Un véritable trésor dans le Gers.
Le département du Gers regorge de trésors, dans tous les sens du terme. Les journées du Patrimoine peuvent être le prétexte à aller découvrir celui d’Elusa, constitué de milliers de pièces. Mais il existe un autre trésor que la plupart des gersois méconnaisses : saviez-vous que la ville d’Auch abrite la deuxième collection précolombienne de France ?
Deuxième collection précolombienne de France.
En 1979, le musée des Jacobins d'Auch avait simplement pris le nom de l’ancien couvent qui l’héberge. Mais le 12 octobre 2019, il fut rebaptisé Musée des Amériques-Auch.
En effet, si l’on y trouve des collections égyptiennes, et surtout des vestiges gallo-romains du département, ce lieu possède une spécificité qui en surprendra plus d’un : 40.856 objets qui proviennent d’Amérique, et qui constituent la deuxième collection précolombienne de France.
A travers tous les musées de France, il y aurait plus de 162 900 pièces liées aux civilisations américaines et leur histoire. Elles seraient réparties de la façon suivante : 61,5 % d’entre elles au musée du Quai Branly à Paris, 25 % à Auch et 13,5 % éparpillées dans 172 autres musées de l’hexagone.
Un musée exceptionnel.
Le musée des Amériques d’Auch est vraiment digne d’être visité. Il expose diverses collections. Pas seulement liées aux Amériques.
Il fait aussi la part belle à la Gascogne et ses traditions, avec des costumes d’époque, des œuvres d’artistes gascons des XVIIIe au XXe siècles, des collections lapidaires d’art du Moyen-Âge,…
Le musée d’Auch est un des plus anciens musées de France. Il fut créé sous la Révolution par un arrêté du Directoire du Gers, en date du 16 décembre 1793. Après plusieurs déménagements, il trouva sa place définitive dans les bâtiments de l’ancien couvent des Jacobins en 1979.
Sa vocation amérindienne lui vient d’un auscitain qui en fut le conservateur en 1911 : Guillaume Pujos.
Guillaume Pujos
Né à Auch le 8 août 1852, cet auscitain exerçait la profession de tailleur avant de s’exiler au Chili en 1879. Aventurier et amateur d’art, il s’intéresse très tôt aux vestiges des civilisations anciennes des terres qui l’accueillent. La variété des objets qu’il a rapporté à Auch indiquerait qu’il ait beaucoup voyagé sur l'ensemble de l'Amérique Latine au cours des années qu’il passa à Santiago. Il revint en France après le tremblement de terre qui frappa la capitale chilienne en 1906. Et il fut nommé vice-consul d’Espagne.
En 1911, Guillaume Pujos devient le conservateur du musée auscitain. Et il profite alors de son poste pour exposer les plus belles pièces de sa collection personnelle. À sa mort en 1921, il lègue ses collections par testament à la ville d’Auch, constituant ainsi le fonds historique des collections américaines du Musée des Amériques-Auch. On y trouve notamment des terres cuites des principales cultures archéologiques andines : Mochica, Nasca, Chimu, Chancay, Inca…
Les étapes jusqu’au Pôle national de référence.
Au fil des ans, et grâce à la clairvoyance des conservateurs successifs du musée (Henri Polge par exemple), les collections se sont étoffées. Il y a eu d'autre donateurs remarquables. En 1955, des pièces du musée des Eyzies de Tayac et du musée d'Annecy furent regroupées à Auch. Et puis il y eut la donation exceptionnelle de madame Lions en 2006, avec plus de 6500 pièces nouvelles.
Aujourd’hui, le musée d’Auch possède de nombreux objets d’art sacré latino-américain, avec des sculptures polychromes vêtues d’habits brodés, des tableaux de plumes, et des céramiques et bijoux de cultures pré-hispaniques du Pérou, d’Equateur ou bien encore du Mexique. Il y a des ensembles d’orfèvrerie vraiment remarquables, mais il y a surtout des œuvres de plumasserie très rares.
Plumasserie : La Messe de Saint Grégoire.
L’art de la plumasserie a joué un rôle majeur dans les sociétés précolombiennes. Les plumes précieuses revêtaient une dimension hautement symbolique. Elles étaient étroitement associées au monde céleste, aux dieux et aux mythes fondateurs. Malheureusement, en raison de leur grande fragilité, très peu de ces œuvres de plumasserie ont survécu jusqu’à nos jours. Quelque 180 plumasseries ou objets décorés de plumes de la Nouvelle Espagne ont pu être répertoriés dans le monde.
Curiosité : c’est au pays de d’Artagnan que l’on trouve l’un des plus beaux tableaux de plummasserie coloniale mexicaine conservé au monde. Daté de 1539, cette œuvre d’art est une réalisation en mosaïque de plumes selon une technique précolombienne encore pratiquée à l’époque coloniale. Il s’agit d’une tradition récupérée par les évangélisateurs du Nouveau Monde, un art « métis » unique et syncrétique.
Il fut présenté à Paris, du 18 mars 2008 au 19 juillet 2009, dans le cadre de l'exposition Planète Métisse au Musée du Quay Branly. La Messe de Saint Grégoire est probablement l’une des dernières productions des maîtres plumassiers aztèques, les Amantecas.
Plus que quelques jours. Exposition « Plumes des Amériques »
Depuis le 4 juin 2022, le musée des Amériques–Auch expose un autre tableau de mosaïque de plumes mexicain du XVIe siècle exceptionnel, provenant des collections du Musée Quai Branly. Il représente « le Christ bon pasteur et deux scènes de la vie de Saint Jean-Baptiste». Avec les sept autres plumasseries de la collection auscitaine, il forme l’un des plus beaux ensembles mondiaux jamais constitué. L’exposition se termine le 25 septembre 2022. Ne serait-ce que pour ça, il faut donc aller au musée d’Auch.
Un ouvrage de divulgation jeunesse.
Rosy Franciel, Laetitia Leineinger ou bien Emilie Peyroulet, au musée des Amériques, tout le monde est conscient de la valeur de ce trésor qui n’attend que les visiteurs pour honorer la grandeur des peuples indigènes du Nouveau Monde. Afin de les faire connaître au plus grand nombre de personnes, et notamment au public jeune, le conservateur en chef du musée des Amériques Fabien Ferrer-Joly, et son équipe se sont lancés dans un projet de réalisation de livre de divulgation dédié aux plus jeunes.
En fait il n’existe que très peu d’ouvrages sur les arts préhispaniques pour ce public. La réalisation de ce livre et sa mise en vente à la boutique du musée à l’occasion des Journées européennes du Patrimoine constitue donc un évènement qui mérite notre attention.
Chepec. L’âme des moches.
« Il y a fort longtemps, par delà les siècles et les océans, vivait sur l’actuelle côte péruvienne un jeune pêcheur prénommé Chepec. Un matin, celui-ci remonta dans ses filets des mullus. Des coquillages, blancs dehors, rose dedans, très rares dans la région. Si rares qu’ils constituent en réalité un terrible présage pour sa communauté. Pour sauver son peuple des ravages annoncés, Chepec se lance dans une aventure pleine d’épreuves et de dangers. Pour triompher, il devra traverser les trois mondes de la cosmologie andine ( les mondes souterrain, terrestre et céleste), affronter la nature et les éléments (la mer, le désert, la rivière, les montagnes, les bêtes sauvages…) et faire quelques fois le don de soi. »
A la découverte de la civilisation des Mochicas.
Cet ouvrage est le fruit d’un travail mené avec Peggy Bonnet Vergara (auteure) et Alejandra Rinck Ramirez (illustratrice) en collaboration avec l’équipe du musée. Il est né du souci de valoriser auprès du jeune public les collections précolombiennes présentes à Auch, en particulier les objets issus de la civilisation mochica (Pérou).
L’ouvrage permet ainsi aux enfants d’aborder les pièces de cette collection par le biais d’un récit illustré racontant les aventures d’un héros imaginaire, Chepec. Son périple est le prétexte à la découverte d’objets sacrés, d’un site archéologique, la Huaca de la Luna, et de personnages mythologiques comme la divinité Ai-Apaec.
Le dossier pédagogyque présent en fin d’ouvrage offre des explications plus approfondies sur la civilisation mochica et les objets s’y rapportant.
Ce petit livre en couleurs de 36 pages est dédié à un public de 6 à 10 ans. Mais les grands peuvent aussi l’apprécier.
Prix public : 14 euros (ISBN : 978 2 9580190)
Peggy Bonnet Vergara.
Historienne de l’art et auteure jeunesse, Peggy Bonnet Vergara est originaire de Marseille et vit dans un village près de Marciac. Après des études en Histoire de l’art, elle a voyagé et vécut notamment en Nouvelle Calédonie où elle a créé ses premiers ouvrages de divulgation pour les enfants.
Sur les pas d’un peintre cubain.
Après un DEA en Histoire, critique et conservation de l’art à la Sorbonne, c’est en 2006 qu’elle obtint à l’université de Paris Nanterre son Doctorat, se spécialisant sur l’œuvre du peintre cubain Wilfredo Lam (1902-1982).
Par la suite, elle a vécut quelques années à l’autre bout du monde, à Nouméa, où elle publia ses premiers ouvrages de divulgation, en lien avec l’univers philatélique calédonien. Des ouvrages sur la culture kanak, sur la faune et la flore de l’Océanie,… En 2011, elle débuta comme autrice jeunesse avec « A la découverte de la Nouvelle Calédonie » au Editions du Cagou. Elle sera ainsi l’autrice de plusieurs livres visant à faire découvrir, aux petits et aux grands, les arts d’ailleurs en s’amusant. Ainsi suivirent « L’Énigme du bambou gravé », aux Editions L’Attrape-rêve, et « Mon petit Facko. L’art Kanak et océanien à la portée des enfants », édité par l’Agence de Développement de la Culture Kanak – Centre culturel Tjibaou, Nouméa en 2012.
Installée dans le Sud-Ouest depuis une dizaine d’années, c’est à travers son agence d’édition et de communication « Caouanne », créée en janvier 2013, qu’elle revient à la création d’ouvrages dédiés à la jeunesse, avec CHEPEC, pour le Musée des Amériques-Auch. Dans ce projet, elle s’est associée à Alejandra Rinck Ramirez pour les illustrations du livre.
Alejandra Rinck Ramirez
Son travail créatif est multiforme : architecture, peinture, installations et illustrations. Elle aussi a une solide expérience dans l’univers des livres jeunesse. Une expérimentation permanente, esthétique et conceptuelle.
D’origine chilienne, elle cherche au travers de ses œuvres à mettre en valeur depuis quinze ans le patrimoine culturel de la Nouvelle-Calédonie, pays de ses enfants.
Musée des Amériques-Auch : 4 place Louis Blanc.
Entrée du public : 9 rue Gilbert Brégail
Tél : 05 62 05 74 79
E-mail : [email protected]
Site internet : www.ameriques-auch.fr
Horaires d’ouverture : D’avril à septembre, ouvert tous les jours de 10h à 12h15 et de 14h30 à 18h
D’octobre à mars, ouvert tous les jours de 10h à 12h15 et de 14h à 17h15 (sauf jours fériés) - Fermeture annuelle au mois de janvier - (Fermeture de la billetterie 40 minutes avant celle des portes)
Pour en savoir plus sur l’histoire de ce musée et « CHEPEC »
Référence électronique: Fabien Ferrer-Joly, « Le musée des Jacobins d’Auch. Vers la création d’un Pôle national de référence », Les nouvelles de l'archéologie [En ligne], 2017, consulté le 17 septembre 2022. URL : http://journals.openedition.org/nda/3756