Petite parenthèse

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Avoir voix au chapitre

Large mobilisation contre le projet de réforme de la justice. Grève totale des audiences dans toute la France et grèves perlées  dans plusieurs barreaux ; les « cheminots en robe noire » ont laissé rabat et épitoge au vestiaire et mis  la clé sous la porte pour la deuxième fois (en deux mois).

Outre la dématérialisation de certaines procédures, cette contre-réforme prévoit  la suppression des tribunaux d’instance, pour diriger les justiciables  vers ceux de grande instance. Concrètement, des litiges concernant un surendettement, un loyer impayé ou une querelle de voisinage ne seraient plus jugés à proximité, mais dans les « mastodontes » judiciaires des grandes villes…déjà saturés.

Le citoyen lambda devra donc parcourir des kilomètres pour espérer en référer à un juge, et avoir voix au chapitre.

L’expression, souvent déformée en « avoir droit au chapitre », trouve son origine non pas dans les livres, mais du côté de la religion.

Au Moyen Âge,  le chapitre  désignait une assemblée de moines et chanoines formant un conseil, mais également le lieu où ils se réunissaient pour débattre des affaires de la communauté.

Ceux qui avaient alors le droit d’exprimer leur opinion -bien entendu les plus haut placés, comme les évêques- avaient ainsi « voix au chapitre » lors de la délibération.

« Respect de Dieu, propreté  et ponctualité » sont des termes d’ailleurs toujours inscrits en 1872, dans le règlement du greffe du Tribunal de Première Instance. Règlement qui intime au personnel sa présence dès 6 heures du matin avant une prière quotidienne, et  qui lui permet, dans sa « générosité » (sic), de « prendre de la nourriture entre 11h 30 et 12 heures, sans toutefois que le travail soit interrompu » !

Si, depuis la loi de séparation, la laïcité a banni ces obligations,  l’accès à la justice est devenu un droit démocratique. Mais aurons-nous toujours  voix au chapitre lorsque le désert judiciaire nous imposera une distanciation ?

Il semble évident que le projet présenté comme une « simplification des procédures pénale et civile »  vise, essentiellement, à  tenir éloignées les classes sociales les plus faibles.

Illustration Pixabay.com

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