Elle n’est pas toute jeune cette carte postale dénichée sur le marché, clin d’œil humoristique au « Voyage dans la Lune » de Méliès. Et pourtant, elle est terriblement d’actualité.
Le 6 février dernier, un milliardaire en mal de scoop a lancé un cabriolet rouge dans l’espace avec un mannequin au volant, et « Pas de panique » inscrit sur le tableau de bord. Sa fusée « porte-voiture », dotée de moteurs produisant plus de poussée que dix-huit Boeing 747, est considérée à ce jour comme la plus puissante au monde.
Coût de l’opération : 90 millions de dollars, sans compter la bagatelle de 100 000 dollars nécessaires à l’achat de la décapotable de luxe. Et 54 tonnes de déchets de plus en orbite terrestre.
Un « événement » que l’on pourrait facilement qualifier de complètement inepte, de stupide. Franchement, c’est « con comme la lune » !
Cette expression est relativement récente, puisqu’elle date du début du XXème siècle. Mais comment se peut-il que ce satellite, qui stabilise l’axe de rotation de la Terre (et donc son climat), régule les marées et participe à la vie terrestre, soit ainsi associé à la bêtise humaine, à la stupidité?
Si la lune est intimement liée à la rêverie, à la distraction (« être dans la lune »), elle pouvait signifier également au XVIIe siècle une instabilité mentale (d’où l’adjectif « lunatique »). Aujourd’hui encore, une personne irritable sera qualifiée de « mal lunée ».
Mais le fait que l’astre, lorsqu’il est plein, évoque un visage rond et inexpressif, expliquerait sa comparaison avec quelqu’un de stupide. Il se pourrait aussi que, associé argotiquement au postérieur, donc aux antipodes de la tête, siège de l’intelligence, on l’affuble ainsi de cette dépréciation sans fondement.
Rendons à la Lune ses lettres de noblesse, et sa place de petite sœur bienveillante en déblayant la stratosphère de toutes poubelles toxiques qui ressemblent à s’y méprendre à la pollution visuelle des panneaux publicitaires aux abords des grandes villes.
Malheureusement, après avoir ravagé la Terre par des déforestations à outrance, souillé les océans de déchets jusqu’à saturation, le capitalisme décomplexé et pollueur s’approprie ostensiblement l’espace, déjà encombré de technologies guerrières qui camouflent mal des préparatifs criminels.