Jusqu'à présent, les rillettes vous évoquaient inévitablement la ville du Mans et la Sarthe, dorénavant, il faut faire rimer rillettes avec Aubiet. En effet, lors du dernier salon de l'agriculture à Paris, les experts pour le concours des produits divers ont mis le Gers à l'honneur avec de nombreuses médailles dont cinq en or [1]. Mais ils ont aussi récompensé les producteurs aubiétains, l'un avec une médaille d'or, l'autre par une médaille d'argent.
Le Journal du Gers est parti à la rencontre de ces deux lauréats. Pour trouver la première exploitation, idéalement située, en bord de route, sur la gauche, entre Aubiet et Nougaroulet, aucun problème, un panneau nous signale qu'il faut s'arrêter car nous sommes arrivés chez un producteur d'oie. Pour rejoindre la ferme d'En Sigues, il faudra plus de concentration et bien suivre le flèchage pour arriver au sommet d'une colline avec un de ces paysages en surplomb qui font la renommée de notre département.
La Ferme d'En Cagalin et Gersement Bon !, deux noms pour un couple bourré d'idées et de projets.
Après avoir pendant trois ans, cumulé deux activités, Arnaud Chotard a finalement abandonné son métier d'élagueur pour se consacrer à l'élevage de canards et d'oies. Pour cela, il a crée son exploitation agricole sous le nom de Ferme d'En Cagalin ; en effet, ni lui, ni sa femme Carine, n'avaient de lien avec le monde agricole. Originaire d'Aubiet, Arnaud Chotard y a trouvé un champ, sur lequel il a construit sa maison qui, si on ne le sait pas, donne au visiteur l'impression d'être bien ancrée sur place, alors que c'est en fait une création de la décennie actuelle, comme l'annexe avec le laboratoire et le magasin de vente.
Au début donc, il s'agissait d'un élevage avec gavage et transformation de canards et d'oies. Avec un terrain de moins de deux hectares, il fallait choisir entre canards et oies, impossible de mélanger les deux ; en conséquence, ils ont choisi l'élevage d'oies pour se démarquer, le nombre d'éleveurs d'oies étant moindre sur le département.
Pour pouvoir se diversifier et transformer les produits d'autres agriculteurs, une autre société a été constituée. La Sarl Chotard, avec son enseigne "Gersement Bon !", a donc pour but la fabrication et la commercialisation de plats cuisinés. L'activité de traiteur prenant de plus en plus d'ampleur, il a fallu encore faire des choix. En premier, celui d'arrêter le gavage des canards livrés maintenant en carcasses. Pour le gavage des oies, Arnaud et Carine hésitent encore, faut-il continuer ou pas ? Le gavage est très contraignant et la transformation des produits prend aussi beaucoup de temps. Pas toujours facile de concilier les deux ! Par contre, le couple élève des oies en volailles festives, donc elles ne sont pas gavées, ce qu'ils continueront de faire. Achetées à un jour, début avril, ils les élèvent pendant huit mois jusqu'à mi-décembre pour les vendre à rôtir en fin d'année.
Récemment installés, n'étant pas du milieu agricole, sans clientèle attitrée au départ, il faut communiquer beaucoup plus que d'autres, se mettre plus en avant pour développer la structure et se constituer un fichier de clients, d'où une présence sur les réseaux sociaux [2]. Un site marchand existait mais imparfait, puisqu'un nouveau est en cours de création. D'ici quelques jours, on retrouvera Gersement bon en vitrine sur Internet - http://www.gersementbon.fr - et, au début de l'été, le nouveau site marchand sera opérationnel pour que les acheteurs puissent passer commande et payer en ligne.
Pour se faire connaître, la participation à des salons est aussi nécessaire. Ainsi, en début d'année, avec une douzaine de professionnels gersois, ils ont participé au salon du mariage dans la capitale. Le but était d'inciter les parisiens à découvrir le département et à le choisir comme lieu de mariage.
Mais le seul salon incontournable est celui de l'Agriculture si l'on veut décrocher des médailles qui sont un gage de reconnaissance et une récompense du travail effectué. Pour participer le producteur détermine le ou les produits qu'il veut faire concourir. Des représentants du Salon de l'agriculture viennent sur place, choisissent, dans le stock, trois échantillons de chaque produit, les scellent dans un carton et ensuite ils sont envoyés à Paris.
Arnaud et Carine Chotard participent tous les ans maintenant et ils sont régulièrement récompensés surtout avec leur rillettes d'oie puisque, si cette année, ils ont eu l'argent, l'année dernière, c'était l'or. Mais distinction aussi en 2017, avec une médaille d'argent pour leur foie gras d'oie. Peut-être à nouveau, une médaille pour ce foie gras, l'année prochaine, c'est ce qu'ils espèrent et ce que nous leurs souhaitons.
La Ferme d'En Siguès de Perre Lava, une toute autre histoire !
Rien de comparable avec la précédente. En effet, cinq générations ont précédé Pierre Lava sur cette ferme. En outre, il s'agit d'une exploitation agricole de 100 ha sur laquelle est produit,entre autres cultures, notamment le maïs blanc qui va servir au gavage des canards.
À l'origine, les exploitations aubiétaines étaient constituées en polyculture et élevage bovin, domaine réservé des hommes. Mais dans toute ferme, on trouve une basse-cour, dont l'entretien était attribué aux femmes. Avec l'émergence des Ducs de Gascogne et de la Comtesse du Barry, elles se sont mises à gaver les canards pour les apporter à Gimont, mais tout cela en petites quantités. Il y a trente ans pile, jeune agriculteur, Pierre Lava décide de gaver ses canards mais il s'était mis une condition, à savoir transformer tout à la ferme, ressortir avec le produit fini et faire de la vente directe. Décision qui a été suivie d'effet immédiat.
La vente directe à la ferme constitue environ 40 % du chiffre d'affaires ; sur les foires et les marchés auxquels il a l'habitude de participer, le même pourcentage à peu près ; la vente par Internet qu'il a mis en place dès que cela a été possible matériellement - www.ferme-ensigues.com – varie entre 10 et 15 %. Le reste des ventes est fait par l'intermédiaire de boutiques, magasin de produits fermiers, l'un à Samatan et deux autres à L'Isle-Jourdain. Les ventes directes lui permettent de se constituer un fichier client qu'il utilise pour les fêtes de fin d'année.
Le Concours général agricole du Salon de l'Agriculture, Pierre Lava n'y participe que depuis environ une quinzaine d'années. Chaque année, il envoie un ou deux produits car bien sûr, cette participation a un coût. En 2019, il a en envoyé deux et le jury qui délibère, après avoir dégusté les produits, le samedi matin, jour de l'ouverture du salon, a récompensé ses rillettes d'une médaille d'or. En 2011, ses rillettes avaient obtenu une médaille de bronze et son foie gras une médaille d'argent en 2015.
Le gavage des canards
Répartis en 17 cycles de 12 jours, 12 cycles du mois de janvier au mois de juin, puis 5 cycles de septembre à mi-novembre, cela représente 1.800 canards environ sur une année. Les canards sont des canards mulards qui ont l'avantage de ne pas rejeter de graisse à la cuisson. Le gavage avec du maïs blanc en grain se fait matin et soir pendant douze jours au bout desquels ils sont abattus. A ce terme, leur foie a atteint 500 ou 550 grammes. Ainsi, le jour de la visite du JDG à la ferme, les 110 canards avaient été tués le samedi pour être découpés le lundi, avec en suivant la préparation des magrets, des cuisses et des manchons. Le mardi, ce sera le moment de réaliser les confits.Un nouvel arrivage, le matin même, était prêt pour démarrer un nouveau cycle.
La production s'arrête à mi-novembre car, du mois d'octobre au mois de décembre, ce sont 70 % du chiffre d'affaires qui sont réalisés. Il faut donc avoir son stock constitué pour pourvoir répondre à la demande de fin d'année.
A la fin de ces visites, il est évident que ces deux exploitations dont l'histoire est très différente, œuvrent dans un but identique, celui de proposer des produits de qualité pour faire honneur au département qu'elles représentent.
[1] : https://www.concours-general-agricole.fr/les-palmares/les-produits/