Venu des temps ancestraux, le Noir de Bigorre coulait des jours heureux au pied de ses montagnes, aux confins des Hautes-Pyrénées, du Gers et de la Haute-Garonne. Mais, dans les années 50, il fut menacé d’être décimé par le virus ultra contagieux de la productivité à tout prix.
Son « défaut « ? Prendre tout son temps pour engraisser sainement. Avec sa robe et ses soies noires, l’animal adore se promener sereinement dans les pâturages et les sous-bois, à la recherche de friandises telles que glands et châtaignes. Nourri d’herbe, de seigle et d’orge, sa croissance a la particularité d’être lente, ce qui confère à sa chair une qualité et une saveur exceptionnelles.
Devenu indésirable, car considéré comme « trop lent » dans la course à la production, sa race décline alors peu à peu. En 1981, on ne dénombre plus que trente-quatre truies, et deux verrats.
La fin d’une époque ? Sûrement pas. Tandis que viandes OGM ou autres reconstitutions en laboratoires envahissent les supermarchés, une poignée d’irréductibles éleveurs relèvent un défi : lui redonner toutes ses lettres de noblesse sur ses terres d’origine.
Un collectif se met en place, avec la ferme ambition de pérenniser la renommée du Porc Noir de Bigorre grâce à un travail rigoureux, respectueux de l’animal et de la tradition artisanale. La filière se structure au sein d’un consortium, regroupant éleveurs, artisans charcutiers, salaisonniers et organismes qualifiés.
Leur persévérance acharnée et leur patience à toute épreuve finissent par être récompensées en 2015, lorsque le Jambon du Noir de Bigorre est reconnu en AOP, et sa viande fraîche en AOC. Avant d’obtenir à son tour la précieuse Appellation d’Origine Protégée deux ans plus tard.
Une reconnaissance méritée pour les farouches défenseurs de ce symbole vivant du patrimoine pyrénéen, doublé d’un gage de qualité pour les consommateurs grâce à un cahier des charges exigeant : six mois au moins en plein air, des prairies boisées, enherbées et clôturées par des haies, pas plus de vingt bêtes par hectare, nourries aux céréales garanties sans OGM…
À son rythme, lentement mais sûrement, le Porc Noir de Bigorre a regagné le cœur des fins gourmets en les faisant chavirer par la tendresse et la générosité de son gras savoureux, où viennent se mêler délicatement les parfums des sous-bois en liberté.
Dans le Gers, on compte une quinzaine d’éleveurs concentrés sur la zone Astarac uniquement. À Moncorneil-Grazan, entre prairies et chênaies, Pierre et Julie Grau sont installés depuis dix ans.
La production de ces porcs au caractère si singulier leur convient parfaitement. « Tout nous plait, le temps nécessaire à leur croissance (14 mois en moyenne), les conditions magnifiques d’élevage… Ce sont des cochons très attachants, beaux et sympathiques. Il faut savoir patienter pour obtenir la qualité… » explique Julie.
À quelques kilomètres de leur élevage, à Mongauzy, les amateurs peuvent en déguster toute la saveur à travers les produits qu’ils proposent à la ferme.
Photos Élevage de Grau - DR
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