Correspondance sans E.Mail

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Les belles images du temps passé

J’ai     retrouvé    dans  un  classeur  où  la  couleur  sépia   est passée  aux  gris  anciens  une  liste  de personnes  avec   les  adresses  très  complètes : c’était   le   pense bête pour  les  cartes de  vœux  et je me  souviens . On achetait  les  cartes  chez  l’épicier  du  village   qui était  en  même  temps   mécanicien pour les bicyclettes  et  réparateur  de  casseroles. Il  sortait  de  son atelier  avec l’air bougon, s’essuyait   les mains  à son  grand   tablier   bleu  puis  il ouvrait  un calendrier  des postes  d’une  année fort  lointaine. Il   y stockait  les cartes  de  nouvel an entre  les   pages, on peut  tourner  les  feuilles  mais  sans   toucher la carte  « On ne choisit qu’avec les yeux »  disait –il. On hésitait  entre  le paysage de  neige   avec   les  rennes, le  chalet  de  montagne  sur fond de  sapin. On était particulièrement  attiré  par   les  cartes  embellies   par  une  poudre  de verre  et  qui  brillaient  .

Cette longue  hésitation  agaçait  Gaston, qui  portait le sobriquet de Tokalon ( car il avait été  chauffeur  dans  cette  grande maison d’esthétique ) et  en mettant  les cartes dans  une poche   à café il  nous disait  «  je perds du temps et je ne gagne rien, en plus il faut  que je vous donne  l’enveloppe ».

La  corvée  des   cartes  de vœux

A  la maison, on étalait  sur la    toile  cirée  de  la table de la cuisine  le  journal  de   «  La  petite  Gironde »  ( ancêtre  de Sud  Ouest  aujourd’hui  disparu  dans  le Gers  ) . On  ouvrait   le flacon   d’encre   violette , on   recherchait   le  porte – plume   avec  la  plume  sergent  -  major , celle  qui permettait   de   bien faire   les  pleins  et  les   déliés .  Et surtout   disaient en  duo    ma mère  et  ma grand  mère «  applique-  toi  et  ne  fais   pas de taches  sur les  cartes » J’avais   un  modèle  «  A l’occasion de la  nouvelle   année ….. » et nos vœux  étaient  envoyés   sans   faute  et  sans  tache  avec  le  secours  du  buvard  portant   la    réclame  du  chocolat  Menier. Nous   prenions  la fameuse   liste   dont   je vous parle   plus  haut et qui  était   mise  à jour  au cours  d’une  réunion   de réflexion entre  mère  et grand- mère .

On  barrait bien entendu  les décédés , mais  on enlevait  aussi   quelques  noms,  il  y  avait   eu    des brouilles  au  cours  de l’année  .Je   rechignais  aussi sur certains  membres de   la famille   qui   n’envoyaient   jamais    d’étrenne, motivation forte  des cartes  de  vœux .Les   adresses   étaient    confiées  à  ma mère   qui    avait   une  fort   belle   écriture . On   collait  le timbre     dans   l’angle, bien   à droite  et on  léchait le bord de  l’enveloppe   pour  en assurer  la fermeture. On les   confiait au   facteur  qui  faisait  la   gueule, le tri serait   plus  long à  son retour  à l’agence   postale de Riguepeu.

On l’invitait  à manger   alors    il  posait   plus   délicatement  notre  courrier   au fond  de  son sac  de cuir .

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