Opposition au parc photovoltaïque de Vic-Fezensac : les précisions des associations porteuses du recours

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Nous avons publié hier le communiqué de trois associations environnementales qui s’opposent au projet de construction d’un parc photovoltaïque sur le lieu-dit Carget à Vic-Fezensac.

https://lejournaldugers.fr/article/54202-destruction-despeces-protegees-pour-un-parc-photovoltaique-les-associations-deposent-un-recours

Nous avons voulu en savoir plus sur ce recours et avons échangé avec Hervé Hourcade, juriste au sein de l’association France Nature Environnement Midi Pyrénées, qui porte le recours des trois associations devant le tribunal administratif de Pau ainsi qu'avec Jean-Paul Dugoujon, représentant du Gers pour France Nature Environnement Midi Pyrénées.

Journal du Gers : Votre association qui milite pour la protection de l’environnement s’oppose à un projet d’ENR (Energie renouvelable), cela peut surprendre le profane en la matière ?

Hervé Hourcade : Notre position sur la production d’ENR est claire : on ne doit pas mettre en péril la biodiversité pour produire des énergies renouvelables.

Notre position est conforme au rapport de juin dernier du programme des Nations Unie (IPBES – GIEC) (1) : on ne peut pas répondre à l’urgence climatique par une aggravation de la dégradation de la biodiversité, c’est un non-sens.

On conteste peu les projets ENR mais on est vigilant à leur sujet dans le cadre de notre participation en tant qu’association aux enquêtes publiques ; ces projets sont soumis à des procédures environnementales (évaluation environnementale, consultation du public).

Journal du Gers : Quels sont les motifs de votre recours ?

Hervé Hourcade : La raison de notre recours n’est pas la dimension du projet qui serait démesurée, ce qui n’est pas le cas ici.

Sur ce dossier, on a fait le choix d’aller au contentieux car c’est un parc qui va conduire à la destruction de plusieurs espèces protégées

La zone choisie est partagée entre un site naturel et un site agricole qui comportent plusieurs réseaux de haies et des prairies qui avaient été pâturées par des chevaux à un moment.

Cet espace abrite des espèces protégées dont des papillons, des oiseaux, etc

D’autres lieux peuvent être choisis parmi un « gisement » de sites au sol dit « dégradé », c’est-à-dire des sols déjà artificialisés comme d’anciennes décharges, des zones militaires, des parkings… Ce gisement est suffisant en France pour répondre à la politique pluriannuelle de l’énergie (PPE) selon une étude de l’ADEME datant de 2018 (2).

Journal du Gers : Etes-vous optimiste quant à l’aboutissement de votre démarche ?

Hervé Hourcade : Nous avons bon espoir en raison de jurisprudences en la matière.

Dans le code de l’environnement, quand on détruit des espèces protégées, il existe une obligation de répondre à certaines conditions qui ne sont  pas remplies ici.

Il faut tout d’abord que le porteur de projet démontre qu’il n’a pas la possibilité d’implanter l’équipement à un autre endroit, ce qui n’est pas le cas ici : nous estimons que la recherche n’a pas été suffisamment sérieuse de la part du promoteur et de l’administration.

D’autre part, il faut que le projet réponde à ce que l’on appelle en jargon juridique « une raison impérative d’intérêt public majeur ».

En clair, pour pouvoir déroger au principe d’interdiction de destruction d’espèces protégées, principe du droit français depuis 1976, il faut qu’on ait un équipement qui soit d’une importance telle qu’il puisse être mis en balance avec la protection de ces espèces-là.

Ce n’est pas le cas ici.

Ce non-respect des conditions requises est l’élément majeur de notre argumentaire.

A cela s’ajoute l’insuffisance des mesures environnementales comme l’avait d’ailleurs souligné l’avis défavorable du Conseil scientifique régional de protection de la nature (CSRPN) d’Occitanie.

Journal du Gers : Comment va se dérouler la procédure ?

Hervé Hourcade : Pendant toute la durée de la procédure, nous allons échanger des mémoires avec les services de la préfecture du Gers et le porteur de projets, la société CPV Sun 40, filiale de la société Luxel.

Les travaux pourraient commencer bientôt.

Or, un recours n’est pas suspensif.

Nous pourrons donc être amenés à déposer un recours en urgence si les travaux commencent pour que le juge statue rapidement.

Pour Jean Paul Dugoujon représentant du Gers de FNE Midi Pyrénées, une solution alternative existe, ne portant atteinte ni aux espèces protégées, ni aux surfaces agricoles et rendant possible ce projet.

« La solution serait la recherche d'une coopération sur la commune entre entreprises, collectivités et le porteur de projet, la société CPV Sun 40.

Cette entente permettrait de trouver l'équivalent en surfaces, pour implanter des panneaux photovoltaïques sur les toitures ou parkings des bâtiments existants dans ce secteur.

Un regard sur la vue aérienne de Vic Fezensac fait apparaître des possibilités, comme l'usine de Gerstube, les bâtiments derrière les arènes, l’hôpital... Encore faut-il avoir la volonté de le faire. »

Affaire à suivre ...

https://ipbes.net/sites/default/files/2021-06/20210609_workshop_report_embargo_3pm_CEST_10_june_0.pdf

https://librairie.ademe.fr/energies-renouvelables-reseaux-et-stockage/846-evaluation-du-gisement-relatif-aux-zones-delaissees-et-artificialisees-propices-a-l-implantation-de-centrales-photovoltaiques.html

 

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