse et contribuaient à améliorer la quantité de protéines dans la marmite familiale.
Des choux et du bétail !
Se vendaient également des centaines de plants de choux car ce légume était la base avec la pomme de terre et le haricot sec des soupes d'hiver.
De plus, au printemps, on se régalait des « broûtes », repousses nées sur les pieds de choux laissés en terre. On repiquait ces plants de choux le plus près de la mare car il fallait les arroser très souvent.
Le bétail était en grand nombre au foirail, place Mahomme. Il était conduit à la foire par des spécialistes « les toucadous » .
En entrant en vile, ils étaient bénis par le curé.
Le choix ne manquait pas pour l'acheteur qui arpentait les allées de la foire.
Mais au-delà des marchandises, cette foire d'août était avant tout une ambiance, un état d'esprit...une âme.
Pierre DUPOUY
Photo archives Sud-Ouest Pierre Dupouy