Nogaro – Vino Veritas, un film engagé politiquement

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Et ensuite un débat mesuré

Le 15 mars, le Clan centre socioculturel  et le Conservatoire du patrimoine et des musées du département proposent d’assister à la projection du film Vino Veritas de Pascal Obadia et de participer au débat qui suit. Débat avec Jean-Paul Sempé (1) et Guy Dutirou, animateurs de l’atelier « le vin, la vigne et ses produits » au Clan.

Un film engagé bio

Le film manie les contrastes : il commence par montrer des vendanges en Espagne d’une vigne quasi-sauvage, non-traitée et peu productive. Le pressurage est fait par foulage et tous font la fête. C’est merveilleux, mais l’histoire ne dit pas de quoi vit le propriétaire de la vigne. Puis c’est l’horreur absolue : en Californie, des km² de vignes alignées au cordeau et traitées massivement par phytosanitaires en tracteur et par épandage en avion (ce dernier est interdit en Europe).

Un vent de fraîcheur arrive avec le salon des vins de La Rue 89 (« Sous les pavés, la vigne »), réservé aux artisans vignerons du monde entier qui font du vin « naturel » (2) et n’ont pas accès à la grande distribution. Et aussi avec le Salon Marjolaine, salon des vins bio (3).

Plusieurs séquences sont consacrées à l’Institut Delinat (4), fondation suisse qui prône une viticulture bio dans un environnement dédié à la biodiversité (arbres, arbustes, fleurs, ruches, insectes divers sont au milieu des vignes). On voit des membres de cette fondation planter des arbres fruitiers et des plantes diverses dans les vignes en Provence ou ailleurs. On se demande pourquoi aucun des représentants de l’Inra (Institut national de recherche agronomique), de l’INV (Intitut national de la vigne et du vin ni de l’Inao (Institut national des appellations d’origine) n’a été interrogé par le réalisateur...

On voit aussi un congrès d’artisans vignerons européens à Florence, qui s’engagent à respecter l’environnement et à déserter la grande distribution.

Bouffonneries

S’en suit une bouffonnerie de Greenpeace avec Spencer Tunick, artiste américain, qui organise des « installations » de centaines de volontaires nus au milieu des vignes de Bourgogne, comme il le fait déjà, paraît-il, de par le monde (5).

Séquence amusante : adepte de l’agriculture biodynamique (6), on voit un viticulteur enterrer – loin des ceps de vigne – des cornes de bovins qu’il remplit de bouse de vache – pour mettre à l’unisson la terre et le cosmos...

La parole passe à plusieurs viticulteurs de France qui expliquent que la protection des travailleurs qui traitent la vigne est relativement récente. Ils font à présent attention à laisser plusieurs jours de délais après traitement avant d’envoyer les ouvriers travailler la vigne et la majorité cherche à employer le moins possible de phytosanitaires, c’est l’agriculture raisonnée (7). Un peu perdus, certains avouent cependant qu’ils ne pourraient pas vivre de leurs vignes s’ils ne traitaient pas et, après tout, « est-ce que l’État ne laisse pas en vente libre ces produits ? ».

Après le film, le débat

Avant de répondre aux questions du public, Jean-Paul Sempé fait une introduction générale. La superficie actuelle (2015) du vignoble mondial est de 7,5 millions d’ha, en diminution constante en Europe, mais en progression régulière en Chine. L’Espagne a 1 million d’ha, la Chine 0,780 mha, la France 0,786 mha, l’Italie 0,682 mha, la Turquie 0,697 mha, les Étas-Unis 0,419 mha, l’Argentine 0,225 mha et le Chili 0,211 mha.

Puis l’intervenant en arrive au film : il estime qu’il y a là des idées à prendre. D’ailleurs, le monde de la vigne et du vin évolue. C’est ainsi que l’Inao a fait parvenir aux ODG (organismes de défense et de gestion des appellations) des préconisations pour l’insertion de mesures agro-environnementales dans les cahiers des charges des appellations.

Mais pourquoi le vin nourrit-il les passions ? Parce que les hommes ont toujours parlé du vin : ils en ont besoin pour faire la fête.

L'Esca préoccupation majeure

À propos des maladies de la vigne, la plus préoccupante est l’Esca qui détruit chaque année de 5 à 15 % des ceps depuis que l’arsénite de soude est interdit. Les recherches portent sur des micro-organismes antagonistes des agents pathogènes. Il y a un cépage résistant aux maladies : le baco 22A, mais, c’est un hybride de noah (interdit) et de folle blanche et il n’est autorisé que pour la distillation de l’armagnac. De plus, les vignerons sont décidés à cultiver en priorité leurs cépages autochtones. Noter que les vins de distillation sont sans soufre. Pour les autres vins, les doses de sulfite ont été réduites.

Il y a 350 AOC (AOP) de vin en France. Chacune a un cahier des charges très précis. Le chapitre 1 est relatif au terroir (l’analyse chimique du sol indique si celui-ci fait partie du terroir) ; le chapitre 2 décrit le climat caractéristique de l’appellation (comme le brouillard favorable au Château d’Yquem) ; le chapitre 3 parle des cépages (chaque terroir a des cépages qui lui sont bien adaptés).

À noter que l’on vendange les blancs de nuit, c’est-à-dire à quelque 12° plutôt qu’à 25°, cela permet de garder les arômes et de diminuer l’oxydation.

Donc, le monde viticole évolue, quoique à des vitesses différentes. Il y aura des problèmes pour les vignes conduites en bio si leurs voisines ne le sont pas.

Jean-Paul Sempé remarque – cela va dans le sens du bio – qu’un végétal qui souffre est fragile et donc plus sensible aux agressions.

Mais le vin restera un fait de société., cela dans un monde qui n’est pas figé.

Viticulteurs bio du Gers que nous avons trouvés :

L’Union Plaimont Producteurs (Caves d’Aignan, Plaisance-du-Gers et Saint-Mont) produit des vins bio dans toute la gamme de ses appellations, comme, par exemple, « Nature secrète » (AOP Saint Mont) et Colombelle bio en IGP Côtes de Gascogne. Et aussi Domaine de Pajot 32800 Éauze, Domaine Le Bouscas 30230 Gondrin, Vignoble de Mandelaëre vignoble de Saoubis 32800 Ayzieu, Château de Herrebouc 32190 Saint-Jean-Poutge, Domaine de Mastric 32460 Le Houga, Maison Darbeau 32110 Cravencères, Domaine Haut-Campagnau 32250 Montréal-du-Gers, Domaine Capmartin 32400 Maumusson-Laguian.

Notes

(1) Jean-Paul Sempé est actuellement membre de L’Inao (Institut national des opérations d’origine). Il a été, entre autres fonctions, viticulteur, président de la Cave coopérative CPR Les Hauts de Montrouge de Nogaro. Guy Dutirou est un vigneron de Cravencères en retraite. (2) Salon rue 89 : mettre en avant des artisans (vigneron-ne-s mais pas que) et leurs productions actuelles, naturelles, commercialisées hors des circuits de la grande distribution et parfois chahutées par l’administration. De plus, le but des vignerons de l’Association des vins naturels est d’élaborer des vins « issus de la vinification naturelle », à savoir sans aucun intrant, en respectant les règles bio et biodynamiques. (3) Viticulture biologique : Les viticulteurs en agriculture biologique s’astreignent à n'utiliser que des produits exempts de molécules organiques de synthèse. Pour la culture de la vigne, ils emploient des matières premières d’origine naturelle et cherchent à promouvoir la lutte naturelle entre les espèces. Leur objectif est de privilégier la vie des sols, la pérennité des espèces animales et végétales favorisant alors l’écosystème naturel. Le recours aux produits phytopharmaceutiques, même naturels, ne doit être qu'exceptionnel (https://www.vignevin-sudouest.com). (4) Le Delinat-Institut est une fondation suisse d'utilité publique qui se consacre au développement scientifique de stratégies écologiques globales en faveur d'une agriculture économiquement durable, climatiquement neutre et riche du point de vue de la biodiversité. (5) Spencer Tunick, photographe de nu à l’origine, résume ainsi sa démarche : « La Nature est sur le point de rendre les armes face à la violente domination de l'Homme. Aujourd'hui, à l'heure où le monde se transforme en une jungle de béton, nous oublions parfois ce lien étroit qui existe entre notre corps et la Terre. À travers mon art, j'espère attirer l'attention sur la vulnérabilité de notre existence et sur ce lien singulier qui relie les êtres humains aux aliments qu'ils consomment, pour leur plaisir ou pour leur survie.» (https://greenpeace.fr). (6) Agriculture biodynamique : « dynamisation de forces cosmiques » selon l'anthroposophie (société occultiste dont le grand homme est Rudolf Steiner. Celui-ci, sans rien connaître à l’agriculture, a prescrit des opérations agricoles (opérations en fonction de la position des planètes etc.) qui, selon la science conventionnelle, tiennent de la pensée magique. Mais la biodynamie applique les règles de l’agriculture bio. (7) Parmi les principes de l’agriculture raisonnée : le respect de l’environnement, la maîtrise des risques sanitaires, la santé et la sécurité au travail et le bien-être des animaux ; la maîtrise des intrants agricoles ainsi que des effluents et des déchets produits par l’exploitation ; la mise en œuvre de pratiques culturales permettant la préservation des sols et limitant les risques de pollutions (wikipedia).

3 Guy Dutirou et Jean-Paul Sempé écoutent une question 1bis 150317.jpg
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1 Christophe Peaudecerf Jean-Paul Sempé Anne Manceau Guy Dutirou 1bis 150317.jpg
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