Robert Couffinal, radioamateur passionné membre de l'ADRASEC 32, traque les radiosondes dans la campagne gersoise.
Il partage avec nous son expérience.
"Saviez-vous que chaque jour, partout dans le monde, un millier de ballons gonflés à l’hélium ou à l’hydrogène s’envolent vers la haute atmosphère pour nous aider à mieux prévoir le temps ? Ces petits messagers sont suivis de près par une poignée de passionnés, les chasseurs de radiosondes, dont certains jouent un rôle actif dans la sécurité civile.
Radiosondages : un réseau mondial pour comprendre le climat
Le réseau mondial de radiosondage comprend des stations réparties sur tous les continents, avec une concentration plus importante dans les régions densément peuplées de l'hémisphère nord. Les données collectées sont transmises en temps réel aux centres météorologiques nationaux et internationaux, où elles sont intégrées aux modèles de prévisions numériques. Cette infrastructure mondiale constitue, pour l’instant, un élément irremplaçable pour la qualité des prévisions météorologiques.
C’est l’Organisation météorologique mondiale (OMM) qui coordonne ce réseau gigantesque.
Méthodes de mesure
La technique du radiosondage consiste à lâcher dans l’atmosphère un ballon gonflé avec un gaz plus léger que l’air (hydrogène ou hélium), dont la vitesse ascensionnelle moyenne est comprise entre 4 et 8 m/s. Sous le ballon est fixée une sonde équipée de capteurs de pression (P), de température (T), d’humidité (U) et de vent (V), capteurs dont les mesures sont transmises au sol par modulation d’une onde électromagnétique porteuse dans le domaine radio (403 MHz), d’où le nom de radiosonde.
Un système dérouleur accompagne la radiosonde afin de lui permettre de s’écarter du ballon d’une trentaine de mètres, juste après le lâcher.
L’équipage ballon-sonde est complété par un parachute intercalé, qui permet à la sonde de retomber lentement après l’éclatement du ballon, dans des conditions de sécurité vis-à-vis d’une personne susceptible de se trouver malencontreusement à son point de chute.
Les ballons peuvent également représenter un danger pour les avions de ligne (hublot, réacteur, etc.). Il faut néanmoins noter que ce type d’incident est rare et, jusqu’à présent, sans gravité.
Afin de prévenir tout risque, tout radiosondage effectué depuis une plate-forme aéroportuaire fait l’objet d’une publication d’information aéronautique, ou d’une procédure particulière appelée NOTAM, qui autorise Météo-France à effectuer le lâcher dans un cadre strict (lieu, horaire, autorisation de la tour de contrôle, etc.).
En France : une météo sous haute surveillance
Chez nous, c’est Météo-France qui orchestre ces lâchers quotidiens, deux fois par jour, depuis plusieurs centres en métropole (Ajaccio, Bordeaux, Brest, Nîmes, Trappes) et aussi en outre-mer.
Environ 4 000 sondes sont envoyées chaque année depuis le territoire français.
Principaux sites de lancement des radiosondes en France
D = Brest, E = Trappes, J = Bordeaux, N = Nîmes, R = Ajaccio
Source : Radiosonde.eu
Modèle de radiosonde M20 de Météomodem (poids 36 g)
Source Météomodem
Les radiosondes utilisées en France sont majoritairement des modèles M10 et M20 développés par la société Météomodem, une entreprise française spécialisée dans les instruments météorologiques.
Chaque radiosonde est équipée d'un GPS permettant de calculer la direction et la vitesse des vents en fonction de sa position.
Des passionnés à la recherche des sondes tombées du ciel
Après avoir atteint 30 km d’altitude (là où la température peut descendre à -60 °C !), le ballon éclate. La radiosonde retombe sur Terre et se pose « n’importe où » et abandonnée dans la nature, car il serait trop coûteux de la récupérer.
Mais, ce que peu de gens savent, c’est qu’une fois retombées, ces sondes peuvent être retrouvées et récupérées par des radioamateurs !
Pourquoi ce sujet intéresse-t-il les radioamateurs ?
Outre le fait que les radioamateurs sont concernés par la météo (un paramètre essentiel pour la propagation des ondes radioélectriques), la chasse à la radiosonde offre un atout majeur : suivre une balise émettrice en vol, puis la localiser au sol grâce à la radiogoniométrie.
Pour certains radioamateurs, cette compétence est essentielle, notamment pour les membres de la FNRASEC / ADRASEC (les radioamateurs au service de la sécurité civile), sollicités par le ministère de l’Intérieur ou par les préfectures dans le cadre de recherches de balises de détresse aéronautique (plan SATER B, par exemple). Les radiosondes permettent donc de s'entraîner efficacement à la recherche de balises.
Dans certaines régions, les radioamateurs sont également volontaires dans le cadre des opérations « Un Ballon pour l’École » (UBPE), un projet mené par l’association Planète-Sciences et le CNES, qui finance des ballons stratosphériques pour les établissements scolaires.
Dans ce cadre, les radioamateurs apportent leur expérience sur le terrain, particulièrement en matière de radiogoniométrie, afin de retrouver la nacelle du ballon et de la rapporter à l’école.
Encore une fois, les radiosondes constituent un excellent moyen d’entraînement.
Une mission également écologique
La chasse aux radiosondes, pour les radioamateurs et autres passionnés, est aussi une opération écologique, puisqu’elle permet de dépolluer les zones de chute en récupérant la chaîne de vol (ballon éclaté, parachute, dérouleur avec 30 m de fil, et la radiosonde contenant une batterie). De plus, certains composants des radiosondes peuvent être réutilisés ou recyclés, contribuant ainsi à la réduction des déchets.
De ce fait, en France, la majorité des chaînes de vol sont aujourd’hui récupérées.
Les radiosondes météorologiques dans le département du Gers
Les radiosondes qui survolent ou atterrissent dans le Gers proviennent principalement de la station météorologique de Bordeaux-Mérignac (à environ 150 km à l’ouest) et, plus occasionnellement, de celles de Toulouse (Météo-France) ou Biscarrosse (militaire), selon les conditions de vent.
On estime que le département du Gers reçoit approximativement 10 à 20 radiosondes par an.
Le caractère rural du Gers présente à la fois des avantages et des inconvénients pour leur récupération :
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Avantages : moins d’interférences radioélectriques, facilitant la détection des signaux ;
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Inconvénients : terrain parfois difficile d’accès, notamment dans les zones boisées et les coteaux typiques du paysage gersois.
Radiosonde perchée au sommet d’un grand chêne, à une dizaine de mètres, sur la commune de Bazian (Gers)
Chaîne de vol récupérée sur la commune de Caillavet (Gers) le 29 mars 2025 par F1FXW et F4GUO
En conclusion
La radiosonde : un petit instrument, de grandes histoires
Derrière chaque ballon-sonde météorologique se cache une aventure scientifique, humaine, et parfois même solidaire.
Grâce à ces instruments, les météorologues affinent leurs modèles.
Grâce aux passionnés, ces objets ne deviennent pas des déchets.
Et grâce aux ADRASEC, cette passion devient un engagement au service de tous.
Alors, la prochaine fois que vous entendrez parler de ballon-sonde, pensez à cette chaîne invisible qui relie le ciel à la Terre… et à ceux qui la suivent à la trace !"
R. Coufinal - radioamateur (F1FXW) - membre ADRASEC 32
Documentation, sources
https://meteofrance.fr/radiosonde
https://www.meteomodem.com/meteorology?lang=fr
https://fr.wikipedia.org/wiki/Radiosondage
http://www.radiosondes.la-radio.eu/index.html
Vidéos
Ici Fred (indicatif radioamateur F5OZK) fait tous ses comptes rendus sur sa chaine YouTube : https://www.youtube.com/user/F5OZK/videos
Photo-titre : « Robotsonde » Météomodem pour le lancement automatique des ballons sonde - Photo Météomodem