Nogaro

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Les Hollandais ont joué un grand rôle dans le lancement de la distillation

Jacques Lapart (1) a fait le 9 décembre une conférence très vivante à la Cave de Nogaro (2) sur l'histoire de l'armagnac . Dans la salle des alambics : on ne pouvait trouver meilleur endroit. Et, comme l'a fait remarquer Danielle Marseillan du Clan (3) qui a présenté le conférencier, l'ambiance olfactive, avec les alambics en pleine distillation, était dans la note.

Le conférencier explique qu'il a travaillé sur ce sujet avec son collègue Francis Brumont pour un colloque de 2010 sur l'armagnac. Dans ces recherches, les registres des notaires sont une source primordiale : 400 ont été étudiés.

L'eau ardente est un médicament - Il constate d'abord que la vigne est cultivée en Gaule depuis l'époque gallo-romaine. On en a des témoignages avec de nombreuses mosaïques venues jusqu'à nous. Au Moyen-Âge, on distille « l'eau ardente » en toute petite quantité pour un usage de médicament (4). En 1310, Vital Duffour prétend que l'eau ardente guérit 300 maladies. Il n'y a pas encore de distillation pour la boisson en Gascogne. C'est seulement au XVIe siècle qu'elle fait « des débuts timides » avec l'exportation vers la Hollande depuis Bordeaux et La Rochelle. Et c'est au XVIIe siècle que cela démarre pour de bon sous l'influence des marchands hollandais qui exportent par Bayonne. On ne parle plus d'alambics, pour les grandes quantités produites, les Hollandais apportent « des chaudières à brûler le vin » et on ne distille pas, « on brûle ». « Les eaux-de-vie viennent de Chalosse, de Tursan, du Bas-Armagnac (Nogaro, Cazaubon, Le Houga) et un peu de la Ténarèze ».

Jacques Lapart note que, comme les vins ne « tiennent » pas longtemps, on distille. Les chaudières sont onéreuses (plus de deux fois le prix d'une paire de bœufs). On les trouve donc dans les grands domaines et elles sont parfois données en dot. Les pièces d'eau-de-vie partent « en charroi au Mont de Marsan » puis vers Bayonne puis vers l'Angleterre.

Grosses commandes de l'Armée - Au XVIIIe siècle, la production d'eau-de-vie va croissant. Mais il s'agit toujours d'alcool blanc fraîchement distillé, c'est ce que veulent les clients. Et on ne fait pas vieillir. Après la guerre d'Indépendance, les États-Unis privilégient les alcools français au lieu de ceux des Anglais. Un tournant arrive à la fin du siècle avec les guerres de la Révolution et de l'Empire : l'Armée fait d'énormes commandes d'eau-de-vie. Et la Gascogne est couverte de vignes de cépages de blanc. Au XIXe siècle, on modernise les chaudières. Les nouveaux modèles consomment moins de bois et moins de vin.

L'âge d'or sous Napoléon III - C'est au début du XIXe siècle que l'on commence à parler « d'armagnac » et le faire vieillir. Un document de 1824 décrit parfaitement les caractéristiques des régions de production. Et Bordeaux supplante de plus en plus Bayonne pour l'export. Sous Napoléon III, c'est l'âge d'or : on distille malgré l'oïdium. Mais après 1870, le phylloxéra arrive et, en 10 ans, il détruit plus de 90 % du vignoble. À la veille de la Guerre de 14, le vignoble est encore fragile et la qualité [sauf exception] n'y est pas. C'est depuis environ cinquante ans que de gros efforts ont été faits pour obtenir des eaux-de-vie de qualité.

Quant au transport de l'armagnac, il se fait aujourd'hui exclusivement par la route, après qu'au XIXe siècle les élus se sont disputés pour avoir des tronçons de chemin-de-fer dans leur canton. Et les barques chargées de barriques ne naviguent plus sur le Midour et l'Adour.

1) Professeur d'histoire et géographie, conservateur des antiquités et objets d'art du Gers et secrétaire de la Société archéologique, historique, littéraire et scientifique du Gers. (1) La CPR (Cave des producteurs réunis Les Hauts de Montrouge. (3) Culture loisirs animations Nogaro). (4) L'alambic n'est pas un mot arabe, mais un mot grec « ambix » (vase à distiller), précédé d'un article arabe. Les Grecs et les Égyptiens distillaient pour les mêmes usages.

Danielle Marseillan présente Jacques lapart 1bis 091215.jpg
Danielle Marseillan présente Jacques lapart 1bis 091215.jpg
Carte Sud Ouest au XVIIIe siècle 1bis 091215.jpg
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Mosaïque de Séviac à Montréal-du-Gers 1bis 091215.jpg
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Mosaïque du Mian à Valence 1bis 091215.jpg
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Jacques Lapart 2bis 091215.jpg
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