Jeudi matin, vers 9 heures, je déambulais sur le parvis de la cathédrale Saint-Pierre de Condom. Tout à coup, une multitude de petites voix m’interpella : "Viens, viens, nous avons des choses à te raconter !" Intriguée et seule sur la place, je compris que ces voix s'adressaient à moi. Guidée par ces paroles, je rentrai dans la cathédrale, et là, les pierres, les sculptures et les vitraux voulurent tous s'exprimer en même temps, pire que dans une salle de classe en excitation. Le calme revenu, tour à tour, les voilà qui me relatent les faits.
"Mardi soir, vers 18 heures, un homme jeune est monté à la tribune. Ensuite il s'est installé à la console de l'orgue. Pendant ce temps les Amis de l'Orgue s'affairaient dans la nef et sur le parvis. Sur le coup nous n'avons pas bien compris. Puis des gens sont entrés et se sont assis gentiment. Nous ne les avons pas connus : ils portaient tous un carré de tissu ou de papier bleu sur le visage ! Peu importe, ils avaient tous l'air bien heureux au fond de leurs yeux. Tout à coup, une dame a pris la parole et a cité le nom de Christophe Bouhier. Vous vous rappelez, celui qui s'est installé à l'orgue. Mais nous le connaissons, dirent les vitraux, il est déjà venu. Il est organiste !
Il a joué la sonate en do pour les commençants de Mozart (1756-1791). Certes, à l'origine, c'est une pièce pour piano mais il l'a interprétée avec tant de finesse et de délicatesse que nous avons senti toute la structure du vaisseau médiéval se ranimer en douceur. Ensuite il nous a offert de la musique romantique : une pastorale de Louis Vierne (1880-1932). Plus mystérieuse, avec des harmonies beaucoup plus modernes et subtiles, cette musique nous a enchantés.
Nous les sculptures nous étions ravies d'entendre que le mezzo forte commençait à animer les vitraux ! Après, l'artiste nous a amenés à l'époque baroque avec François Couperin (1668-1733) dit "La Grand" avec des extraits de la messe des couvents. Avec le premier, nous avons retrouvé les contrastes de timbres et de puissance de l'orgue. Le second arborait des sons plus puissants et des chassés-croisés mélodiques qui ont invité les pédales à s'activer comme dans une fête conviviale, tout en demeurant digne.
Au milieu, Christophe Bouhier a glissé une improvisation comme c'est la tradition chez les organistes. La quatrième pièce musicale qu'il nous a présentée était Orguel, une de ses propres compositions, dédiée à sa fille. Dans ce morceau, des sons sombres et feutrés alternaient avec des clairs, tout comme la douceur cédait périodiquement la place à la puissance. Bref, ce fut un régal !
Jean-Philippe Rameau (1683-1764) s'est approprié la suite du concert avec Trois rondos : Les joyeuses qui virevoltaient avec gaieté et légèreté, La follette qui est demeurée bien charmante et sympathique, enfin les Tourbillons de l'âme qui sont tout de même restés dans les normes de la courtoisie baroque. Pour terminer, nous avons eu le plaisir d'entendre la Toccata et fugue en ré mineur BWV 565 de l'inégalé Jean Sébastien Bach (1685-1750). Nous étions au paradis !"
Voilà tout ce qui m'a été confié par toutes ces petites voix. Le public était ravi et heureux de retrouver cette musique, la Musique !
Les Amis de L'Orgue remercient encore Christophe Bouhier pour son talent musical. Nous le retrouverons pendant la saison avec grande joie.
Nous invitons tout le public mardi 20 juillet 2021, à 18 heures pour accueillir le saxophoniste Matthieu Samani et l'organiste-compositeur Laurent Carle.
Nous sommes sûrs que vous allez passer, encore, un très bon moment musical.
Merci à Sylvie Verdier - dans notre version précédente, cet article avait été attribué à tort à Claude Descudé, vice-présidente des Amis de l'Orgue, nous rectifions bien sûr notre erreur - de nous avoir retracé son entretien avec ces petites voix mélomanes.
